Partie XXVI :

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XXVI

-Regard externe.

« Déjà tu prends ta décision solo alors qu'on était censé être un duo -rires nerveux- c'est très bien ! Et tu sais quoi ? T'as raison Jalil : tu n'es pas bon pour moi . Je vais écouter mon frère et me barrer loin de toi et de ta mentalité de fou parce que sérieusement je crois avoir assez de poids sur mes épaules pour ensuite supporter tes sauts d'humeur et ta sottise . A force de te méfier de tout et tout le monde, de trop réfléchir et voir des problèmes là où il n'y en a pas tu resteras tout seul et toute ta vie. J'ai fait beaucoup trop de sacrifices sans rien recevoir en retour moi d'accord ? , je n'ai jamais connu ça , j'étais tranquille avec ma petite famille , t'as débarqué , muet et brutal et t'as tout changé , tout putain ! Ce n'est pas une fierté ni une protection tout ce que tu fais là , tu n'as juste pas du courage et c'est dommage . Maintenant ciao comme t'as dis et bonne continuation. »

« Nique sa mère. Elle va se faire foutre et si jamais je la croise je la viole on verra qui c'est qui a peur ».
Une p'tite phrase qu'il se déballe intérieurement quand la voix toute tremblante et sec de Amira joue des percussions dans son crâne.
Ces paroles crues et directes lui lacèrent le cœur. C'est énervant , ça fait chier , ça fout un coup à sa fierté et à ses principes qu'une p'tite meuf lui crache haut et fort ce que chacun ravale et ça lui fait surtout mal même un mois après qu'elle lui a envoyé ce message vocal .
Ouai ça lui fout un sale truc que malgré tout les efforts qu'il a essayé de faire elle ne voit en lui qu'un « muet et un brut » , qu'il la lâche alors qu'elle avait juré de pas le laisser seul-tout , que c'est elle qui avait parlé de rester et de faire tout ensemble , c'est elle qui l'avait rendu comme ça.
Bordel lui aussi il n'avait pas demandé à la connaitre ni à subir et lui faire subir tout ce boucan. Il se serait bien passé d'elle aussi , de sa grande gueule , de ses sauts d'humeurs , ces ordres ou conseils à deux balles.
Ca fait un mois et aucun des deux n'a gerbé sa fierté .
Au finish c'est peut être mieux que chacun bouge de son té-co , parce que trop différents ou trop pareils il ne sait pas mais c'est peut être mieux , ça lui passera , il verra plus sa grosse tête se dessiner dans son crâne ou qu'il ait envie de l'appeler , de se disputer avec elle ou de rigoler avec elle , qu'il ai envie de lui foutre une balayette ou de la toucher , ca lui passera , bientôt , il l'espère.

[...]

- Jalil ?

Elle vient de mettre Inaya dans son lit . Assez agitée aujourd'hui , la p'tite princesse est à son 11e mois , elle s'agrippe aux jambes de son père pour marcher , crache du charabia à longueur de journée et ne lâche plus sa seule famille. Elle devient de plus en plus attachante et ajoute de la fraîcheur et de la lumière dans la maison et dans leur cœur et ça wallah ça ne peut que refouler du bien.

Elle se poste à la porte de sa chambre pour le voir , lui parler , au moins rester avec lui.
L'expression qu'elle lit sur le visage cramé de Jalil lui refile des céphalées.
Elle l'a souvent vu triste, énervé , trop mélancolique ou pas du tout , mais ce regard vide , fixé sur le plafond troué toute la journée depuis quelques jours , lui fait vraiment ... peur. C'est un sale sentiment de flippe et de culpabilité qui la ronge.

Jalil - Oui yemma.

Beaucoup de mères trouvent ça normale, indispensable , tranquille de taper une conversation tout les jours avec leur progéniture mais ce sale caractère, réservé , timide , solitaire de Jalil c'est sa mère qui lui a refilé çà.
Elle parle peu ou pas , voire jamais. Elle est de ce qui préfère œuvrer silencieusement, prier pour quelqu'un discrètement, s'apitoyer sur son sort secrètement pour ne pas blesser ou déranger explicitement. Donc elle regarde, elle se tait et voit son seul enfant faire mal et se faire mal , sombrer dans la déchéance et la mécréance , la dépression et la non-soumission.
Ce n'est pas un manque de responsabilité ou du « je m'en foutisme » non !
Cette femme dont les cheveux commencent à virer au gris surplombant un p'tit visage tout pâle , fatigué , a juste eu un fils qui n'a pas trouvé normale que sa mère trime pour lui. Chance ou malchance ? Elle ne sait pas mais elle aurait voulu qu'il la laisse faire , qu'il n'essaye pas de prendre la place du mari , du père et du fils alors qu'il n'était même pas ado.
Elle lui a toujours laissé libre champ par manque d'autorité , de perte de contrôle, de fermeté juste pour qu'il soit bien, seulement bien.

"A la youv"Où les histoires vivent. Découvrez maintenant