Chapitre 11 - Après la tempête, le chaos.

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Le lendemain, Thomas est déjà levé quand je me réveille et c'est tant mieux, la situation aurait été trop gênante sinon. Je garde le lit quelques minutes de plus, fermant les yeux pour retenir encore un peu la sensation de ses bras autour de moi.

Je me serais bien passé d'aller au travail aujourd'hui mais tenir une journée va être gérable après tout. Je rejoins au rez-de-chaussée Thomas, déjà douché et habillé. Il finit de déposer le petit déjeuner sur la table de la cuisine : café, jus d'orange, fruits et pain grillé me rappellent mon manque d'appétit de ces deux derniers jours et c'est le gargouillis de mon ventre qui signale ma présence.

Nous nous saluons et échangeons des banalités en prenant le petit déjeuner ensemble sans aborder la nuit dernière. Je crois que nous nous sentons trop gênés pour en parler.

Nous nous rendons ensemble au travail après un détour rapide chez moi. Ça me fait bizarre de le voir patienter sagement dans mon salon le temps que je change de vêtements. Mon logement est bien plus modeste que le sien et la déco est plus ...eh bien plus moi, quoi ... Mangas et vinyles couvrent mes étagères et des figurines hétéroclites sont réparties un peu partout. Je vois sa tête regarder dans tous les sens, se penchant de temps en temps pour observer une figurine en plissant des yeux ou prenant un manga pour voir le résumé et le reposer comme s'il lui brulait les mains quand il se rend compte qu'il s'agit d'un Boy's love. Il est en territoire inconnu le pauvre mais je suis content malgré tout qu'il découvre mon univers.

*

En arrivant dans ses locaux, Thomas réunit ses collègues et l'assistante pour annoncer que le contrat avec l'agence d'Alexandre ne se poursuivra pas. Il ne communique aucune raison mais le connaissant, tout le monde se doute qu'elle ne peut être que justifiée.

Son annonce me touche énormément mais je me sens horriblement coupable de la perte financière qu'il doit subir. Je me sens responsable de cette décision qu'il a prise alors que rien ne l'oblige à agir ainsi. Je réalise combien je lui suis redevable de ce qu'il a fait et de ce qu'il fait aujourd'hui pour moi. Une fois seul, je lui demande s'il est bien sûr de son choix mais il me fait clairement comprendre qu'il n'a pas pour habitude de prendre des décisions à la légère et que le sujet est clos.

Je suis amoureux de lui cela ne fait plus aucun doute et plus j'apprends à le connaître, plus je découvre quel homme formidable il est. Sous ses aspects froid et distant, se cache un homme généreux, droit, honnête et finalement bien plus espiègle qu'on ne le pense. Merde, qu'est-ce que c'est con qu'il soit hétéro...

*

Après les nuits chaotiques de ces dix derniers jours, je passe pratiquement mon week-end à dormir. Quand je ne dors pas, je réponds aux SMS de mes amis s'assurant que je vais bien.

Deux semaines s'écoulent avec un rythme à nouveau normal et surtout sans nouvelles d'Alexandre. Nous en concluons qu'il s'est résigné à abandonner toute vendetta et à me laisser tranquille dorénavant. Je décide donc également de ne rien faire contre lui. Je n'en ai pas l'énergie de toute façon et puis je n'ai pas l'étoffe du héros qui sort le méchant de l'équation non plus.

La vie reprend tout simplement son cours : le boulot, la maison, les amis... et Thomas qui me considère comme son ami à présent, un ami homo et marrant mais un ami. Thomas dont je me languis.

*

Il n'y a plus de raison pour que Thomas me raccompagne chez moi. Il a insisté pour le faire jusqu'ici mais maintenant je ne vois pas pourquoi il continuerait, je ne risque plus rien. Et puis, honnêtement, au début j'appréciais son attention mais elle me fait plus de mal qu'autre chose au final.

Refouler mes sentiments pour lui me parait impossible pourtant je ne dois pas les laisser me dévorer non plus. Le temps y parviendra peut-être même si j'en doute pour le moment.

Ce soir, je rentre donc seul, décide de faire un détour par le chinois et de rentrer à pied pour me changer les idées. Les rues sont encore animées et la marche me fait du bien.

Je suis presque arrivé chez moi quand un jeune homme à l'allure d'étudiant m'aborde pour me demander son chemin. Il doit avoir quatre ou cinq ans de moins que moi, il n'est pas vraiment beau mais il a un charme assez séduisant. Il cherche une rue qui est près de la mienne, du coup je lui propose de me suivre pour lui indiquer où elle se trouve. Nous approchons de l'intersection qui l'intéresse quand deux hommes surgissent d'une ruelle juste devant nous. L'homme que j'accompagnais me pousse alors vers eux et ils m'entraînent dans la ruelle d'où ils sont sortis. C'est une impasse sombre que je ne connais pas, elle donne sur l'arrière d'un immeuble et elle est déserte. L'un d'eux m'injurie sans préambule :

- Alors sale pédé, tu voulais ramener mon pote chez toi et te le farcir c'est ça ?

- Vous, les pédés, vous êtes qu'une sous merde, vous devriez tous crever. Renchéri l'autre.

- Non s'il vous plait ne faites pas cela. Je réponds le plus calmement possible mais la panique m'envahit déjà.

- Ben alors, elle a peur la chochotte ? Ricane le premier.

Ils m'encerclent je ne vois aucun moyen de m'enfuir. Ils me bousculent, me poussent de la main ou du pied. Je trébuche et atterris dans les bras de l'un de mes agresseurs. C'est le déclencheur qu'ils attendaient.

Je reçois un premier coup de poing en plein visage, un autre à l'estomac qui me coupe le souffle, un nouveau au visage : je sens quelque chose céder et une explosion électrique douloureuse inonde celui-ci. Coups de poing, coups de pieds, cuisses, ventre, dos, visage, partout, la douleur s'immisce partout. Je ne parviens plus à parer un minima les assauts.

Ils rient de ma souffrance, me traitent de tous les noms. Je ne bouge plus, j'attends juste que cela s'arrête mais s'ils continuent, ils vont finir par me tuer. Je suis sur le point de m'évanouir. Les coups cessent, ils ont dû juger que j'avais eu mon compte.

Tout n'est plus que brouillard, bourdonnements et douleur. Je crois entendre l'un deux demander :

- Et il a fait quoi pour qu'on le mette dans cet état ?

- Il a fait quelque chose au mauvais gars, faut croire. Allez, on s'tire. D'ici que quelqu'un le trouve, il sera mort avec un peu de chance.

La douleur est atroce, je sens un liquide chaud couler sur mes lèvres : du sang. Ma dernière pensée est pour Thomas, j'aurais dû lui dire que je l'aime. Ma vision s'obscurcie. Je sombre dans les ténèbres.

***

La sonnerie de mon portable me sort de mon sommeil. Bon sang mais il est quelle heure ? Il affiche 4h28. Un nom apparaît, Chris, cinq appels en absence.

Je me redresse et je décroche, la voix voilée :

- Chris, tu sais quelle heure il est ? T'as intérêt à avoir une bonne raison de me réveiller. J'espère que ce n'est pas encore une de vos stupides blagues.

- Thomas, Thomas, mon Dieu, Thomas... C'est Gaby, c'est Gaby... Il est à l'hôpital, aux urgences... Il est salement amoché. M'annonce-t-il la voix étranglée par les sanglots.

Je suis parfaitement réveillé à présent. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. Gaby, urgences, amoché : l'information explose dans mon cerveau.

- J'arrive. Je réponds me précipitant hors du lit.

Merde, Gaby, petit con, dans quoi tu t'es encore fourré...

Le ChallengeWhere stories live. Discover now