Chapitre 18 - Invitation inattendue

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Je suis noyé sous les dossiers. Comme prévu, la charge de travail est énorme et je ne compte plus le temps que je passe au boulot. La situation me convient très bien car je n'ai pas le loisir de penser à quoi que ce soit d'autre.

Depuis notre conversation, Thomas et moi avons retrouvé une relation cordiale mais elle s'arrête dorénavant au cadre professionnel, c'est mieux ainsi, oui c'est sûrement mieux. Dans ses bureaux, l'ambiance est redevenue sérieuse. Une chose m'attriste cependant, il ne sourit plus mais si je suis honnête, je crois que je ne souris plus beaucoup non plus.

Concernant Alexandre, le dossier est en cours d'instruction et en attente d'une date de procès. Les journalistes nous laissent en paix à présent, en quête d'un nouveau scandale à révéler ou d'une information pouvant faire trembler la ménagère se croyant à l'abri des turpitudes du monde dans son salon douillet.

Les jours défilent ainsi, se ressemblant tous. Je ne suis pas sorti depuis un bon bout de temps avec ma mini tribu, le cœur n'y est pas vraiment.

Chris parvient, cependant, à me convaincre de sortir ce soir après un harcèlement acharné. J'ai fini par céder, il était en train de saturer mon portable de messages.

Je rejoins mes amis à l'endroit habituel et suis accueilli par des cris de joies. J'ai droit à une attaque en règle de câlins et de tapes dans le dos. Ils m'adressent une ola endiablée lorsqu'ils m'arrachent mon premier sourire. Finalement, Chris a eu raison d'insister car leur enthousiasme fini par me dérider et je me laisse gagner par leur joie de vivre. J'ai vraiment de la chance d'avoir de tels amis.

Quelqu'un me tapote l'épaule et je reconnais Éric lorsque je me retourne :

- Salut Gaby !

- Oh, Éric, salut !

Je réalise en le voyant que la dernière fois je l'avais planté au bar à cause de Thomas :

- Au fait, je suis désolé pour l'autre soir, je suis parti sans revenir te saluer, ce n'était pas très cool de ma part.

- C'était un peu bizarre oui mais le principale c'est que tu ailles bien vu les circonstances.

- Oui, j'aime bien me faire remarquer en général mais je crois que j'y suis allé un peu fort cette fois. Dis-je en grimaçant.

Il rigole de ma blague et me propose un verre que j'accepte volontiers. Il prévient ses amis qui sont sur le point de partir de ne pas l'attendre et s'installe avec nous.

Il se mêle parfaitement à mes amis et trouve vite ses marques avec eux. Je me surprends à rire aux éclats, je n'avais pas ri comme ça depuis des jours. Éric se penche vers moi un peu gêné :

- Je peux te poser une question indiscrète ?

- Oui. Dis-je curieux.

- Le type de l'autre soir, est-ce que tu sors avec lui ?

Alors là, j'avoue que celle-là, je ne l'ai pas vu venir ! J'hésite à répondre mais finalement il n'y a qu'une seule réponse à donner à cette question :

- Non, c'est un collègue de travail et un ami, c'est tout. Pourquoi cette question ?

- Il m'a donné l'impression d'être jaloux, c'est pour ça.

J'éclate de rire à cette pensée, Thomas, jaloux, cette idée me fait beaucoup rire. Je lui réponds :

- Ça risque pas, il est hétéro !

- Ben moi aussi mais ça ne m'empêche pas d'avoir envie de te revoir... En quittant la boite, je me suis rendu compte que je pensais souvent à toi, et pas seulement parce que j'aimais bien travailler avec toi. J'avais toujours ton numéro de téléphone mais je n'ai jamais osé t'appeler ou t'envoyer un message. Alors, quand on s'est revu, j'étais vraiment content mais pas juste de revoir un ancien collègue, tu vois... En fait, si ça te dit, j'aimerais bien qu'on sorte un soir tous les deux.

Je le regarde bouche bée complètement pris au dépourvu. Voyant ma stupeur, il ajoute :

- Je sais que ça parait soudain et saugrenu mais je n'ai pas envie de regretter d'avoir manqué l'occasion même si c'est un peu nouveau pour moi. Je ne suis jamais sorti avec un homme mais toi, je ne sais pas, c'est différent ... donc voilà ... Si tu me dis non, je comprendrais, mais si tu n'as personne dans ta vie actuellement, ça me ferait plaisir que tu y penses...

- Heuuu, tu peux m'accorder une minute s'il te plait. Je heuu, je vais faire un tour aux toilettes, je reviens.

- Oh oui bien sûr !

Je quitte la table, suivi de Chris intrigué par la tête que je fais. A peine arrivés aux toilettes, il m'interroge de suite :

- Tu peux m'expliquer ce qui se passe là, parce qu'il se passe bien truc hein ?

- Ben je crois qu'on vient de m'inviter à sortir ...

- Sérieux ?

- Oui.

- Éric ?

- Oui.

- Mais il est...

- Hétéro, oui ...

- Ben ça alors... et t'as répondu quoi ?

- Rien, je suis venu ici.

- Et tu vas répondre quoi alors ?

- J'en sais fichtrement rien du tout !

Après un temps de réflexion, il reprend :

- Ben après tout pourquoi pas. Ce n'est pas comme si tu ne le connaissais pas. Tu passes une soirée avec lui et tu vois ce que ça donne. Il est sympa, assez mignon et cadeau bonus ce n'est pas un psychopathe !

- Ah, ah, ah très drôle...

Je soupire avant de rebondir :

- Je ne sais pas, c'est si ... soudain et puis il y a Thomas...

- Quoi Thomas ? Il s'est encanaillé un soir mais ça n'ira pas plus loin avec lui, tu le sais très bien, il est trop ... je ne sais pas cartésien, têtu, hétéro... Et puis quoi, merde, tu sais depuis combien de temps tu n'es pas sorti avec un mec ? ça fait des lustres Gaby ! Là, de l'autre côté du mur, il y a un gars bien qui te fait comprendre qu'il est intéressé, c'est génial !

Devant mon indécision, il renchérit :

- Bordel, on ne te demande pas de l'épouser la semaine prochaine mais juste de sortir un soir avec lui !

- Rhaaa, pourquoi maintenant ? Sans déconner, ma vie est bien assez compliquée comme ça en ce moment !

- C'est peut-être JUSTEMENT le bon moment Gaby...

- Tu ne m'aides pas, vraiment, tu ne m'aides pas... Bon je vais y réfléchir.

Je sors des toilettes tandis que Chris entame une sorte de danse de la joie complètement ridicule : parfois je le déteste...

Lorsque que nous regagnons la table, je m'excuse auprès d'Éric pour être parti si brusquement. Je lui demande de me laisser un peu de temps avant de lui répondre. Il accepte ravi : après tout, je n'ai pas dit non et lui trouve cela très encourageant. Pendant une seconde, en voyant sa mine réjouie, je me dis qu'il est adorable. Merde, fait chier...

***

Le travail m'accapare comme jamais, mais...

Avant, m'immerger corps et âmes dans le boulot ne me dérangeait pas mais cette fois, je n'y trouve pas la même satisfaction.

Avant, j'appréciais les ambiances sérieuses et ordonnées, sans aucune surprise mais c'est devenu ennuyeux.

Avant, je savourais ma solitude, sans contrainte, sans investissement personnel, sans compte à rendre mais cela me parait fade à présent.

Avant, je n'avais pas de tracas, je n'avais pas à m'occuper de qui que ce soit, je ne m'inquiétais pour personne...

Il a suffi qu'un gringalet débarque et maintenant c'est la pagaille partout où je pose les yeux.

C'est fou comme je m'ennuie maintenant sans lui... 

Le ChallengeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant