(8) - Widerstand

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Janvier 1943

Tapotant nerveusement les doigts contre l'étui de son arme, il attendait patiemment l'heure de son rendez vous.
Si il avait bien hâte de rencontrer enfin ces gens et de passer à une résistance plus concrète de sa part, il n'arrivait tout de même pas à se sortir toutes ces petites hésitations dans sa tête, apparaissant sous forme de questions, qui n'arrivaient qu'à l'effrayer.
Et si c'était un piège ?
Et si elle ne venait pas ?
Quand il serait enfin là bas, qu'-ce qui l'assurait qu'il ne se ferait ni fusiller, ni attaché ou même torturé ?
Pourquoi torturé de toute façon ? Il leur donnait leur informations bien volontier, c'est pas comme si ça lui arrachait le cul de vendre des infos, il faisait ça bien charitablement.
Il s'en foutait bien, c'était presque un honneur d'aider ces gens. 

L'hiver était décidément bien frais cette année. Pas glacial, il s'y accomodait sans trop de gêne, même si les gens du village, ensevelis sous  leurs épaisses fourrures remontées jusqu'au cou, parvenait à lui donner une idée de la tête des types sur le front est, là où l'hiver était infiniment plus dur.
Ici la neige était fine, les trafics n'en étaient pas perturbés, et sur la cime des arbres, elle couchait sur les feuilles une fine dentelle blanchâtre et reluisante,que Livaï se plaisait à regarder.
Les gens d'ici n'auraient sûrement pas aimé l'hiver chez lui, là où il était glacial et meurtrier, où les branches se brisaient sous le poids d'un monstrueux amas de neige, écroulant les toitures des maisons, et faisant ensevelir les gens sous un torrent frigorifique. Là, ils auraient peut être  eu raison d'être aussi couvert, ils ressentiraient le véritable froid.

Aujourd'hui, il avait juste eu besoin de sortir ses gants fins, - il n'en avait pas acheté de neuf qui soit plus chaud - et il ne s'en plaignait pas.
Cela suffisait amplement.

Il n'avait pas dit un mot de son accord avec l'alsacienne, pas même à son amante. Et il doutait sérieusement qu'Hansi ait dit un seul mot de son trafic à son amie.
Si jamais il leur arrivait quelque chose, il vallait mieux pour elle qu'elle n'en sache vraiment rien.
Il ne lui avait jamais avouer non plus avoir entendu sa conversation avec son père.
C'était pour son bien, et de toute façon, il n'en voyait pas l'utilité.

Il n'arrivait pas à dire avec exactitude ce qu'il ressentait, et de toute façon, il avait toujours été très maladroit pour exprimer ses sentiments lorsqu'il cherchait à le faire. Rien qu'à voir la manière dont il s'était comporté, le soir où il lui avait offert cette ancolie, on pouvait comprendre avec aisance qu'il n'était pas très habile avec le maniement des mots et la subtilité poétique.
Pas qu'il n'aimait pas la poésie, mais lui n'arrivait définitivement pas à en faire. Il n'avait rien d'un poète, ni même d'un piètre écrivain, mais ça ne lui empêchait pas d'apprécier ces arts.
C'était d'ailleurs la raison pour laquelle, il ne s'encombrait jamais d'une amante sur le long terme, en temps normal. Il n'arrivait jamais à savoir comment il devait s'y prendre, et il ne comptait même plus le nombre de fois où Farlan l'avait disputé pour ça, quand il lâchait une fille qui lui semblait acceptable et de bonne famille. Mais il était mal placé pour lui faire la morale ce blondinet, lui n'avait jamais touché une femme.
Kenny s'était toujours contenté de rire de ses aventures, en lui tapotant l'épaule de bon cœur. Au fond, lui et son oncle n'étaient pas si différents l'un de l'autre, et il ne comptait même plus le nombre de fois où il l'avait surpris avec une aventure d'un soir, lorsqu'il était bambin. 
Livaï n'était jamais vraiment parvenu à se stabiliser avec quelqu'un et il demeurait persuadé qu'il n'était pas vraiment fait pour ça.
Un bon coup au lit, il l'était sûrement, mais certainement pas un bon amant, et quand bien même il avait déjà essayé, il était si maladroit et enfermé dans un mutisme sentimental, qu'on finissait toujours par le lâcher, parcequ'il n'était définitivement pas convenable comme homme.
Et puis maintenant, avec la montée en puissance de l'aryanisation, il n'était plus forcément considéré comme quelqu'un de beau ou même attirant, même si les femmes appréciaient pour la plupart l'uniforme. Et il devait avouer que ça l'aidait un peu parfois.

Livaï X Reader | L'absurdité de ce monde Where stories live. Discover now