1 ♦ Douce est la brise

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" Douce est la brise, chatouillant sa chevelure,
Douce est l'aurore, effleurant son fin visage,

Brutale est la chute, engendrant de rudes blessures,
Brutale est la nuit, révélant l'obscur mirage,

Douce est la brise, effaçant les remords,
Brutale est la nuit, réveillant un à un, les morts."





— Où que vous vous cachiez, vile guerrière, je vous trouverai et vous attraperai !

   Je criai ces quelques mots au bord de la rivière qui ruisselait à mes pieds puis repris ma course, le sourire aux lèvres. Je sautai d'une roche à une autre pour traverser le cour d'eau et atteindre l'autre rive. Enfin, plus je courais dans le champ voisin, mes cheveux bruns mêlés à quelques mèches blanches au vent, plus de fines gouttes de sueur prenaient place sur mon front, sous le soleil orangé de cette fin de journée d'été. Je slalomai entre les jonquilles et les marguerites, bondis au dessus d'un rondin de bois puis ouvris le petit portillon donnant sur une bâtisse abandonnée, partiellement en ruines.

— Montrez-vous ! Osez m'affronter, moi, la sorcière du marais !

   Un court silence plana avant qu'un petit cri fluet ne retentisse dans mon dos. Je fis mine de me retourner, surprise tandis que la petite fille face à moi brandissait un long bâton biscornu.

— Goûtez donc à la foi de mon épée, sorcière ! gronda la petite fille.

   Je fis semblant d'être terrassée par ses pouvoirs, je me couchai par terre, suppliai qu'on m'épargne puis mimai la mort, la langue pendante, les yeux fermés. La petite fille s'approcha doucement, elle appuya le bout de son bâton contre mon ventre avant que je ne rouvre les yeux, n'attrape ses bras et ne la tire avec moi sur le sol couvert de vieille paille séchée. Je la chatouillai, laissant ses éclats de rire résonner dans la bâtisse fantôme. Ravivant les souvenirs jadis joyeux qui faisaient vivre la demeure.

— Arrêtes ! Arrêtes Élya ! C'est pas juste ! Aaaah !

— La sorcière a gagné, la guerrière a été foudroyée par ses sombres pouvoirs !

— Mais non, c'est pas juste !

   Ma sœur parvint à se défaire de mon étreinte, se releva puis croisa les bras, l'air boudeuse. Je me relevai, tout en passant des mèches de cheveux derrière mes oreilles.

— Agnès, arrêtes de faire cette tête, ce n'est qu'un jeu !

— Mais c'est toujours toi qui gagne !

— Il faut revoir votre stratégie, jeune guerrière.

   Agnès esquissa un sourire qui disparut bien vite lorsqu'un bruit sourd retentit depuis les sous-sols.

— Qu'est-ce que c'était ? demanda-t-elle de sa voix fluette.

   Je lui saisis la main, mon sourire disparu, mon sérieux retrouvé. J'étais la tutrice d'Agnès, sa seule protectrice et ce bruit inquiétant n'augurait rien de bon. Mieux valait déguerpir, et vite. Nous aimions jouer les grandes aventurières, mais n'en restaient pas moins deux jeunes demoiselles, faiblement constituées, les dangers ici étaient nombreux et mieux valait les éviter.

Les Derniers Gardiens - I La Confrérie du RubisWhere stories live. Discover now