His new beginning [Terminée]

13. Quand Homer Simpson retrouve Cendrillon

Feel like I wanna cry, it's okay
If I forget to smile, it's okay
And if I need some time for piece of mind, it's okay

Kiana Ledé - One of Them Days

SOLAL

— Reste bien sage, d'accord ? Je reviens plus tard.

J'embrasse la tête d'Alfredo et regarde l'heure. Vingt-trois heures trente-cinq. Ce soir, je sors boire un verre, même si ce n'était pas prévu. Je devais me coucher et tourner en rond dans mon lit pendant des heures, en attendant que Morphée daigne m'ouvrir ses bras.

Mais Ryan a contrecarré mes plans. Il a remarqué combien j'étais fatigué, ce matin. Entre mes bâillements et mon manque de concentration, il a fini par mettre le doigt sur ce qui n'allait pas. Je lui ai confié que je peinais à m'endormir, depuis un moment, ce à quoi il a trouvé une explication. D'après lui, je me concentre trop sur mon incapacité à trouver le sommeil. Par conséquent, je m'ajoute du stress inutile qui m'empêche de dormir. Un cercle sans fin, donc. Il m'a conseillé de sortir me détendre et de ne surtout pas m'angoisser à l'idée de tourner en rond dans mon lit.

J'espère que sa solution fonctionnera. Je suis censé voir Sofía pendant ma pause, demain midi. Je ne veux pas que ses amis traduisent mes bâillements comme la manifestation d'un certain ennui ou mépris, alors que la réalité est tout autre.

Je choisis un sweat au hasard, enfile ma doudoune et quitte mon appartement. Bien que les bourrasques se soient calmées, je me presse pour rejoindre le bar sur la rue d'en face. Il n'y a que six clients dans le bar : un homme semble noyé dans un océan de désespoir, deux femmes fixent l'écran suspendu d'un œil malavisé, un couple se dévore des yeux, et une femme discute avec le barman.

Une petite minute.

Ses cheveux roux et frisés la trahissent tout de suite.

Ça pour une surprise...

— Jaleesa ?

Son regard tombe sur moi et elle entrouvre les lèvres.

— C'est pas vrai... Je dois être en train de rêver, souffle-t-elle avant de reporter son attention sur le barman. Dîtes, vous voyez un homme à ma droite ?

— Oui.

— Est-ce qu'il est grand, tête à claques, avec une buzz cut ?

— Tu sais que je suis à côté et que j'entends tout ce que tu dis ? dis-je avec un sourire.

— Vous ne trouvez pas qu'il sourit trop, aussi ? poursuit-elle en me désignant avec son pouce. Je veux dire... Oui, il a un très beau sourire, mais est-ce qu'il est obligé de l'afficher non-stop ? C'est agaçant, parfois. On n'est pas dans une pub Colgate.

Les gens trop souriants l'agacent ? Décidément, cette fille a été montée à l'envers.

— Et moi, je suis toujours là, mais tout le monde a l'air de s'en foutre, ironisé-je.

— Merde, c'est vrai qu'il peut nous entendre.

Jaleesa se penche et chuchote – enfin, si on peut appeler ça chuchoter – au barman :

— Même quand on l'insulte, il sourit. Démonstration.

Elle se tourne vers moi, prend une grande inspiration.

— Hé, crétin. Regarde-moi vite fait.

Petit point positif et non négligeable : le surnom Jamal est définitivement sorti de son vocabulaire. C'est l'équivalent d'une victoire pour moi. Évidemment, mon sourire s'agrandit à cette pensée.