Chapitre IV

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Les pas saccadés de Charlie résonnaient dans la rue, elle n'était plus qu'à quelques mètres de son appartement. Son visage était trempé, souillé par les larmes et la pluie. Les nuages avaient commencé à s'amonceler quelques minutes après que la jeune femme ait décidé de rentrer à pied pour se changer les idées, et la voilà maintenant qui baissait la tête sous les trombes d'eau. Pourquoi le monde tenait-il tant à s'acharner sur elle ? Et au milieu du vacarme, la fille trempée ressassait les paroles qu'elle avait jetées à la figure de son amie. Avait-elle eu raison de dire tout ça ? Venait-elle de se mettre à dos une des rares personnes qu'elle appréciait ? Ce qu'elle pouvait se détester, parfois...

Quand enfin elle aperçut la porte de garage de son immeuble, Charlie pressa encore le pas et termina son chemin en courant. Sa clé percuta la serrure, la porte du rez-de-chaussée s'ouvrit et très vite, elle se retrouva dans son appartement. Les gouttes percutaient ses fenêtres et le bruit du vent emplissait l'habitacle, mais la chaleur environnante faisait au moins du bien. La jeune femme laissa tomber son sac à main au sol et envoya valser son trousseau de clés sur la commode. Quelle journée éprouvante... Charlie était trempée, frigorifiée, mais elle préféra commencer à préparer à manger, au lieu de se réchauffer sous une bonne douche. La lumière éveilla l'appartement, et la blonde aux joues encore rouges s'empressa d'ouvrir le frigo pour y piocher quelques restes. Des pâtes d'avant-hier et un bout de poulet solitaire ; ça ferait l'affaire.

Par la même occasion, elle mit la télévision en route et le son des voix la rassura. Elle ne supportait pas de se sentir seule, elle avait besoin d'agitation autour d'elle. Feuilleton télé ou documentaire sur les ours, peu lui importait, du moment que quelque chose tourne. Une fois son plat réchauffé, elle s'assit à table et alluma son ordinateur portable. Deux notifications venant du site qu'elle avait créé étaient affichées sur l'écran, et elle s'empressa de les ouvrir.

-Gaya-626 : Je connais également quelqu'un qui avait disparu il y a quelques années, du côté d'une amie... Il a été retrouvé quelques semaines plus tard ! Je te donne tout mon soutien, et j'espère que tu retrouveras également la personne que tu aimes. Sois forte !

-MarieFloredu62 : Peut-être pourrais-tu essayer de trouver des indices pouvant expliquer cette disparition de chez toi ? Il y a sûrement quelque chose qu'il aurait pu oublier par inadvertance ou qu'il aurait pu laisser pour te prévenir... 

Charlie parcourut les messages d'un œil désintéressé, puis se stoppa à la dernière phrase. « Il y a sûrement quelque chose qu'il aurait pu oublier... ou qu'il aurait pu laisser... ». Elle avait déjà retourné l'appartement les premiers jours après la disparition d'Ezra, mais peut-être avait elle oublié quelque chose ? Sans attendre d'avoir terminé son repas, la blonde se leva de table et se dirigea rapidement vers la chambre. Dans le dressing, toutes ses affaires étaient encore là, elle en était sûre. Tous les cintres étaient occupés, chaque paire de chaussures était à son emplacement. Ezra était parti avec les mêmes habits qu'il avait mis le matin-même pour partir au travail. Sur la table de chevet, ses papiers étaient encore ici, exceptée sa carte d'identité qu'il emmenait toujours avec lui. Mais son permis de conduire et sa carte vitale étaient toujours à côté du cadre qui renfermait les deux jeunes gens, auparavant si radieux.

Rien ne manquait à part le sac qu'il emmenait avec lui au boulot, rien ne pouvait expliquer un départ quelconque. Encore désorientée, Charlie se laissa tomber sur son lit et ferma les yeux un moment. Elle ne comprenait pas. Elle ne comprenait toujours pas pourquoi Ezra avait disparu sans aucune nouvelle, pourquoi il avait décidé de la laisser se débattre seule dans l'incompréhension. A ce moment précis, la jeune femme était horriblement en colère contre la personne qu'elle affectionnait plus que tout. Pourquoi n'arrêtait-elle pas de brasser de l'air depuis deux mois sans aucune réponse ? En tournant la tête, Charlie observa à nouveau le cadre qui trônait encore fièrement sur la table d'Ezra.

Pourtant je t'attends toujoursWhere stories live. Discover now