Douxieme Brouillon

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Nous étions en route pour aller voir mon grand-oncle, Lino. Nonno* conduisait, les traits du visages tirés et Nonna* feuilletait son magasine silencieusement. Seule à l'arrière, je regardais les paysage défiler sous mes yeux encore fatigués. Je remerciais le ciel d'avoir pu faire ce voyage et comprenais pourquoi mon père me parlait tant de l'Italie. Seulement, je ne pouvais m'empêcher de penser à tout ce que je laissais derrière moi, les tensions avec ma mère, mes frères et mon père. Je suis sûre que David aurait adoré passer du temps ici. Un léger sourire au ton mélancolique étira faiblement mes lèvres alors que le soleil me brûlait les yeux. Simon avait passé la majeur partie de ses étés en Italie. L'envie d'assaillir mes grands parents de questions à son sujet me brûlait les lèvres mais je savais pertinemment qu'eux non plus ne voulais plus entendre parler de lui. Pourtant, nombreuses étaient les photos de lui qui trônaient sur les meubles, pendaient aux murs où ornaient les centaines d'albums que Nonna gardait précieusement. Au fond, ils devaient simplement avoir beaucoup de mal à tourner la page. Je soufflai alors en m'enfonçant un peu plus dans la banquette un peu usée de la voiture et croisai le regard de Nonno dans le rétroviseur.

-Alors Bella, pas trop fatiguée ?
-Même si je te disais oui, tu ne pourrais rien y faire. Souris je

Je crus remarquer quelques rides aux coins de ses yeux trahissant un sourire narquois et il donna quelques coups secs sur le volant pour nous secouer, faisant au passage klaxonner la voiture qui nous suivait et s'attira le courroux de ma grand-mère. Je ne pus m'empêcher de sourire. De là, le trajet se termina dans un silence de mort. Mon grand père gara la voiture dans une immense allée et ma grand mère sortit en trombe de la voiture pour se jeter dans les bras d'un homme quelques années plus jeune qu'elle tandis que Nonno resta assis côté conducteur, les mains crispées sur le volant et le regard fixe. Je m'avançai timidement vers lui en posant une main sur son épaule mais il ne bougea pas d'un iota jusqu'à ce que Nonna lui accorde un de ses fameux regards qui finit par avoir raison de lui. Il sortit de la voiture comme un ours, claqua férocement la portière et traîna des pieds jusqu'à cet homme qui ne semblait pas plus enchanté de le voir. Je pris alors mon courage à deux mains et sortis à mon tour pour dire bonjour.

-Aaaaaah, s'extasia l'inconnu, la petite de Marco ! Comme tu ressembles à ton papa !!
-euh... bonjour... lançais-je d'un voix pincée.
-Sybille je te présente Lino, tu prozio*. Reprit ma grand mère
-Et Simon ? Il ne vient plus ?
-Chi e'Simon* ?! No conosco nessun* Simon ! S'emporta mon grand père
-C'est une longue histoire, repris-je gênée.
-C'est dommage, je l'aime bien ce petit. Si tu le vois, dit lui que zio* Lino l'attend pour les vendanges ! Rit il a gorge déployée. Allez vient Bambina, je vais te faire visiter et après on ira voir les vignobles.

Il avait l'air d'être un drôle de numéro et ne semblait pas gêner de mettre les pieds dans le plat au risque de jeter un froid. Au moins je savais à quoi m'attendre. Nonna nous accompagna pour faire le tour du propriétaire alors que Nonno était partit faire un tour dans les vignobles. La demeure était gigantesque et la chaleur aurait pu me faire fondre sur place, je n'en pouvais plus. Mais j'étais impressionnée par tant de beauté et surtout par le calme de l'endroit. Je comprenais pourquoi Simon suppliait nos parents pour partir en Italie tout l'été.

-Dit Bambina, tu sais faire du cheval ?
-Je ne suis pas montée depuis des années.
-Tu sais, c'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas et en plus c'est plus pratique pour faire le tour du vignoble.
-Surtout tu fais attention Cara mia.
-Sì nonna, souris-je tendrement.
-La dernière fois que Lino a emmené un de mes petits enfants en balade il est rentré le front ouvert !!
-Les chutes font les hommes ! Rétorqua le concerné.
-chi si loda, s'imbroda* !

Lino se mit à rire franchement et me fit signe de le suivre jusqu'aux écuries. Je sentais déjà l'odeur du foin et pouvais entendre résonner le son des fers frapper le sol. C'est une atmosphère que j'avais oublié. Avant de retourner vivre en Italie, mes grands-parents tenaient une petite écurie en Ecosse qu'ils ont vendu à un de leurs vieux amis. Lorsque j'allais leur rendre visite, Nonno m'emmenait faire des ballades et galoper au bord de la mer. Mon père venait de temps en temps mais l'équitation n'a jamais été son « dada ». Alors que Lino partit chercher un scelle derrière les boxes, un garçon, d'une vingtaines d'année je dirais, entra dans l'écurie et m'accorda un franc sourire auquel je répondis timidement.

-Come ti chiami* ?
-Sybille...
-Ah, tu n'es pas d'ici ! sourit-il
-C'est si flagrant ? ris-je timidement.
-Si peu !
-Ah ! Milo tu tombes bien ! intervint Lino. Un client vient d'arriver, ce n'était pas prévu. Tu veux bien emmener la Bambina en ballade ?
-Sì, avec plaisir. sourit-il
-Sinon c'est pas grave, je...
-Ne t'inquiète pas Bambina, Milo connait très bien la région. Simon et lui adoraient partir tous les deux.
-Tu connais Simon ? m'étonnais-je.
-Oui, très bien même. On se connait depuis qu'on est petits et il a vécu chez moi pendant un temps.

Lino et moi le regardâmes surpris, Milo pinça les lèvres.

-Bon je vous laisse les jeunes. Bonne ballade !

Je me tournai vers Milo qui m'accorda un énième sourire puis partit en direction du boxe où m'attendait ma jument. Peut-être qu'avec lui, je pouvais avoir les réponses aux questions que je me posais.

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Vocabulaire:

-Nonno: papi
-Nonna: mamie
-Bambina: gamine
-Come ti chiami: comment tu t'appelles ?
-Chi si loda, s'imbroda: qui se loue se nuit
-Cara mia: mon coeur
-Chi e'Simon ? No conosco nessun Simon !: Qui c'est Simon ? Je ne connais pas de Simon !
-Tu prozio: Ton grand-oncle
-Zio: oncle

Linked - Tom HollandDonde viven las historias. Descúbrelo ahora