Chapitre 9

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Le lendemain matin se déroule selon le même cérémonial. À la différence près que Blandine m'a prévue une tasse beaucoup plus grande. Addicte.

Marin ne me quitte pas des yeux et je fais comme si je ne le remarquais pas. Je n'ai toujours pas le temps pour ça. Surtout que je n'ai pas donné de nouvelles à Adrien. Pas qu'il n'en ait prises, non plus. Mais d'après Hafsa, qui est passé le voir deux fois, il panse ses plaies. Physique les plaies. Je n'imagine pas du tout lui avoir briser le cœur pour de vrai.

Je parviens à m'éclipser avant de devoir refuser une nouvelle virée en bateau. Je remercie Blandine et m'enfuis en direction de la plage.

Je marche les chaussures à la main, sur le sable mouillé. Je n'ai toujours pas dit à Blandine que je partirai plus tôt. Je ne suis plus si pressée. Je me laisserai bien m'enfoncer dans cette illusion que les merdes qui m'attendent à la maison n'existent pas. Passer mes journées à me balader et à lire. À la place, je saisis mon téléphone, vérifie le réseau et compose le numéro enregistré en favori.

Une fois rassuré sur l'état de santé de mon père, je m'attèle à garder pied dans la réalité. Et j'appelle la banque. La conversation qui suit s'apparente à une diarhée verbale, qui vous tord le bide et pue pendant des jours.

-- La meilleure solution Mle Lagrande reste la vente de l'appartement. Votre salaire ne couvre même pas les frais de l'Ehpad et l'Aide sociale récupèrera tout de toute façon.

--Je sais, mais non.

--Je peux vous proposer un prêt à la consommation en attendant pour vos petits plaisirs. Ou une réserve d'argent avec un taux de seulem...

C'est là, Mesdames et Messieurs, qu'il faut toujours raccrocher. À cet instant précis. Pas une minute après, sinon on se retrouve endetté sans avoir compris ce qui nous arrive. À 28ans, je suis largement assez endettée comme ça. Merci l'Ehpad.

Je résiste à l'appel des sirènes et obtient une autorisation de découvert pour payer la taxe foncière qui ne va pas tarder à tomber. Hafsa me dirait de mensualiser. Aurélie de laisser pourrir la situation et d'attendre la relance. Moi je pioche dans le découvert autorisé et je serre les fesses. Et réduis mes dépenses.

Je m'affale un peu plus haut sur la plage et répond enfin aux messages des copines. Les filles se sont vues, et ont échangés sur les derniers rebondissements. Les messages fusent.

Aurel--je commence à organiser un EVJF!

Hafsa-- Aurélie, arrête de t'affoler elle ne veut pas.

moi-- j'ai rien compris.

Hafsa-- Enterrement de vie de jeune fille. Suis un peu.

moi-- ha oui mais non ! on n'enterre rien du tout!

moi-- à part la dignité d'Adrien

Hafsa-- T'abuse Léo, il est pas mal Adrien.

Aurel-- Mdrrr ! C'est vrai, il est correct et il a un beau petit cul.

Hafsa--T'abuse Aurélie !

Nos échanges ne volent pas haut mais ça dédramatise. Pas que je sois du genre à dramatiser. Je me décide à envoyer un message à Adrien pour mettre fin à cette incroyable mascarade. La distance géographique me donne le courage qui m'a manqué jusque-là. Je compose mon message vaillamment, tournant ma phrase pour qu'aucune réponse ne soit nécessaire. Et j'appuie sur envoyer.

Salut, je ne sais pas quand j'aurai l'occasion de te voir pour qu'on parle, alors autant t'écrire. Je suis touchée par ta proposition mais ça ne va pas être possible. Je ne nous ai jamais envisagé de cette manière-là. Désolée du malentendu.

Plan BWhere stories live. Discover now