⚜ Chapitre 87 : Pire que la mort ⚜

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 Paris, mois d'octobre

Céleste

Quand une lavandière s'était précipitée à nous pour nous apprendre que les princes et d'Artagnan avaient étés capturés, j'avais laissé Aramis et Athos se précipiter à leur secours. Et j'étais restée à la garnison. J'étais restée à la garnison parce que les Gardes Rouges tournaient autour, attendant qu'un moindre mousquetaire ou cadet en sorte pour l'embrocher sur leurs rapières. Il y avait eu de violentes altercations. Des blessés dans nos rangs, qui pansaient leurs plaies non loin. Des morts chez les anciens Gardes, dont les cadavres jonchaient encore le sol. Ils étaient repartis une heure plus tôt.

J'étais donc assise à la table de la garnison, à faire une partie de carte avec Chiron, Rousseau, Brujon et Clairmont. Il fallait bien se changer les idées... Et cela remettait un peu de sourire sur leurs jeunes visages. Brujon avait tué un Garde, tout à l'heure, avec Rousseau. Leur ennemi avait avant de mourir touché Chiron, donc la blessure ne saignait plus. Clairmont, lui, avait été pris dans une embuscade deux heures plus tôt, en revenant de chez les lavandières qu'il était allé rassurer. Il s'en était sortit sans trop de blessures, et avait couru jusqu'à la garnison sous les injures des Gardes.

- Brujon, tu triches, fit malicieusement remarquer Constance en arrivant près de nous, me ramenant à l'instant présent.

- Moi ? fit mine de s'indigner le cadet. Mais comment osez-vous... ?

Sylvie, qui accompagnait Constance, lui prit délicatement le poignet, dévoilant les cartes qu'il avait caché dans la manche de sa veste. Brujon partit d'un grand rire alors que les trois autres le foudroyaient du regard que je levais les yeux au ciel.

- Je ne triche pas, corrigea Brujon. Je contourne les règles pour mieux pouvoir gagner.

- On va voir si tu parviendras à contourner les règles au prochain entraînement, le menaçai-je gentiment.

Cette fois, les cadets rirent tous ensemble, nous arrachant des sourires.

- On refait une partie sans tricherie ? suggéra Clairmont.

- On vire Brujon, décréta Chiron.

- Quoi ? Mais pourquoi ? Je suis parfaitement capable de jouer sans tricher ! s'insurgea le cadet.

En même temps et sans nous concerter, Chiron, Rousseau et moi toussâmes de concert dans nos poings pour montrer notre suspicion. Leurs deux regards convergèrent aussitôt vers moi, et je souris franchement devant leurs œillades complices. Je finis par déposer mes cartes devant moi, révélant les quatre as.

- Jouez sans moi, vous aurez peut-être une chance de gagner, les provoquai-je en me relevant.

Ils éclatèrent de rire en réunissant les cartes pour les mélanger. Je lissai machinalement la jupe de ma robe violette. Elle faisait tâche ici, entre la boue, les chevaux et les armes. Je levai mon nez vers le ciel. Le soleil n'allait tarder à commencer à se coucher à l'horizon. J'espérai que tout se passait bien de leur côté...

Soudain, comme une réponse à mes prières, des bruits de sabots au galop retentirent sous l'arche, et nous nous tournâmes tous d'un même mouvement vers l'entrée. Arriva en trombe le cheval de Porthos, le grand métis sur le dos... Et les deux enfants royaux dans les bras. Je soupirai de soulagement, et me précipitai vers lui. Porthos arrêta son cheval, et tendit Louis à Constance, qui le serra contre elle. Il confia ensuite Philippe à Sylvie, mais celui-ci se débattit et sauta au sol comme un chat, se précipitant sur moi. Je le cueillis dans mes bras, où il éclata en sanglot. Je me tournai ensuite vers Constance et Louis.

- Sa Majesté va-t-elle bien ? demandai-je.

Je jeune garçon aux boucles blondes hocha lentement la tête, les yeux dans les miens. Je me tournai vers mes cadets et me dirigeai vers la table.

Le retour de l'Espionne - Livre IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant