37| Lo'ak

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Je reviens à la rive.

Au loin je vois mon père près du chef et je m'entends soupirer.

Je pense que c'est le moment de faire mes adieux.

Mes pieds rencontrent pour la dernière fois le sable chaud des terres des Metkayina, et d'un pas las je m'approche des maisons, les yeux baissés vers le sol.

Je n'aurais même pas eu le temps de dire au revoir à Payakan. Peut-être que mes parents accepteraient que je m'arrête une dernière fois pour lui dire au revoir.

Mais dire au revoir à Takara, ça j'en ai la possibilité. Pourtant je ne me sens pas capable de le faire.

Mon cœur se contracte dans ma cage thoracique, m'empêchant de respirer, rien que d'y penser.

Je ferme les yeux, avançant de plus en plus lentement, le dos courbé, les mains voyageant le long de mon corps.

Puis j'entends le bruit mou des pas qui s'enfoncent de façon rapide dans le sable et je relève les yeux, au moment où des bras viennent enlacer ma nuque.

Je vacille en arrière sous le choc, tandis que le coup me coupe la respiration.

Des longs cheveux doux et ondulés, que je reconnais entre milles, viennent me fouetter le visage.

Je pose une main sur l'épaule de Takara et l'écarte un moment de moi pour la regarder, perplexe.

Elle sourit. Et ses yeux sourient également, légèrement brillant de larme.

Je lui fais comprendre par un froncement de sourcils que je ne comprends pas sa réaction.

Elle ne me répond pas, incapable de parler, alors je lève les yeux vers ma famille, ma main encore posée sur l'épaule de Takara.

— On reste ici, fils. Bienvenu dans ta nouvelle maison.

Mes yeux s'agrandissent. Je n'en crois pas mes oreilles. Mon père m'a vraiment dit ça ?

Je baisse les yeux vers la belle, qui me regardent avec ses yeux bleus océan. Un sourire se dessine sur mon visage alors que je la prends dans mes bras, serrant sa taille entre mes mains. Sa tête est collée contre la mienne, et je sens le bout de son nez chatouiller mon oreille.

Quand je la repose par terre, on se regarde un moment, puis je la prends par la main et franchis les quelques pas qui reste entre moi et mes parents.

Mais je regarde surtout mon père.

— Merci. Merci beaucoup.

Il me sourit, et sans réfléchir je me jette dans ses bras, abandonnant la main de Takara.

Je ne me suis jamais senti aussi heureux.

Jamais, de toute ma courte vie, je n'aurais pensé une fois que je me sentirais mieux dans un autre clan que le mien.

Mais maintenant le clan Metkayina est ma maison.

— Merci beaucoup.

***

La nuit est tombée.

J'ai passé la majorité de l'après-midi avec ma famille. Papa nous a prévenu que nous irions de temps en temps rendre visite au Omaticaya, et surtout à notre grand-mère, Mo'at.

Mes sœurs semblaient heureuses de pouvoir rester ici, même si je lisais la mélancolie sur le visage de Kiri. Et Neteyam, je pense qu'au fond de lui, même s'il le cache, il aurait préféré rentrer.

Lo'akWhere stories live. Discover now