Le fabuleux destin d'Anna

Chapitre 67 : Le mariage

La demeure des pommiers était dans une agitation extrême depuis l'annonce du mariage. Anna vit passer plusieurs personnes qui s'affairaient toutes à prendre les mesures de chaque partie de son corps afin de confectionner sa robe de mariée en un temps record. En règle générale, les couturiers mettaient plusieurs mois à réaliser une robe de grande famille. Le choix des étoffes de grande qualité, le jupon à cerceaux, la traine élégante et le voile, chaque pièce avait une importance cruciale, la robe entière devait séduire pour toujours. Le mariage était une institution sérieuse pour les aristocrates, il était à l'image de la fortune, du prestige et de la noblesse de la famille.

Cependant, monsieur Vermeil n'aimait pas se montrer, il n'avait jamais apprécié les grandes cérémonies pour afficher son rang et sa richesse.

- Nous sommes au moins d'accord sur ce point, dit-il tout bas en parlant de Georges tandis qu'un bijoutier portait au cou d'Anna une parure en topaze bleue devant le regard émerveillé des autres membres de sa famille.

- Que marmonnez-vous ? demanda Romance qui releva les cheveux de sa fille avec précaution pour apprécier le port de sa nuque avec le bijou.

- Le mariage se fera dans une petite église. Nous nous sommes entendus pour ne pas inviter beaucoup de monde. À quoi bon de toute façon ? Notre fille n'épouse pas un homme social. Il ne doit pas compter beaucoup d'amis dans son entourage et il n'aime pas les grandes cérémonies. S'il s'est persuadé d'épouser une femme riche pour assurer sa prospérité en dépit de sa mauvaise éducation en société qui pourrait lui attirer la honte, c'est qu'il s'imagine être toujours mieux seul, une fois le mariage passé.

Depuis leur dernière discussion animée, Anna n'avait pas réussi à se réconcilier avec son père. Dès qu'elle avait su qu'il avait organisé son mariage, elle n'avait pas eu le courage de s'excuser et aucun des deux n'était revenu sur le sujet. Elle était réduite à le voir passer loin d'elle, car il l'évitait, mais elle savait qu'il n'était pas insensible à son prochain départ.

Elle s'en voulait toujours de l'avoir rejeté et de l'avoir mal compris. Dès qu'il lui adressait des mots durs comme un être qui était trop chargé d'injustices et de désillusions, elle se rendait coupable et son cœur se déchirait.

- Ne l'écoutez pas, dit Romance très vite auprès d'Anna en mettant ses mains douces sur ses joues. Il faut épouser l'homme que l'on aime. Quoi que l'on dise sur ces histoires de fortune et de rang, ce qui compte c'est l'amour. Vous êtes humaine, généreuse et vous avez beaucoup d'esprit. Georges connait déjà toutes vos qualités et le fond de votre cœur. Lorsqu'il découvrira votre visage à l'église, il ne sera plus un homme raisonnable - elle eut un bon sourire - vous serez très heureux ensemble.

- Je ne suis pas parfaitement tranquille, rétorqua son père. Cet homme est très attaché à la bonne conduite sociale, il est sombre et rigide, alors que notre Anna est... - il mit du temps à poursuivre comme s'il ne voulait pas exprimer le fond de sa pensée à voix haute - Anna est une nature franche et naturelle, elle vit avec la simplicité d'un enfant. Que fera-t-il d'une épouse qu'il ne voudra pas montrer en haute société ?

Romance se tourna brusquement vers lui. Elle avait perdu patience et le ton de sa voix monta d'un cran.

- Taisez-vous ! Vous ne cherchez qu'à semer la confusion dans le cœur de notre fille ! Georges ne laissera personne se moquer d'Anna !

- Je suis d'accord avec papa, je ne suis pas convaincu que Georges devienne un bon mari, exprima Louise, mais notre sœur a du caractère et elle sait chanter, lire et bien s'exprimer. Elle ne se sentira jamais ridicule, n'est-ce pas ?

Anna lui sourit en retour en acquiesçant de la tête. Elle aima ses précieuses paroles réconfortantes. Ses derniers temps, elle avait fait beaucoup d'efforts pour s'adapter aux coutumes de l'aristocratie, elle espérait devenir une épouse pleine de respect et de retenue qui n'attire pas la honte sur Georges.