Chapitre 68 : Molly

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Tout ce que l'on pouvait imaginer de merveilleux autour d'un mariage ne s'était pas produit. La journée avait été longue et pesante. Le fort ressentiment de Georges envers Anna était comme une maladie qui durait.

Anna avait voulu saisir une chance de se réconcilier par le langage de la douceur en approchant sa main de la sienne lorsqu'ils étaient dans leur voiture de mariée, mais l'incitation fut déraisonnable, il l'avait brusquement repoussée.

Dans son for intérieur, elle se jura de ne jamais s'effrayer des mauvais traitements qu'il lui réserverait. Elle devait survivre auprès de lui jusqu'au jour où ils auraient une discussion claire.

Mais les premières pierres de leur union tombèrent très rapidement.

Elle n'aurait jamais prévu qu'il se défasse rapidement de son costume à peine arrivé à Montchâteau et qu'il parte s'isoler dans son bureau. Lorsqu'elle se retrouva seule encore dans sa robe de mariée, elle se sentit moins forte qu'elle ne l'avait imaginée. Les larmes lui montèrent aux yeux, mais elle refusa d'y céder. Il ne fallait pas rendre l'avenir plus sombre qu'il ne l'était.

« Je ne sais pas quand, mais nous finirons par nous retrouver. », espéra-t-elle intérieurement.

On la guida jusqu'à sa chambre. Elle ne fut pas étonnée de savoir que Georges ne voulait pas partager le même lit qu'elle. Il semblait déterminer à ce qu'elle reste la plus loin possible de lui. Pour Anna, ce qui comptait, c'était de comprendre où se situait son degré de sincérité. Il était un homme trop réfléchi pour se laisser longtemps emporter par la colère, mais il était aussi un homme trop meurtri pour lui pardonner facilement. Elle devait surveiller son comportement maintenant qu'elle était madame de Monseuil et se montrer prudente si elle voulait se réconcilier.

Les jours qui suivirent, elle ne le vit pas. Il prenait ses repas seul et tout fut organisé pour qu'elle mange à une heure après la sienne. Assise seule à table, Anna avait le temps d'examiner sa conscience : elle n'avait plus ses amis de la rue et de la grande Demeure auprès d'elle, elle avait quitté sa famille sans dire à son père combien elle regrettait son comportement de jeune effrontée. Son mariage ne pouvait être défini comme une union heureuse. Elle avait perdu Georges.

Elle prit une serviette de table et souffla longuement à l'intérieur pour ne pas éclater en sanglots.

« Toi et tes manies de souffler fort comme un taureau ! » résonna la voix de Paulette en elle même.

Anna se mit à rire en échappant quelques larmes.

- Madame, avez-vous fini ? demanda un valet en approchant la longue table où elle était assise au milieu du salon vide.

- Oui, je vous remercie. Le repas était très bon, dit-elle.

- Très bien madame, répondit-il d'une voix solennelle.

Montchâteau... Rien n'avait d'âme ici. Anna ferma les yeux et écouta le silence. Peu lui importait à présent si elle pleurait. Après tout, elle ne pouvait s'en prendre qu'à elle même de s'être attachée à ce mariage. Son cœur douloureux avait tort de se faire entendre.

« Non, je ne dois pas baisser les bras. Je dois aller chercher l'espoir qu'il me reste. Je vais aller voir Georges et lui dire la vérité. »

Ses propres paroles lui redonnèrent de la force. Au milieu de l'après-midi, elle attendit derrière la porte du bureau de Georges.

- Je regrette, Monsieur ne souhaite pas vous voir, prononça d'une voix monotone, le valet qui venait d'en sortir. - son visage s'inclina légèrement vers le bas - peut-être pourriez vous revenir demain.

Le fabuleux destin d'AnnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant