Chapitre dix-huit : Les tests

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  Ça fait deux – non – trois heures que j'attends qu'on m'appelle. Trois heures que tout mon corps ne cesse d'être parcouru de frissons et de spasmes étranges qui témoignent de mon niveau de stress. Mon cœur bat si vite qu'il pourrait exploser. Je peine à respirer normalement. Je joue avec mes doigts. Mon esprit est pollué par un tas d'idées noires. Tout autour de moi n'existe plus. Ou peut-être que c'est moi qui ne suis plus vraiment là.

  Ma jambe tremble. Personne n'est là pour l'arrêter. Ben et moi nous sommes quittés il y a trois heures. Malgré tout ce qu'il m'a dit, je ne peux m'empêcher de penser au pire.

  Aujourd'hui, mon futur sera défini.

  Depuis la journée à Kéntro, je me suis méfiée de tout le monde. J'ai passé mes journées à m'entraîner. Si je n'étais pas au Centre Próta, c'est que j'assistais aux Veillées, que je mangeais ou que j'avais l'obligation de me trouver dans ma chambre.

  Je n'ai plus jamais été dérangée par des mauvais rêves. Non. En réalité, je ne leur ai pas donné la possibilité de revenir. En un mois, je dois avoir dormi à peine une ou deux heures par nuit. Ce n'est pas que je ne voulais pas dormir. C'est tout simplement que je n'y parvenais pas.

  Lors de mes entraînements, je surprenais souvent Monsieur Pséma en train de regarder ce que je faisais. Mais il ne disait jamais rien. Il se contentait d'être spectateur. Je me contentais de l'ignorer.

  — Agent 74 937.

  Le garçon à côté de moi se lève. Il pousse un soupir. Lui aussi est là depuis des heures. Le pas hésitant, il entre dans la pièce.

  Je suis la prochaine.

  Je sais que les tests ont pris du retard. Je sais que je fais partie des derniers à passer. Je sais que Lorcan a déjà fini ses tests. S'en est-il bien sorti ?

  Au fond, je ne peux m'empêcher d'espérer que chacun de mes camarades qui avaient été invités à Kéntro s'en sortent bien – peut-être moins Antonya. Et je suis aussi effrayée à l'idée qu'ils puissent faire mieux que moi.

  Et si je me rate totalement ?

  Non, je ne peux pas y penser. J'ai passé ma vie à m'entraîner pour intégrer l'Élite. Cela fait vingt ans qu'on me répète que j'ai toutes mes chances pour rejoindre les Zíliens. On a enfreint les lois pour moi. Certains sont morts pour me permettre d'y parvenir.

  Le visage d'Igétis s'imprime dans mon esprit. Je pense aussi à sa fille. June.

  Je me mords la lèvre inférieure et lève la tête vers l'horloge. Elle indique non seulement l'heure – bientôt dix-huit heures –, mais aussi la date : 1er jour du Septième Mois 3566.

  Je me reconcentre sur mes mains. Elles tremblent. Je m'accroche au bord de ma chaise. J'essaie de prendre de grandes inspirations. J'essaie de respirer normalement.

  Je me remémore tout ce que j'ai vu. Dates et événements historiques, méthodes de combats, position à prendre pour tirer. Je sais le faire. Je sais des choses. Je ne peux pas oublier tout en un instant. Ça ira. Il faut que ça aille.

  Nous ne sommes plus beaucoup dans le couloir. Treize si j'ai bien compté. Treize.

  La fille à côté de moi est aussi stressée que moi. Elle ne cesse de gigoter et de marmonner des choses pour elle-même.

  La voix robotique me fait de nouveau sursauter :

  — Tests du Bâtiment Enniá terminés.

  Eux aussi. Il ne reste plus que notre Bâtiment. Nous ne sommes pas particulièrement plus nombreux. Le neuvième Bâtiment compte même le plus d'Aspirants de notre Promo. Pourtant, ils ont fini. J'ignore ce qui a causé notre retard. Cela signifie aussi que je suis la dernière des dix tirés au sort à ne pas être passée.

Dark Peace - Tome 1 : As Red As DawnTempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang