Chapitre 11 : Le bol d'air

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Delia se projetait déjà sur la manifestation du lendemain qui lui occupait tout son esprit. Il fallait trouver une solution pour convaincre Anoki de la laisser venir. C'était impossible pour elle de rester confiner avec son père à ne rien faire. Sa conviction prenait le dessus, car elle avait une mission pour laquelle elle était venue spécialement au Québec.

Ils étaient enfin arrivés à destination. Anoki se gara juste devant une façade qui laissait apercevoir une vaste demeure. A l'approche, ils découvrirent un magnifique manoir qui jonchait un terrain joliment décoré de dissemblables fleurs. Delia contempla cette bâtisse de pierre ornées de moulures et de sculptures qu'elle estimait visuellement au 16e siècle. Elle aimait l'art et les belles choses de l'époque.

Son rêve fut interrompu par la voix grave d'Anoki qui l'interpella et la somma de venir. Elle s'empressa de monter les larges escaliers qui menaient à l'entrée. Son père et Anoki étaient déjà sur le pas de la porte avec l'ami qui les accueillait. Les présentations étaient déjà faites.

— Delia je te présente Bly, c'est un ami d'enfance à qui tu peux faire entièrement confiance, tel ma doublure.

— Enchanté, désolé je traine un peu, j'étais en train d'admirer votre belle demeure, ironisa-t-elle.

— Entrez, entrez, je vous en prie.

À l'intérieur des tableaux décoraient splendidement les hauts murs. Elle a reconnu une peinture de Victor Tekachenko, un spécialiste de l'art abstrait. Des jaillissements de couleurs défilèrent sous ses yeux. Elle contempla ces lignes allongées avec des formes géométriques. Anoki brisa sa vision pour la ramener à la réalité.

— Bon, vous resterez là jusqu'à ce que les choses se calment. Ici vous êtes en sécurité et je reviendrai vous cherche après la manifestation de samedi.

—  Anoki ! Je dois venir avec toi, je suis venu ici pour une mission spécifique et je vais la remplir. Je dois être présente le jour de la grande manifestation.

— Non, hors de question, tu te mettrais en danger en venant. Je ne veux pas m'en tenir responsable s'il t'arrivait quelque chose.

— Ne t'inquiète pas, je suis majeure et vaccinée, je suis la seule responsable. Et puis je sais me défendre, tu sais bien que j'ai des super pouvoir ! dit-elle tout en l'amadouant du regard.

Il ne répondit pas et prit un long moment de réflexion, pour enfin autoriser Délia à venir avec lui. Elle était heureuse de la confiance qu'il lui témoignait. Elle a entrelacé son père pour le rassurer, et profita de la proximité de son oreille pour lui glisser quelques mots tendres. Après de longs adieux élogieux ils étaient déjà sur la route en direction du village Kuujjuaq.

Délia était plongée dans sa prochaine mission. Elle était très excitée à l'idée de retrouver Malika. Sur le chemin elle saisit un moment de calme pour lui téléphoner afin de la prévenir de son arrivée. À un feu rouge, ils étaient arrêtés. Elles avait des maux qui commençaient à envahir sa tête. Le dos courbé, elle attrapa fortement sa tête.

— Delia, ça va ?

— J'ai très mal à la tête, ça raisonne très fort.

— Relève-toi, regarde-moi !        .

— Attends, attends, chut.

Elle donnait l'impression d'être dans une concentration maximale tout en allant très mal.
Elle se focalisa sur une chose qu'Anoki ignorait. D'un coup elle se redressa mais toujours la tête dans ses mains, elle avait l'air paniquée. Elle ouvra les yeux et aperçut des rails de chemin de fer juste devant.

— Arrête-toi, arrête-toi ! j'entends des voix, des voix d'enfants apeurés. Ils crient que le tramway ne peut pas s'arrêter, et d'autres dires qu'ils vont tous mourir. C'est horrible, je les entends hurler.

L'Enclume des sages : Tome 1Where stories live. Discover now