Chapitre 45 (Megan)

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          Nous sommes arrivés à San Luis avant-hier. Suite à la descente de police à Buenos Aires, nous n'avions plus nos valises qui sont restées sur place. Léonardo a dû passer plusieurs coups de fils pour que des employés de sa villa nous emmènent de nouveaux habits et tout le nécessaire de toilette. Nous avons dû attendre l'arrivée de nos affaires plus d'une journée, mais elles sont enfin entre nos mains.

          Quand j'ai pu enlever mes vêtements sales et me brosser les dents, le peu de joie de vivre qu'il me restait a émergé.

          Ça m'a fait du bien.

          Je n'en pouvais plus d'être crade.

          L'Hispanique ne m'a pas adressé un mot depuis l'altercation dans l'avion et Léonardo et les Européens restent aussi les plus silencieux possible. Ils ne me donnent uniquement des ordres importants de temps à autres.

          Actuellement, nous arrivons sur le parking d'un entrepôt désaffecté. Au niveau de la porte d'entrée, une vingtaine d'individus nous attendent avec impatience. Leurs visages s'illuminent en apercevant notre véhicule gris anthracite, alors que de mon côté, les coins de ma bouche ne se relèvent pas pour me donner une expression joyeuse. Je suis épuisée et en colère. Je sais que je le montre sur mon visage. Et alors ? Je m'en fiche.

          Cela fait bientôt quarante-huit heures que je me repasse en boucle l'intervention de mes collègues du Swat à Buenos Aires et que je tente de trouver comment j'aurais pu mieux les aider. J'aurais bien sûr dû essayer de me débattre encore plus, même si j'ai fait tout ce que j'ai pu. J'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour gagner du temps, mais ce n'était pas assez...

          Je me remémore l'eyes contact avec Alex. Il était là et il ne l'est plus. Je ne sais pas combien de temps je vais encore devoir attendre avant de le revoir lui, mais aussi ma famille et mes amis. J'espère que nos retrouvailles ne tarderont pas, car je ne suis pas sûre de tenir encore longtemps dans ces conditions de vie.

          Léonardo se gare sur l'une des nombreuses places appartenant à l'ancienne usine à présent transformée en planque pour un gang, mais ne quitte pas la voiture après avoir coupé le contact.

          On peut sortir ?

          Après plus d'une heure à être restée assise, écrabouillée entre deux soldats baraqués sur la banquette arrière, j'ai des fourmis dans les jambes.

          Il se retourne et s'adresse à moi avec le même ton froid qu'il arbore depuis le vol en jet privé.

          — Dégage-moi cette mine d'enterrement. J'te demande qu'une heure. Après, tu pourras tirer la tronche si ça t'fait plaisir.

          Je lui affiche mon plus beau sourire forcé que je relâche immédiatement lorsqu'il se détourne. Je retrouve la mine lasse que je n'abandonnerai pas de la journée, il ne pourra pas discuter, ça ne servira à rien.

          En entrant dans l'usine désaffectée, le monde semble à mes pieds. Les membres du gang me supplient de leur adresser un regard, un mot ou encore de leur toucher la main. Naturellement, je les ignore. S'ils savaient comment je suis arrivée ici, ils ne me chériraient pas autant, loin de là. Je suis policière, donc ils auraient peur de moi. En plus, je me suis faite enlever et ne suis pas dans cette planque de mon plein gré, ce qui fait qu'ils me détesteraient, car je ne les adule pas à mon tour. Je ne suis pas à ma place ici, mais cette information, ils ne l'ont pas.

          Ils croient que je suis la fille extraordinaire d'un chef de gang incroyable et que je rêve de diriger ce gang pour le rendre plus fort qu'il ne l'est déjà. Ils ne connaissent pas mon histoire... enfin... ma vraie histoire. Léonardo leur a raconté tellement de mensonges que je ne ressemble absolument plus à Megan la policière. Pour eux, je suis Megan la cheffe de gang et la dealeuse la plus renommée de tout le pays.

Je ne te lâcherai pasWhere stories live. Discover now