Chapitre 18 : Dura Lex Sed Lex

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Ils revinrent enfin dans la salle de réunion, silencieux. Roxane y était déjà assise, autour de la table, se tortillant les doigts. Evelynn, elle, jouait avec son pistolet, une reproduction d'un vieux Steyr M-A1 des années 2000, en le déchargeant puis le rechargeant plusieurs fois, et en tirant plusieurs fois la glissière.

« Bang » faisait-elle en faisant semblant de tirer.

- Alors, débuta Rosalind, on s'y met ?

- On y va, enchaîna Evelynn, laisse-moi mener la discussion, tu veux bien ?

Question qui était bien évidemment rhétorique.

- Je suppose que tu veux savoir ce que tu fais ici, ce qu'est Proudhon, ce qu'il y a là-bas, qui sont plus précisément les Rôdeurs...

A l'entente de ce mot, Roxane regarda Rosalind.

Rôdeurs ! Elle vient de dire Rôdeurs ! A haute voix ! pensait la jeune fille.

La rousse comprit immédiatement la panique dans le regard de Roxane et lui dit :

- Ici, tu es en sécurité. Tu peux crier haut et fort ce genre de propos.

- Rôdeurs ? Ah oui, continua la commandante. Bon, Proudhon, l'anarchisme... Je pense que notre cher Léopold t'as déjà fait un cours dessus. Maintenant, passons au contenu de cet étage. Il y a très longtemps, un règlement nous a été imposé : Le Règlement Intérieur Primaire. Des consignes très objectives nous ont été données et nous devions nous engager à les respecter. Mais un jour, un homme en a décidé autrement et a voulu défier les lois. Cet homme...

- C'est mon père, déclara Rosalind. Il a fait entrer quelqu'un dans la Tour. Le lendemain matin qui suivit, Néo, l'a découvert, assis sur une chaise, le corps entièrement ouvert, vidé de ses organes, à ce fameux dernier étage : Proudhon. Mon frère a dû reprendre la succession alors qu'il avait seulement quinze ans, traumatisé pas ces horreurs. Il n'y a jamais remis les pieds et ne veut même plus entendre parler.

- Ce qui, il faut l'avouer, ajouta Léopold, nous arrange fortement.

- En plus de son corps, repris Evelynn, un message avait été tracé sur un des murs avec son sang :

Dura Lex Sed Lex

That does not respect the law must die

Anarchism punished by prowlers

- La première phrase est un proverbe latin, nota Léopold, La loi est dure mais c'est la loi.

- Les deux autres sont en anglais, confirma la rousse : « Qui ne respecte pas la loi doit mourir » « L'anarchisme est puni par les rôdeurs ».

- Ainsi débuta une ère de terreur, conta la commandante, mais aussi le début d'une révolution. Nous cherchions alors, pour la première fois, à quitter la Tour, cet Eden que nous chérissions tant auparavant ! Plusieurs personnes, dont beaucoup de militaire, sont mortes pour des actes anarchistes... mais un jour, alors qu'il était tard dans la nuit, un de ces anarchistes eu la malchance de tomber nez à nez avec un de ces Rôdeurs. Mais celui-ci se tenait à l'écart de l'homme tant qu'il était près de la statue qui est aujourd'hui à l'étage royal. Quand le Rôdeur voulait s'approcher, il semblait... souffrir. Nous recherchions alors pourquoi le Rôdeur avait fui... et nous fîmes la remarque que la statue était entièrement faite d'onyx noir. Ainsi, nous comprenions que les Rôdeurs étaient donc repoussés par cette matière. Nous ne savons toujours pas qu'est-ce qui, dans la composition de cette roche, les affaibli mais nous allions alors utiliser celle-ci a notre avantage. Les étages Rousseau, Voltaire et Montesquieu, étages concernant les activités militaires, furent entièrement rénové dans le plus grand des secrets : nos murs sont actuellement remplis, entre deux couches d'acier, d'onyx noir. Depuis, il n'y a plus aucune chance que les Rôdeurs ne s'approchent d'ici. Nous fîmes aussi la remarque plus tard qu'ils détestaient le bruit, sûrement sont-ils affectés par les vibrations sonores ou autres, on ne sait toujours pas vraiment...

Roxane était perdue, dépitée, les pieds encrés dans le sol, les fesses collées à sa chaise, la bouche entre-ouverte, le cœur battant. Elle qui, avant d'entrer dans la Tour, la trouvait si belle, si imposante, imaginant un lieu de paix et de plaisir, avec des gens intellects et savants... Mais rien de tout ça. Elle regrettait alors l'extérieur, ne souhaitait alors que la sensation du soleil qui effleurait ça peu comme une caresse, son appartement, sa vue sur la place centrale à la fenêtre, les enfants qui jouaient, les petits déjeuner chez Anne, et les lèvres de Jayce sur les siennes.

Evelynn vint s'accroupir aux pieds de Roxane...

- Toutes ces horreurs, ces morts... Tu es notre seule chance pour qu'elles puissent disparaître...

Des larmes commencèrent à glisser sur les joues de Roxane.

- Mais je suis incapable de vous aider, sanglotait-elle, je ne veux pas être responsable de ces morts.

- Non, tu ne seras que responsable de notre libération. Tu es notre clef de sortie, tu es la Clef de l'Anarchie.

- Je pense qu'il est temps pour elle d'aller voir, dit Rosalind.

Evelynn se releva puis rassura Roxane :

- Sèches tes larmes, ne t'inquiète pas, tout se passera pour le mieux.

LE MURMURE DE LA PLUIE | Science-FictionWhere stories live. Discover now