Epilogue (corrigé +)

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Une fois soignée, Heilin s'éloigna des campements que sorcières, mages, humains et wastes parvenaient à construire grâce à leurs capacités conjuguées. Wyatt dormait paisiblement dans une tente gardée par Rhett et ses frères pendant que Dageus discutait de la suite des événements avec Fark et Kiera. Elle décida de grimper la colline sous le regard de son compagnon.

Depuis deux heures, Matt fixait la ferme éclairée de l'intérieure.

– Tu devrais y aller.

Le léopard secoua la tête négativement. Heilin pinça les lèvres, incertaine. Pourquoi hésitait-il devant la maison de son enfance ? Quelques mètres et il retrouverait ses parents. Il retrouverait sa vie passée.

– Avant, il y avait une grange à côté de la maison.

Heilin scruta la bâtisse. Rien n'indiquait qu'un pareil bâtiment ait existé.

– Ils l'ont brûlé le jour précédent mon départ.

– Pourquoi ?

– C'est là que j'ai tué ma fiancée, murmura-t-il le visage baissé. J'ai perdu le contrôle... Je n'ai pas compris ce qui m'arrivait. Elle a tenté de m'aider et...

Sa main gauche se leva et s'abaissa aussi vite. Un geste dénué de tout sens et pourtant, elle en comprenait toute la portée symbolique. Dans ce bureau étroit, elle aurait pu le tuer sans le vouloir, poussée par la bête en elle. Si Vesper ne l'avait pas arrêtée, la situation aurait tourné dans ce sens.

Elle s'assit à un bras de lui.

– Il ne restait rien d'elle quand je suis revenu à moi.

– Quel âge avais-tu ?

– Ça n'a pas d'importance. Je l'ai dévorée.

Son rire un peu hystérique agressa son cœur compressé.

– Ils t'ont peut-être pardonné.

– Comme tu m'as pardonné ? se moqua-t-il.

– Je t'ai pardonné, Matt.

Un silence choqué les enveloppa. Elle chercha ses mots, les yeux perdus sur l'immensité sombre qui s'étendait devant eux. Sortir de Helldown était un rêve depuis son plus jeune âge mais à présent, elle ne ressentait qu'une angoisse sourde face à l'inconnu. L'immensité de l'inconnu.

– Tu étais mon rocher, murmura-t-elle. Tu étais tout ce que j'avais de stable. Ned... (elle émit un rire sarcastique) Je le considérais comme un père mais toi, tu étais celui sur lequel je me reposais réellement.

Matt posa son front contre ses genoux repliés. Elle savait qu'il l'écoutait attentivement.

– Tous les silences, les secrets, les non-dits... ça m'a explosé au visage et je me suis retrouvée sans rien. Je... je ne suis pas... enfin, plus fâchée. Je suis triste. Tellement triste que je ne sais pas comment l'exprimer. Je voudrais juste ne plus ressentir quoi que ce soit pour toi... pour quelqu'un que je ne connais pas au final.

Il se leva d'un bond, les poings serrés contre son corps crispé.

– Tu me connais ! Tu m'as toujours connu!

Pour la première fois depuis qu'ils se côtoyaient, il affichait ses sentiments sans retenue. Ses yeux brillaient de larmes, elle en eut le cœur brisé.

– Tu es la seule personne qui me connait mieux que mes parents. Tu ne sais pas que j'ai grandi dans une ferme ? Que j'avais une fiancée ? Quelle importance ?

– Ta douleur.

Il s'arrêta, surpris par son intervention à voix basse.

– Parfois, ton regard était chargé d'une telle douleur.

Helldown #2 - Ville de glaceWhere stories live. Discover now