VIII-Les naufragés

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Ton surnom de « ma petite naufragée » tu te rappelles ma Lou comment je l'avais trouvé ? On regardait la Seine, tout les deux, une belle-fin d'après-midi d'été. On était fascinés par les mystérieux mouvements de cette eau, il est incroyable de regarder sous un autre angle des éléments de notre quotidien. C'est un peu comme si l'on visitait une autre contrée, et l'on aimait s'y exercer à deux.

Et puis je me suis retourné vers toi, en essayant de te regarder d'un œil différent, presque objectivement, en faisant abstraction de mon amour pour toi et du charme de tes traits. Je t'ai observé pendant quelques minutes, et j'ai vu en toi cette expression délicate et sombre de ceux qui ont touché la mort de prés, mais qui loin d'en garder une peur étouffante l'on apprivoisée. Tu ne m'avais pas encore annoncé ton cancer, mais je sentais déjà en toi cette aura particulière de ceux savent le prix de la vie, qui savent le combat permanent qu'elle requiert. C'est alors que tes yeux bleus, immensité où le marin pourrai s'épanouir, m'ont dit, « les naufragés n'ont pas la chance de voir cette eau comme nous la percevons. Les naufragés voient en la mer un espace hostile, inquiétant, et en retirent de l'angoisse. Je les comprends, mais je les plains surtout. Car les naufragés partagent un moment si intime avec cet élément, qu'ils ont noué des liens différents avec cette eau, des liens qui ne peuvent s'effacer. Cependant deux types d'attitudes se profilent chez les naufragés : ceux qui vivent avec ce poids et cette souffrance, qui la subissent et ceux qui se relèvent, qui l'apprivoisent et en font quelque chose de beau.

Les naufragés c'est nous. Et la mer, c'est notre vie. »

C'est alors que j'ai compris que tu étais différente de tous les autres individus de cette terre. Que tu avais la capacité d'aller au-delà du réel, un peu à la manière d'un poète. Tu étais la petite naufragée de ma vie, celle qui revenait grandie de toutes les épreuves et de toutes les adversités.

C'est alors que je t'ai dit : « Tu accepterais d'être ma naufragée ? »

Et tu m'as souri.


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