Adolescents Fluorescents

Dix

Olivia

— T'as pas l'air en forme. Tu veux un thé?

Assise sur la véranda d'Albert, je scrute son visage blême.

— Non merci, répond-il d'une petite voix. Mon dos m'a fait souffrir cette nuit, je n'ai pas beaucoup dormi... Au fait, je t'ai préparé des truffes aux chocolats blancs.

Il fait mine de se lever pour aller les chercher, mais je l'arrête d'un mouvement de bras.

— Reste assis, j'y vais.

— Pas question, rétorque-t-il, visiblement vexé. Je suis vieux, mais je suis encore capable de marcher jusqu'à la cuisine, ma chère.

Il se redresse et je sais qu'il cache sa douleur. Je soupire devant son entêtement. Il revient avec une boîte en aluminium.

— Il y en a pour toute ta famille.

— Merci, Albert. Ça a l'air délicieux.

Il ne se rassoit pas et me dit :

— J'ai besoin de faire une sieste.

— Oh, d'accord.

Je me lève et lui dis au revoir. Il entre dans la maison et referme la porte. Je traverse la rue pour retourner chez moi, inquiète. Il paraît plutôt triste; je me demande ce qu'il me cache. J'espère que ce n'est pas par rapport à son cancer...

Pourtant, le lendemain matin, je passe chez lui avant d'aller au lycée et il est de bien meilleure humeur. Il m'a préparé une omelette au basilic et un smoothie à la mangue comme petit-déjeuner.

— T'es le meilleur, Albert, dis-je entre deux bouchées de ce plat délicieux.

— Je sais, je sais, se vante-il en rigolant.

— Au fait, je suis retournée voir le garçon dont je t'aie parlé au magasin hier. Ça m'inquiète de plus en plus, tout ça. Il avait une migraine très sévère. Je lui ai apporté un thé; j'espère que ça l'a aidé...

Albert reste silencieux.

— J'avais pensé l'inviter au feu de demain soir. Tu crois que c'est une bonne idée? Il semblait bien s'entendre avec le groupe, la dernière fois.

C'est un rituel pour notre band de faire une soirée quelques jours avant nos spectacles. Mais pas le genre de fête comme chez Justine, avec de la musique douteuse et des amis douteux. Plutôt une soirée autour d'un feu avec des guitares et des guimauves.

— Pourquoi pas, répond Albert. Ça ne lui ferait pas de mal de se faire un peu d'amis.

J'acquiesce et termine mon petit-déjeuner en vitesse pour ne pas être en retard au lycée.

***

— Salut, beauté.

Cédric ferme son casier et se tourne vers moi avec une pose qui se veut charmante. Je me force à m'arrêter et à ne pas laisser paraître mon aversion pour lui sur mon visage.

— Tu viens au match de football ce soir?

— Désolée, je dois étudier pour les examens finaux.

Et ce n'est même pas un mensonge. Cédric ferme son casier et accote son bras dessus d'un geste charmeur.

— Dommage. Voir ton beau p'tit cul m'aurait encouragé pour le match.