Douze

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Olivia

Je frappe énergiquement sur ma batterie, mes baguettes dans les mains. Pourtant, aucun son n'est produit: j'ai déposé des oreillers sur les percussions. Mes parents ont toujours refusé catégoriquement que je joue dans la maison, donc j'ai dû trouver une solution pour me pratiquer sans le vacarme habituel de mon instrument fétiche.

— C'est le grand jour, dit Mathias debout devant la porte de ma chambre.

J'acquiesce. Ce sera notre plus gros spectacle ce soir. Déjà deux cents personnes ont acheté des billets. J'espère qu'Henry en fait partie. J'espère aussi qu'il ne m'évite pas après ce qui s'est passé mercredi soir; je ne l'ai pas croisé au lycée depuis. Quoi qu'il en soit, je ne regrette rien. Sur le moment, c'était ce que je voulais, donc je ne dois pas avoir de remords maintenant. Oui, mon sang était légèrement brouillé par l'alcool, et ma conscience aussi, mais ce n'est qu'un baiser, pas vrai? Mais tout un baiser! Mon dernier remontait à celui avec Cédric, qui n'était qu'un trou noir insignifiant, tandis que celui avec Henry était une supernova colorée. Je sens encore ses lèvres sur ma bouche, au début hésitantes et de plus en plus ardentes. Je sens encore ses mains timides prendre mon visage. Je sens encore... Ok, c'est assez; je dois arrêter d'y penser. Je dois garder les pieds sur terre et non m'envoler, la tête remplie d'idées illusoires.

Je remarque que Mathias se tient encore sur le pas de ma porte et gigote nerveusement. J'arrête de jouer. Je sais tout de suite quand mon frère a besoin de parler.

— Je voulais te demander..., commence-t-il. Tu crois que Britany a aimé la soirée? Tu crois qu'elle a aimé mes amis?

— Mais oui! m'exlamé-je. Arrête de te prendre la tête. Elle a été super contente que tu l'invites enfin quelque part!

Un sourire idiot se forme sur son visage. Je n'ai jamais vu mon frère amoureux comme ça.

— C'est grâce à toi, déclare-t-il. C'est toi qui m'as poussé à l'inviter.

— Que ferais-tu sans ta petite soeur comme conseillère de relations amoureuses, hein?

— Britany m'aurait quitté depuis longtemps.

Tout le monde nous dit toujours que nous sommes pareils, lui et moi. Mêmes cheveux vagués (les siens sont seulement plus foncés), mêmes yeux rieurs, mêmes sourires... Pourtant, nous sommes tellement différents. Il hésite milles ans avant de sortir sa copine et, moi, j'invite à une soirée un garçon que je connais depuis à peine deux semaines et je l'embrasse. Ah, si ma mère savait...

***

— Hey, Henry!

J'accours vers lui et il relève la tête de son casier. Lorsqu'il me reconnaît, il retire ses écouteurs (LES DEUX) et le rouge lui monte aux joues.

— Je voulais savoir si tu venais toujours au spectacle, ce soir

— Bien sûr, répond-il.

— Parfait.

Nous restons un moment face à face sans rien dire. Henry se gratte la nuque d'une geste nerveux et bégaye :

— À propos de mercredi soir... Tu-Tu te rappelles que...

Il attend que je comprenne même si la fin de sa phrase est manquante. Sa gêne (qui le rend plutôt craquant, je l'avoue) me fait bien marrer intérieurement. Je décide de le faire rougir encore plus :

Adolescents FluorescentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant