Chapitre 12- Le poignard

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Annabelle

Mes jambes peinent à me soutenir, plus je m'attarde sur ce qu'il y a devant moi, plus mes forces me quittent.

Le mur qui me fait face est couvert d'étranges lettres, formant un charabia indéchiffrable pour une novice tel que moi, seulement elles ont l'air d'avoir été écrites avec du sang, le mien sûrement...

Au milieu de cet étrange tableau, trône un magnifique poignard enfoncé dans le mur. Sa lame fine et ornementée de symboles pour le moins étranges me font frissonner.

Sans un bruit, David me rejoint, me faisant sursauter.

- La vache... c'est toi qui a fait ça ?

- Aucune idée...

Je me laisse lentement et délibérément glisser contre le mur. Une panique sourde m'envahit. Qui suis-je et que me veulent ceux qui m'ont fait cela?

David, n'osant pas dans l'immédiat s'approcher du mur souillé, dégomme son smartphone et mitraille le mur de photos. Sans un mot, il me prend la main et m'invite à le suivre. Des ondes apaisantes me traversent le corps au moment où sa peau entre en contact avec la mienne. Sans plus réfléchir, je le suis, encore sous le choc et incapable de raisonner clairement face à la situation dans laquelle je me trouve.

Quelques minutes après, nous nous retrouvons dans le grenier de la maison, un grimoire dans les mains de David.

- Il nous faut un sort de protection, m'assène-t-il en guise de réponse à ma question muette.

Je le regarde faire, sans rien oser dire. Puis-je réellement lui faire confiance ? Que se passe-t-il en moi ? Perdue dans mes réflexions, je ne le vois pas fermer le grimoire et venir s'installer à mes côtés. Il pose sa main sur mon bras, ce qui a le don de me ramener à la réalité dans un beau sursaut. Il semble se moquer de moi. Je le fusille du regard, pour qui se prend-t-il ?!

- Désolé ta réaction était trop belle à voire, s'esclaffe-t-il.

Ma colère est telle que le sol de la salle se met à trembler, coupant la chique à David.

- Ok, respire, ne laisse pas tes pouvoirs prendre le dessus, me dit-il d'un air inquiet.

Tant bien que mal, je m'efforce de suivre ses conseils mais ce tumulte d'énergie est si fort qu'il me faut un bon moment avant de le sentir refluer en moi. Si bien que cette épreuve me laisse dans une incompréhension totale, lessivée et à bout de souffle. Ayant repris le dessus, je m'autorise à regarder la pièce dans laquelle nous sommes et croise le regarde de David, il est inquiet. Sans même que j'ai à le lui demander, il se met à parler.

- La magie hein ? J'y connais pas grand-chose à vrai dire. Ma grand-mère en parlait souvent quand j'étais petit mais j'y croyais pas... jusqu'à ce que mes pouvoirs arrivent, peu de temps avant le carnage. Mais je me suis documenté, apparemment je descends des sorciers de Salem.

Perdu dans ses pensées, il ne dit rien durant d'interminables secondes.

-... c'est encore nouveau pour moi. Je sens mieux tout ce qui se passe autour de moi, je fais voler des objets et mon intuition ne me trompe jamais.

C'est les yeux remplis de larmes, qu'il me fixe, sans un mot, ses yeux parlant pour lui. Je partage son désarrois. Alors que je m'apprête à le prendre dans mes bras pour le réconforter, un bruit sourd se fait entendre à l'étage du dessous. L'angoisse me monte à la gorge, aucun de nous n'ose bouger...

-... et le sort de protection ? je chuchote.

- pas assez puissant apparemment, vient nous ne pouvons pas rester là...

Dans un silence quasi irréel, il se lève, prend un sac caché derrière la porte et m'invite à le suivre. Etant moins gracieuse que lui, j'ai l'impression que chaque pas que je fais provoque un bruit infernal. L'air inquiet de David, qui se tient près de la fenêtre, confirme mes pensées.

Soudain, la lumière commence à vaciller. David me fait signe de le suivre et disparaît par l'embouchure de la fenêtre. Paniquée, je le suis sans réfléchir et manque de peu de me retrouver au-dessus du vide sans rien pour me retenir.

A peine ai-je fais quelques pas sur le côté, qu'un poignard vole au travers de la fenêtre, allant se ficher dans un arbre non loin de là , effleurant mes cheveux. David est déjà à mi-chemin du balcon qui nous permettra de potentiellement rejoindre le sol sans se faire repérer. Voyant que je suis totalement pétrifiée, il revient vers moi et me tend la main. Ensemble, nous arrivons rapidement au coin de la maison, il ne nous reste plus qu'à sauter sur le petit balcon présent un mètre et demi en contrebas.

A l'unisson, nous nous élançons dans les airs et retombons sur nos pieds.

- Vite suis moi, me dit David.

Il tente d'ouvrir la porte fenêtre mais elle est complètement verrouillée de l'intérieur.

- Merde!

Soudain, une idée fugace me traverse l'esprit.

- Le couteau ! je m'écrie d'une voix un peu trop forte.

David comprenant où je veux en venir ne perd pas une seule seconde et fais revenir le poignard à une vitesse fulgurante vers nous. Sans prévenir, il me saute dessus et me pousse dans les recoins du maigre balcon sur lequel nous nous trouvons, m'évitant ainsi de me faire cribler de bouts de verres issus de la rencontre de la lame avec les vitres de la porte fenêtre.

Le sentant se raidir sur moi, je comprends qu'il n'a pas eu autant de chance que moi. A peine ai-je le temps de me retourner, que je vous déjà le sol se teinter de gouttelettes rouges. Instinctivement, je le fais se retourner pour jauger les dégâts. Un énorme tesson de verre lui a perforé le milieu du dos. Laissant mon inconscient prendre la relève, je l'attire à l'intérieur et le pousse sur le canapé, créant en même temps un bâillon à l'aide de son t-shirt en lambeaux. D'un geste précis et rapide, je lui enlève ce fameux morceau de verre et laisse mon corps opérer sa magie. Je pose mes mains sur ses blessures et laisse l'énergie circuler dans tous mon corps. Dès les premières secondes, le visage de David s'apaise, la douleur semble plus supportable et au bout d'une petite minute, ses saignements se sont atténués. Prenant conscience que c'est moi qui aie provoqué tout cela et sans savoir comment, je m'arrête brusquement. David quant à lui se relève d'un geste souple, me lance un regard étonné et débordant de gratitude puis m'attrape par la main pour me faire dévaler l'escalier à une vitesse fulgurante. Arrivés dehors, nous nous mettons à courir comme des dératés, de peur qu'il ou encore qu'ils nous rattrapent. Etant partiellement à l'abri grâce aux arbres recouvrant l'aller dans laquelle David habite, je me permets de jeter un bref coup d'œil en arrière. La maison est désormais emplie d'une énergie malveillante donnant froid dans le dos. Au même moment, la porte d'entrée s'ouvre sur nos potentiels assaillants. Sans plus hésiter, nous courrons de plus belle, jusqu'à être perdu au milieu des bois avoisinant la ville.


Blackout (Terminée)Where stories live. Discover now