Chapitre 9 - Croque l'Oeuf

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Kayla
Nous sommes sur l'autoroute, en route vers nulle part. Notre seul but est de nous éloigner de Richard, quitte à devoir changer de ville.

- On devrait peut-être s'arrêter pour manger et pour charger la voiture...
- Non. On peut rouler encore une petite heure.

Je soupire.

- Il est loin, il n'a peut-être même pas encore remarqué notre disparition!
- Tu as raison. D'accord... arrêtons-nous.

Marguerite et moi mangeons dans un restaurant, et nous en profitons pour brancher la voiture que nous avons volée sur une borne de rechargement.

- Tu penses qu'il nous retrouvera?
- Non. En tout cas je l'espère...
- Et s'il nous retrouve, il nous fera quoi?
- Je pense qu'on sera toutes les deux dans une fâcheuse situation. Il me battra sûrement, et toi tu seras forcée à jouer à son jeu. Et je pense qu'il te punira sévèrement parce que tu es partie avec moi. Il t'a payée très cher, tu sais...

Je regarde par la fenêtre et j'ai peur de le voir arriver.

- Marguerite, tu penses qu'on réussira à se faire une nouvelle vie ailleurs?
- Sûrement. J'ai de l'argent et je pourrai toujours travailler pour nous faire vivre.
- Je travaillerai aussi pour t'aider.
- Non. Laisse-moi m'occuper de toi comme le ferait une mère.

Je soupire. Ça dépend de quelle mère elle parle...

- Je vais payer notre repas.

Elle me tend des clés et sort un billet de 100$.

- Fais démarrer la voiture, pendant que je passe à la caisse.
- D'accord.

Je sors du restaurant et je démarre la voiture. Je lève les yeux sur le rétroviseur et je vois une voiture arriver au loin. Elle se rapproche, et je finis par la reconnaître. C'est la voiture de Richard. Sous l'emprise de la panique, je me couche dans le fond de la voiture et j'attends.

Marguerite
Je fais la file à la caisse, et je paie l'addition. Lorsque je regarde dehors pour m'assurer que Kayla va bien, je ne la vois pas à l'intérieur de la voiture. Pire encore, je vois arriver au loin la voiture de Richard.

Merde.

Je me retourne violemment vers la caissière.

- S'il vous plaît, aidez-moi.
- Qu'est-ce qui se passe?
- Un homme essaie de nous attaquer, ma fille et moi. C'est lui qui m'a fait ça.

Je pointe mon oeil au beurre noir, qui est encore légèrement apparent.

- Oh, je vois. Et votre fille elle est où?
- Elle est partie mettre la clé sur le contact, mais je ne la vois plus...
- Elle s'est sûrement cachée dans la voiture. Écoutez, je ne peux rien pour vous. Je ne suis pas armée.
- Puis-je au moins utiliser le téléphone?
- Oui. Il est là.

La femme me pointe un téléphone public. Je compose le 911 et j'attends.

- Bonjour?
- Bonjour. Ici la police. Quel est le motif de votre appel?
- Quelqu'un nous poursuit, ma fille et moi. Il nous veut du mal.
- Le connaissez-vous?
- Oui. Il s'agit de mon conjoint.
- Où vous trouvez-vous?
- Dans le restaurant « Croque l'Oeuf », au bord de l'autoroute.
- Bien. Une voiture de police devrait arriver sous peu.
- Merci.

Je raccroche et je retourne voir la caissière.

- Il ne cherchera sûrement pas dans la voiture, donc elle est en sécurité, mais je n'ai plus le temps de la rejoindre...
- Et qu'attendez-vous de moi exactement?
- Je peux me cacher dans l'arrière-boutique?
- Non, je n'ai pas le droit de vous laisser y rentrer. Mais vous pouvez vous cacher sous le comptoir, de mon côté.
- Merci.

Je me cache rapidement et je regarde la caissière.

- Je crois qu'il vient d'entrer.

Quelques secondes après, j'entends la voix de Richard, ce qui confirme nos doutes.

- Bonjour, auriez-vous vu une jeune femme et une adolescente de 16 ans environ?
- Non.
- La voiture qu'elles m'ont volée se trouve dans le stationnement.
- Je ne les ai pas vues.

Richard tape son poing sur le comptoir, ce qui me fait sursauter.

- Écoutez, madame. Elles ont laissé la voiture dans le stationnement de votre restaurant. Il est certain qu'elles sont ici, quelque part.

Je l'entends déposer quelque chose sur le comptoir.

- Si vous me donnez dites où elles sont, ceci est pour vous.
- Je ne veux pas de votre argent.

J'entends Richard soupirer, puis déposer une autre liasse de billets à l'adresse de la caissière, qui ne répond pas.

- Alors, où sont-elles?
- Vous parlez de la femme que vous avez battue?
- Je n'ai jamais touché à un cheveu de ma douce moitié.
- Pourtant, j'ai vu son visage et elle m'a dit elle-même que son conjoint la battait.
- Vous voulez l'argent ou pas?
- Non. Laissez-les tranquilles.

Richard grogne et sort du restaurant. La caissière ne me regarde pas mais me décrit ses moindres mouvements.

- Il marche vers le stationnement. Il se dirige vers sa voiture. En fait, il de dirige vers votre voiture. Il cherche quelque chose dans ses poches. Il sort des clés.
- Merde, Kayla!

Je m'apprête à me lever, mais la caissière m'en empêche.

- Ne bougez pas. Je vais m'en occuper.

Je regarde discrètement par-dessus le comptoir et je vois la caissière sortir du restaurant - qui est vide - et se diriger vers Richard. Elle lui parle un peu, puis ils reviennent tous les deux au restaurant. Je me cache à nouveau et j'écoute.

- Je les ai vues. Je pense que vous méritez la vérité.
- Alors, où sont-elles?
- Elles se sont arrêtées ici pour manger, puis la femme est venue me voir. Elle m'a expliqué qu'elle fuyait son conjoint, qu'elle a décrit comme un homme violent. Ensuite, elle a appelé la police et elle m'a demandé si elle pouvait laisser la voiture ici.
- Mais en ce moment, où sont-elles?
- J'y venais, soyez donc patient...

Richard soupire.

- Elle m'a dit qu'elle fuyait par les bois et qu'elle pensait qu'il était trop dangereux pour elle de continuer en voiture. Elle m'a demandé d'avertir les policiers lorsqu'ils arriveraient.
- D'accord. Merci.

Nous entendons des sirènes, et j'entends les pas de Richard s'éloigner.

- Ne dites rien aux policiers, s'ils vous posent des questions.

La porte s'ouvre et se referme.

- Il est parti.

Kayla
Je suis allongée dans la voiture depuis longtemps quand j'entends des sirènes au loin. C'est la police! Je regarde discrètement dehors et je vois une voiture de police se stationner à l'autre bout du petit parking. Je m'apprête à sortir, mais Richard sort du restaurant. La fenêtre étant un peu ouverte, j'entends la conversation entre mon acheteur et un policier.

- Bonjour monsieur, nous avons reçu un appel ultérieurement. Savez-vous quelque chose sur la personne qui l'a passé?
- Je vous propose quelque chose: 10 000$ en échange de quoi vous oubliez l'appel et dites à vos collègues que c'était une mauvaise blague.
- Aucun problème. Je retourne chez moi, alors. Je vais enfin passer une soirée tranquille avec ma femme et mes enfants.

La vache, l'argent peut vraiment tout acheter... Je suis officiellement dans la merde.


Et voilà. Leur petit moment de répis n'aura pas duré longtemps!

Kayla: Prise (Tome I)Donde viven las historias. Descúbrelo ahora