37. Révélation

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Quand on pénètre dans la grande salle, je suis trempée. Mes cheveux dégoulinent dans mon cou. Mon T-shirt colle à ma peau. Je refuse de parler à X tant qu'il prétendra que j'ai tout inventé au sujet des griffes. Les garçons accoudés au bar rigolent ensemble comme si de rien n'était. Ont-ils déjà oublié la pluie de cadavres ?

Je ne les comprends pas. On sème la terreur sur notre campus et ils sont d'humeur légère. Je me dirige vers eux pour rejoindre June et Kim.

X rêve s'il croit que je vais rester dormir ici. J'embrasse les filles et retourne à l'hôtel.

— Hey ! T, ton admiratrice vient d'arriver ! se moque comme à son habitude Z en m'apercevant.

Il se croit malin. Tout le monde se retourne vers nous. Je ne dois pas être belle à voir vu la tête qu'ils font. Terrence rit jaune.

— Vous en avez mis du temps, ajoute Sloan d'un air renfrogné.

— Pourquoi vous êtes trempés ? reprend Zane.

June apparaît derrière le comptoir, une cuillère en bois à la main. Des odeurs de cuisine me parviennent au même moment. Je suis si contente de la voir. Elle se précipite vers moi.

— Sas ! Trop cool ! Tu dors ici ce soir ! dit-elle toute guillerette.

Qu'est-ce qu'ils ont tous ici ?! Ils vivent sur une autre planète ?
J'apprécie que Zane ne lui ait pas parlé de mon "petit problème" à la résidence, particulièrement après ce qui est arrivé à Kim. Mais ce n'est pas une raison pour tout occulter.

— Je suis seulement passée vous voir. Je rentre à l'hôtel après.

Les garçons éclatent de rire. Je me demande bien ce qu'il y a de drôle dans ce que je viens de dire. Je me retourne vers X. Impassible comme à son habitude. Il rejoint ses potes.

— Tu devrais monter prendre une douche, lance-t-il sans même me regarder. Tu vas prendre froid.

— C'est vrai, dit-June. Tes lèvres sont presque violettes. Pourquoi tu es toute trempée ?

— X avait besoin de se rafraîchir alors on a fait trempette, dis-je. Ju ! Je rêve ou tu fais la cuisine ! J'aurai vraiment tout vu aujourd'hui !

— Très drôle, répond-elle. On remercie les garçons de leur hospitalité en leur faisant des bons petits plats. Enfin surtout Kim. Je suis plutôt sa commise. Tu restes dîner au-moins ?

En me penchant pour regarder Kim s'affairer en cuisine, je remarque derrière le bar un espace tout équipé. Je ne l'avais pas remarqué hier matin. Il devait être caché derrière des parois coulissantes. Kim semble aller plutôt bien. Elle vient m'embrasser chaleureusement.

— Ça a l'air délicieux les filles, dis-je.

— Il y a des lasagnes accompagnées d'une salade composée. Je vais préparer un croque-monsieur végétarien pour toi, ajoute Kim.

— Va te réchauffer coupe Ju. On s'occupe de tout. Tu as le temps, hein Kim ?

— C'est prêt dans une vingtaine de minutes, répond-elle.

— Ok, merci. June, je peux emprunter ton portable pour envoyer un message à Tom, s'il-t-plaît ? J'ai égaré le mien.

En m'excusant pour ma quasi évasion, je lui communique l'adresse d'un café où venir me chercher dans deux heures.

— Qui aurait l'amabilité de me laisser utiliser sa salle de bain ? Je demande à la cantonade.

Personne ne réagit. Ils font comme s'ils n'avaient rien entendu.

— Ok, je vois, dis-je irritée par leur réaction. Chasse gardée ? Vous savez que je ne lui appartiens pas, au-moins ?!

— Il y a de l'eau dans le gaz, on dirait, jette Zane amusé en tapant dans le dos d'X.

— On ne touche pas aux meufs de nos potes, lance subitement Terrence.

— Bon, la plaisanterie a assez duré ! Tu sais très bien que je ne suis pas sa meuf. J'imagine que mes affaires sont déjà là-haut, dis-je prête à exploser.

Si on pouvait arrêter la vanne de la petite amie, ça me ferait des vacances. C'est lourd à la fin. Je monte directement dans sa salle de bain, ferme la porte derrière moi et me laisse glisser lentement jusqu'au sol. Je ne suis même plus énervée. Je suis au-delà de ça. Hébétée, les yeux perdus dans le vague, je reste là sans bouger pendant un moment. Ce n'est que sous l'eau brûlante de la douche que mes idées commencent à reprendre forme. J'essaye de récapituler les événements hallucinants qui s'enchaînent les uns après les autres dans ma tête : les attaques, les corps, cet homme grimpant au mur comme une araignée, ses yeux de prédateurs, ses griffes, le silence d'X, moi prise là-dedans, je ne sais pas pourquoi...ça fait beaucoup. La présence d'X, dans cet espace exigu empli de vapeur, me semble encore plus forte que la dernière fois. J'ai envie de crier ! J'en ai marre de lui, de son emprise sur moi.

Quand j'ouvre les yeux de colère. X est là, devant moi, nu. Il me regarde. J'hallucine ?! Il prend ma main et la pose sur son torse. Ses muscles frémissent. Je ne rêve pas... Il pose mon autre main sur son biceps. J'observe la scène ébahie. Mes mains sur lui, nos corps nus, exposés l'un à l'autre, je sens imperceptiblement son corps palpiter et glisser sous mes doigts. X prend de la masse. Ma main ne recouvre plus qu'une petite partie de son biceps, son diamètre ayant presque doublé de volume. Je le trouvais déjà imposant avant, je n'avais encore rien vu. Une partie de moi avait déjà compris mais l'autre ne voulait pas la croire.

— Et les griffes ? dis-je dans un souffle.

Je baisse la tête et fixe ses mains immenses. Elles pourraient écraser et mettre en miettes n'importe quoi. J'ai l'impression d'être si petite à cet instant. Des griffes poussent lentement au bout de ses longs doigts et font de sa main une arme redoutable.

— Toujours pas peur de moi ? m'interroge-t-il en raclant sa gorge.

X rétracte ses griffes en un battement de cils. Je relève lentement ma tête, un peu sonnée. Je le regarde droit dans les yeux. Nerveux, il attend ma réponse. Je pose délicatement ma main sur sa joue. En me dressant sur la pointe des pieds, nos corps se frôlent.

— Merci, dis-je à son oreille.

Sans explication, X sort brusquement de la douche laissant pénétrer un courant d'air froid à sa place, qui me fait trembler. Sans se retourner, il clôt cet instant de la seule manière que je lui connais. Comme un rustre.

— Dépêche-toi, dit-il d'une voix rauque. J'ai un rendez-vous ce soir.

Entre tes Griffes 1 (Publié Aux Éditions HLab)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant