CHAPITRE 11 ♫

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         La peine est en passe de s'estomper pour la soirée. Dans le noir, je ne ris plus. Je ne pleure plus. Impassible, je fixe l'écran plat accroché au mur. Je me remémore les derniers événements et prends conscience de l'empressement avec lequel j'ai voulu briser la frontière d'une amitié puissante pour un peu d'amour. La solitude me pèse. Souvent, je me sens seule alors je me suis emballée. J'ai carrément passé la quatrième vitesse, sans réfléchir, sans vision globale de la situation.

Nous ne pouvons pas revenir en arrière. Je ne sais pas de quoi demain sera fait. Peut-être que cet acte de plaisir dont nous avons profité quelques instants nous coûtera notre amitié. Je n'en sais rien. Si Loris tenait réellement à moi, n'aurait-il pas tenté de m'appeler ou de m'envoyer un SMS ? Depuis notre dispute, nada, rien. J'ai droit au néant, un néant révélateur de la teneur de notre relation... superficielle ?

Bouge-toi ma pauvre fille !

Je me lève et sautille dans le salon en agitant les bras.

— Dernière soirée de déprime ! Oui ! Oui ! Ouais !

Je me coache avec succès. Un quart d'heure plus tard, je suis dans la cuisine et me prépare le plateau. C'est notre remède à Marylin, ma meilleure amie, ma sœur et à moi. Quand ça ne va pas, que tout se casse la gueule autour de nous, il existe une solution. La solution ultime contre la déprime, ce foutu big plateau de la tristesse qui tue. Il atténue les peines, fait oublier les petits bobos du quotidien. 


— Toc Toc Toc ! Devine qui est là ?

La voix suraiguë de Marylin me fait sourire. Depuis la cuisine, je l'entends s'extasier sur la couronne de Noël accrochée à la porte d'entrée grande ouverte.

— Je rentre !

— Fais comme chez toi !

La porte claque. Marylin déboule et déballe sur la table de bar le contenu de son sac de courses.

— Chips au fromage, baguette, pâte à tartiner et pots de glace. La base !

— La base !

Je me penche pour tirer la bouteille de vin calée entre deux pots à épices.

— La base de la base ! s'exclame Marylin en rigolant.

Je saisie deux coupes d'un placard que je pose sur le plan de travail.

— J'ai apporté le tee-shirt de mon ex !

— J'ai une paire de chaussettes appartenant à Loris, qu'il a oubliée ici il y a quelques mois déjà.

— Au feu !

La soirée big plateau de la tristesse qui tue permet d'une part d'avoir un prétexte valable pour se goinfrer sans culpabiliser et d'autre part, d'exorciser ses démons, de cracher sa haine contre les mecs ou la collègue pétasse du bureau d'en face.

Marylin sort aussi de son sac, deux bonnets de Noël lumineux. Nous les enfilons sur nos têtes et partons nous enraciner dans le salon. Comédie romantique en fond, nous radotons sur la vie en général. Sur les hauts et les bas auxquels nous sommes confrontées. Puis nous entrons dans le vif du sujet. Les hommes !

— J'ai vingt-sept ans, toutes mes dents, une vie sympa, un boulot plaisant, mais niveau relation de couple, c'est la débandade.

La brunette souffle lourdement en se servant une deuxième coupe de vin.

— À mon tour !

Je le concède, je suis pompette. Pas bourrée, non, pompette. Adjectif girly à souhait qui rend la chose mignonne.

L'amour est un dessert qui se mange à deux (SCE HARPERCOLLINS)Where stories live. Discover now