7 (a). Frédérique

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Bob arriva un matin à la cabane. Il ne nous avait pas prévenu et nous avait trouvé affairés chacun à sa tâche, assez impressionné par notre organisation et le travail déjà abattu. Il était prévu qu'il vienne dans quelques jours pour commencer le travail sur les campements, mais il avait une bonne surprise avec lui : le sac d'Olivia était enfin arrivé.

Tout ça pour ça : un sac à dos à peine plus grand que le vanity de Raphaëlle !

Il avait été livré la veille au soir aux bureaux du Parc et Bob était venu exprès pour l'amener à Olivia, mais il ne comptait pas repartir les mains vides. Il nous proposa d'emmener certains d'entre nous en ville pour récupérer notre voiture (notre char) avec tout le matériel manquant (« que ça prendra d'charger » avait-il insisté) et si on voulait, on pourrait même magasiner. Ca tombait fort à propos. Se rendait-il compte qu'il fallait vraiment compléter les réserves de nourriture que le Parc avait faites pour nous ?

A moins que ce ne soit Pierre qui lui en avait touché deux mots par radio ?

Comment dire, pour trois français et une italienne, manger du bacon, des saucisses grasses, de la viande séchée avec du maïs, du chou, des chips et des œufs, le tout recouvert de sauce sucrée, ça n'allait pas le faire. Il manquait des légumes, des fruits, de la vraie viande, des herbes aromatiques et des épices. Des produits sains, quoi.

Et des tomates pour Olivia.

Bon c'est vrai qu'il ne manquait ni coca, ni gâteaux. Et vu qu'on avait un frigo, pourquoi se priver ? Et puis il fallait aussi acheter quelques bricoles indispensables comme du désodorisant chiottes (parce que c'est vrai, les toilettes sèches, ça pue !), des tampons (ça, les rangers ne pouvaient pas y penser), des piles pour les discman, des bougies pour y voir le soir, des boules quies pour s'accommoder des ronfleurs (pas assez de boules quies pour tout le monde) et surtout du produit anti-moustique (Noz avait couvert la liste de course de « moquito repellent », elle devait vraiment penser que son flacon ne tiendrait pas très longtemps. Faut dire qu'elle s'en barbouillait toutes les demi-heures).

Evidemment tout le monde était motivé pour l'accompagner.

Ou plutôt esquiver les corvées manuelles.

Alors ce fut le concours d'arguments : Noz insista pour y aller pour être sûre de prendre le bon produit moustique, Raphaëlle se proposa en tant que femme parce que c'était bien connu que si on laissait les hommes faire les courses, on aurait des bières et des biscuits, mais pas ce qui était écrit sur la liste (pour une fois j'étais d'accord avec elle), moi je dis juste que je ne connaissais pas Rivière-Blanche, quelqu'un proposa Olivia pour qu'elle s'achète des fringues (complètement idiot vu qu'elle venait de les retrouver justement) ... Au final, c'est Bob qui trancha : Tom avait de toute façon quelqu'un à voir au Parc, Benj parce qu'il avait un permis de conduire canadien pour ramener le « char » et il restait deux places. Mon argument fit mouche et Ti'Pierre ajouta que ça irait plus vite si on mettait les francophones pour les courses.



C'était la première fois que j'empruntais cette piste chaotique, le cul bringuebalé sur les rayures froides du métal de la benne.

Première fois aussi que je voyais Rivière-Blanche. Comment dire : Rivière-Blanche est une petite ville rurale.

D'Amérique du Nord.

La précision est importante. Pas de bourg aux maisons emberlificotées, pas de petites rues sinueuses, pas de joli centre avec sa petite place toute mignonne devant l'église (sans parler de la vieille église en pierre du millénaire dernier) et son bar des sports qui lui fait face. A croire qu'en France, il y a des tonnes de sportifs chrétiens, vu qu'il y a toujours un bar des sports en face de l'église. A moins que ce soit l'alibi pour ne pas aller à l'église « Chérie, je ne peux pas venir, je vais faire du sport ». Bon quand on voit les sportifs à l'intérieur de ces bars des sports, je crois que le seul sport jamais réalisé ne soit la descente !

Et pendant ce temps-là, à Tapachula (mon été dans les bois)Where stories live. Discover now