13. Frédérique

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Mi juillet, alors que nous étions déjà bien installés dans la routine, entre le débroussaillage, les trous à creuser, les pierres à enlever, les zones de bivouac à niveler, les sentiers de portage à aménager et autres joyeusetés qui occupaient bien notre quotidien et alors que le groupe commençait à ronronner, Mary a débarqué.

Chouette de la chair fraiche !

Nous étions à la cabane, qui à bricoler, qui à ranger, qui à glander chacun en fonction du programme que nous avions établi ensemble. Sauf le glandage, mais entre le programme théorique de Ti'Pierre et la réalisation pratique, il y avait souvent un décalage.

Benj et Manu étaient partis le matin au bureau des rangers avec le 4x4 de Pierre le Ranger que nous avions conservé et un canoë à réparer que nous avions sanglé tant bien que mal sur le toit (des vrais marocains partant au bled !). Le canoë avait subit un choc et on craignait pour son étanchéité. Bob, qu'on considérait un peu comme le Mc Giver du coin, trouverait certainement la solution. De toute façon, il fallait aller au bureau du Parc pour échanger de 4x4. Manu avait profité de l'aubaine pour pouvoir téléphoner à sa copine : il avait insisté tellement lourdement, que Jo, qui voulait faire le trajet, lui avait laissé sa place.

Dans l'après-midi, comme d'habitude, nous avons d'abord entendu le bruit du moteur le long du lac, puis entraperçu le pick-up blanc qui venait dans notre direction, un canoë sur une remorque. Nous nous sommes tous arrêtés et avons spéculé. A propos du canoë : réparé ou remplacé ? Ou même à réparer ? Et du pick-up : c'était pas prévu qu'on récupère notre vieille rougne ? Pierre le Ranger a certainement craqué, il est malade, il s'est racheté un 4x4 plus grand, il a gagné au logo et est parti se la couler douce à Hawaii ?

Le pick-up se rapprochait, les paris commençaient à grimper. Si bien que lorsqu'ils sont arrivés, il y avait un attroupement autour du pick-up et de la remorque.

- So, the canoe, what's up doc ? a demandé Jo (il avait fait le plus gros pari).

- Later. We'll talk about it later, will you Jo ? a répondu Benj.

Puis il a ouvert la porte et a lancé à la cantonade :

- My friends, mes amis, let me introduce you to, je vous présente ... Mary.

Mary est sortie dans la stupéfaction générale. Petite, brune, cheveux courts, yeux foncés, grand sourire, un petit diamant (ou imitation) en piercing sur le nez, plusieurs bagues en argent aux doigts (dont une au pouce) et des bracelets brésiliens.

- Mary, voici Jo, Matt, Pierre, Fred, Nozaki, Tom, Livia et Raphaëlle.

- Bienvéniou dans notwe Pawadis, a déclaré Jo en français avec son air le plus charmeur possible.

- On a bien fait de demander ce piqueu-up, a dit Ti'Pierre trop content de lui. Je savais que ça servirait.

Mary va rester quelques jours avec nous, a continué Benj. Elle est là pour sa thèse, pas pour travailler avec nous, la chanceuse. Bob n'a pas eu le temps de nous prévenir, elle était dans le nord avec une autre équipe, mais ça c'est vraiment mal passé. Il nous a demandé à Manu et à moi si on pouvait l'accueillir, puisqu'on était là. Et Manu n'a pas pu résister à son joli sourire !

- You bet Manu said that ! a ironisé Noz.

C'est marrant, on était devenu des experts dans l'art des conversations en plusieurs langues (français, anglais, québécois et toulousain). Il y avait toujours quelqu'un qui traduisait spontanément pour pas que l'un de nous perde le fil de la discussion. Benj était en général notre meilleur Nelson Monfort. En beaucoup plus joli.

Et pendant ce temps-là, à Tapachula (mon été dans les bois)Where stories live. Discover now