Galenn - Le chemin des Pierres

Chapitre 9 - L'origine

La brume bleue les emporte et change doucement de teintes, passant par un prisme de couleur que Galenn ne peut s'empêcher d'admirer. Il ne sent plus vraiment son corps mais la chaleur de sa main dans celle du géant autour du talisman de Charoïte le maintien dans la réalité.

—    Où allons-nous ? demande Galenn, sa propre voix résonnant en lui.
—    C'est où et quand allons-nous, plutôt, fait la voix profonde du géant dans le même plan que la voix du jeune homme.  Nous allons vers ton passé.
—    C'est impossible !
—    À un certain point tu as raison... mais tu oublies que les souvenirs sont des traces qui demeurent en nous et qui se transmettent aussi par les rêves et certains échanges magiques, pour ceux qui en sont capables.
—    Et toi...
—    Disons que j'ai une bonne mémoire, ricane le maître des mers. Et aussi, que j'ai connu tes ancêtres.
—    Mes parents ?
—    Non, pas eux mais tes aïeux, ceux du Royaume des Trois Lunes. La lignée me transmet ainsi leur histoire, même si je n'ai pas connu tes parents, le vent du large m'a rapporté leurs vies.
—   «Des Trois Lunes » ? ... Ce royaume n'existe pas !
—    Correction, Gamin : n'existe plus. Ni dans la réalité, ni dans la mémoire de la plupart des créatures terrestres. Avant que nous sortions de la brume, sache que tu es spectateur uniquement. Les souvenirs vont et viennent, tu devras être attentif.
—    Attends ! Dis-moi : mes parents sont toujours de ce monde ?
—    Galenn... je voudrais mieux...
—    Virko, j'aime mieux le savoir et non le découvrir en le vivant en souvenir.

Galenn sent dans la brume une chaleur qui irradie depuis le la silhouette du Géant.  Elle enveloppe le Guerrier d'un aura de compassion.

—    D'acccord, j'ai compris, raisonne en un soupir le jeune homme. Je m'en doutais, vois-tu. Il me restait un petit espoir.
—    Je suis désolé mon ami.
—    C'est bien la première fois que l'on me dit cela.
—    D'être désolé ?
—    Non, d'être un ami. Merci.
—    Tu vas comprendre ton passé et cela changera ton avenir.  Tu as en ce moment des amis, que tu ne connais même pas. Connaître ton passé changera la vie de beaucoup d'entre eux.
—    Alors présente les moi... mon ami le Géant des Mers !
—    Sois...
—    Attentif, oui.
Autour d'eux le tourbillon de brume s'enflamme et le voyage commence.

♾ ♾

Un guerrier en armure se précipite dans une grande salle, accompagné de plusieurs autres gardes. Il porte épée et dague, une cape de peau sur ses épaules.  Il s'avance jusqu'au fond de la salle où de nombreuses personnes s'affairent.  Mais deux hommes se démarquent : de par leur ressemblance mais aussi leur gravité.

—    Majestés ! fait le soldat en les saluant tout en enlevant son heaume, l'attaque des palissades de la ville a commencé. L'ennemi a traversé nos dernières barrières et vaincu les charmes.

Des exclamations accueillent ses paroles parmi l'assemblée réunie dans la salle.

—    Silence ! fait le plus vieux des deux hommes.  Es-tu sûr de ce que tu me dis là, Serdac ?  Les charmes étaient quasiment invincibles pourtant.
—    Oui, Sire, je vous assure que je l'ai vu de mes yeux.
—    Nous n'aurons d'autres choix que de nous battre dans l'enceinte du Centre du Royaume.  Nos forces sont en place ?
—    Oui, le combat fait rage.  L'ennemi est fort, il possède des mages puissants.  La population est évacuée ou terrée dans les catacombes.
—    Qu'on fasse évacuer les gens le plus loin des combats. Que l'on fasse quitter femmes et enfants par les portes dérobées des marchés.  Qu'on m'apporte mon armure et...
—    Père, non !
—    Je dois être près de mes hommes.
—    Alors je t'accompagne.
—    Non, mon fils ! Toi, tu vas auprès de ta femme qui donnera la vie à mon petit enfant dans les heures à venir.