Chapitre 29 - La génération oubliée

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Un, deux, trois, quatre. Le destrier à quat'pattes.
Cinq, six, sept, huit. Nous arriverons plus vite.
Neuf, dix, onze, douze. Je te donn'rai une bagouse.

Un, deux, trois, quatre. Ne te laisse pas abattre.
Cinq, six, sept, huit. Ne prends surtout pas la fuite.
Neuf, dix, onze, douze. Je te donn'rai de l'arbouse.

Un, deux, trois, quatre. Loin dans ce pays blanchâtre.
Cinq, six, sept, huit. Galenn nous y a conduit.
Neuf, dix onze, douze. Je te donn'rai une perlouze.

Un, deux, trois, quatre. Plus tard, tous auprès de l'âtre.
Cinq, six, sept, huit. Nous arrêt'rons la poursuite.
Neuf, dix onze, douze. Je te donn'rai d'la binouze.

Sur l'encolure d'un des trois destriers qu'ils ont récupérés, les Shoof s'en donnent à cœur joie en reprenant cette fanfaronnade et en sautillant de tous côtés. Le tout se passe au grand bonheur des enfants qui ont pris place sur les trois bêtes qui les emportent sur la plaine blanche qui s'étire loin à l'horizon. La petite colonne de survivants, accompagnée des compagnons de Galenn, s'étire devant et derrière les petites créatures surprenantes qui font affluer les enfants tout autour des trois montures.

— Ils volent la vedette auprès des plus jeunes, remarque Galenn qui marche à l'arrière garde de la colonne avec Kalya.
— En effet, sourit la jeune femme. C'est une bonne chose pour les petits. Le chemin leur paraîtra moins long.
— Ils sont si peu nombreux, soupire le Guerrier.
— Il n'y en a que quatre sur ce continent et c'est nous qui avons la chance de les connaître.
— Quatre ? s'étonne Galenn avec un air surpris.
— Tu connais d'autres Shoof ?
— Oh ! Moi, je parlais des enfants. Il n'y en a que bien peu. Sur ce continent, les rescapés des Royaumes oubliés, dont celui des Trois Lunes, ont aussi oublié de construire l'avenir. Ils ont erré sur la terre aride et près des côtes depuis tout ce temps.
— Je comprend, rougit un peu Kalya. Ils n'ont pas construit de famille : c'est cela que tu veux dire ?
— Oui... et dire que moi, je m'exténuais à m'échiner dans des combats inutiles et sans valeur.

Le jeune bronzé baisse la tête un instant, cachant son visage sous ses longs cheveux. Il regrette tout ce temps perdu et toutes ses fausses illusions de bravoure et d'honneur. Sa hantise du combat et sa volonté d'éviter toute responsabilité envers autrui.
Face à son attitude si triste, Kalya prend la main de Galenn et croisent leurs doigts doucement.

— Galenn, murmure-t-elle. Tu ne peux pas juger de ta vie d'alors.
— Mais je fuyais. Je voulais me trouver loin de la vie que ma Breïss m'avait montrée. J'aurais tellement dû mieux écouter son enseignement.
— Tu n'étais qu'un gamin quand tu t'es retrouvé seul. Tu as survécu.
— Loin de la réalité en effet. Et, par la suite, en grandissant, je n'ai pas su m'intéresser à ce qui se passait en dehors de ma petite personne.
— Je ne suis pas mieux, avoue la jeune femme. J'ai quitté mon royaume sur le bord de la fin.
— Mais on t'avait rendu aveugle ! Tu étais seule. Sans souvenir.
— Comme toi.
— Mais, tu as réagis ! proteste le Guerrier en arrêtant sa marche et en la retournant vers lui. Tu as appareillé avec le Géant pour rallier les deux continents. Aider les survivants. Tu étais courageuse, entreprenante, audacieuse.... Moi, pendant ce temps, je me battais sans raison. Je tuais sans honte...
— Galenn, non !
— Si ! Je le sais maintenant, grince le Guerrier en retirant sa main, honteux.
— Mais tu nous a tous sauvé ! proteste Kalya, les yeux flamboyants. Tous ici, nous te devons la vie par ta bravoure, ta témérité et ton ingéniosité. Tu m'as ramené à ma vue, à ma vie et à mon ascendance. Nous sommes tous vivants et, toi et moi, nous allons reprendre nos Royaumes pour les protéger tous.
— Moi ? Mais c'est grâce aux Shoof, à Virko, aux Cavaliers et... toi.

Galenn - Le chemin des PierresHikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin