2(2/2)...pas innocente

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Leszeck ne me toucha plus. Il ne me regardait même pas. Il avait laissé un garçon me lier les mains d'une corde rêche. Quand il avait posé les yeux sur mes poignets liés, ses pupilles s'étaient dilatées et il s'était humecté les lèvres. J'avais rougis sur le coup, devinant sans mal ses arrière-pensées. Je n'étais pas innocente. A seize ans j'avais fais ma première fois avec mon petit ami de l'époque et j'avais recommencé quelques fois, pas toujours avec des garçons, pas toujours en duo. Mais le BDSM ? Jamais je n'avais osé tester. Et pourtant, vu le regard que me lançait Leszeck, j'aurai bien tenté le coup avec lui. Mais presque aussitôt j'avais formulé cette pensée que son regard perçant transperça le mien. Il détourna la tête. Et depuis plus rien.

Je me mordis l'intérieur des joues. Je ne devrais pas me questionner sur ça. Et pourtant quelque chose m'y poussait inexorablement. Cela revenait sans cesse, en boucle, comme un vieux disque rayé. A ma droite le garçon me jetait des coups d'œil, semblant vouloir me dire quelque chose. Je ne tournais pas la tête dans sa direction car lui-même semblait rester prudent. On marcha ainsi pendant deux longues heures avant de faire une halte en plein milieu d'une forêt. Le groupe de cinq hommes qui nous accompagnaient s'éloignèrent avec celui qui semblait commander ici. Avais-je vraiment besoin de préciser de qui il s'agissait ? Ils eurent donc une discussion animée mais que je ne réussis pas à percevoir. Leurs mouvements secs et les nombreux signes de négation étaient cependant largement suffisant pour que je comprenne que quelque chose n'allait pas. Mon angoisse remonta en flèche et le désir bourdonnant que je ressentais pour Leszeck fut balayé. Qu'est-ce qu'il se passait pour que des hommes brutaux s'inquiètent ? J'avais bien vus qu'ils n'avaient pas été à l'aise tout au long de la marche et qu'ils pressaient le pas jusqu'à me faire presque trottiner. Y-avait-t'il quelque chose qui nous poursuivait ? Il me semblait pourtant que dans cette région, il n'y avait pas de prédateurs vraiment agressifs envers l'Homme.

A moins que ce soit ce genre de prédateur qu'ils redoutaient. Mais ne formaient-ils pas un seul et même groupe ?

-Hey.

Mon sursaut fut bien plus parlant que le cri qui resta étouffé au fond de ma gorge pour exprimer ma peur. Le garçon me sourit doucement et tout à coup j'eus un pincement au cœur. Il n'était pas fait pour vivre ici. Il avait l'air bien trop gentil, trop doux par rapport aux autres.

-Excuse-moi. Je ne voulais pas te faire peur.

-D'accord...

-Est-ce que l'on t'as déjà expliqué ce que tu faisais ici ?

-Non. Pas encore. Je... Pourquoi n'as-tu pas eu mal quand tu m'as touché ? Tout le monde a toujours eu mal mais toi et l'autre femme et...

-C'est parce que je suis comme toi, répondit doucement le garçon. Je suis un changé.

-C'est quoi ?

-Nous sommes des demi-loups. Et en attendant notre maturité, notre corps nous défend contre ceux qui ne sont pas comme nous.

-Des demi-loups ? Mais c'est fou ! Ca ne peut pas exister ! Je veux dire...

-Baisse d'un ton ! il jeta un regard alarmé vers les hommes qui s'étaient calmés. Ici ce sont les loups-garous qui décident et toi, dit-il en me pointant du doigt, tu es précieuse. Les femelles manquent autant en louve qu'en demi-louve et tu sera vite mise dans le bain. Il n'y aura pas de pitié, tu tues ou tu te fais tuer, tu piétines les autres ou on te laissera crever dans la boue. Personne ne viendra t'aider à te relever. Comprends-le bien. N'attends pas que qui que ce soit vienne à ta rescousse. Personne.

Au fil de sa diatribe, la première impression que j'eus de lui se fit nuancée. Il s'était rapproché peu à peu et ses yeux, au départ bleus, devinrent noirs comme de l'encre. Je me reculais contre le tronc d'un arbre. Il n'était pas normal.

AsservissementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant