10(1/2) Echec et mat

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Bientôt tout se précipita. Bien trop rapidement après mon copieux repas, si je puis me permettre de le nommer ainsi -j'avais encore des morceaux de chaire crue coincés entre les dents- on vint me chercher. Une horde de loups puants qui ricanaient se présentèrent devant ma cellule. L'un d'entre eux était très calme et me regardait avec insistance, je ne comprenais pas pourquoi. On me fit sortir de là, sans me toucher.

Ils m'encadraient pour me diriger, je n'avais pas beaucoup de marge de manœuvre.

Le chemin qu'on me fit prendre m'était totalement inconnu. J'arrivais finalement dans une large pièce, bien plus chaude que le cachot où j'étais enfermée. Je laissais un soupir tremblant s'échapper de mes lèvres craquelées. Il y avait bon nombre d'armures, d'épées, de dagues et tout autres objets tranchants utiles pour tuer. Il n'y avait pas de bouclier en revanche. Il fallait être le plus meurtrier, être le premier à attaquer. Je voulais vivre pour mieux me venger. Je voulais vivre pour mieux mourir, l'âme en paix.

Le loup qui m'avait regardé étrangement s'approcha de moi et me fit avancer vers cet étalage d'armes létales. Il avait les cheveux rasés et des petits yeux marrons. Son aura m'effleura. Tout mon corps fut pris de frissons mais je me forçais à ne pas réagir, s'ils voyaient maintenant que je n'étais pas une simple Changée, ils pourraient m'éliminer sur le champ. Il fallait d'abord que je fasse au moins un combat, que la foule atteste de ma présence pour qu'ils ne m'échangent pas avec quelqu'un d'autre.

—Choisis ton arme. Tu as le droit à un seul tranchant et une seule protection corporelle pour tes cinq combats. Réfléchis-y, ta survie en dépend.

Je pris un petit poignard, la lame était extrêmement fine, délicate et pourtant solide. C'était de l'argent pur. De quoi tuer n'importe quel loup. Par ailleurs ceux qui m'entouraient encore s'éloignèrent de quelques pas en piétinant, incertains. Ils me regardaient du coin de l'œil, nerveux. Que savaient-ils ? Avaient-ils un doute ?

Je leur lançais un regard soupçonneux. Un mauvais pressentiment m'anima tout entière. Que se passait-il ?

Le rasé s'approcha de moi et me saisit le bras d'une poigne ferme. Aussitôt je m'arquais sous l'intrusion mentale, il me fouilla de fond en comble pour me trouver telle que j'étais réellement. Il me parla, d'esprit à esprit. Son loup murmurait en écho. Je ne compris qu'à moitié ce qu'il voulait me dire. Il était un loup appartenant à une meute alliée à Leszeck. Il avait pour ordre de me protéger. Révolte. Mon rôle était de distraire Irvan le plus longtemps possible. Je devais gagner et pour ça je devais tuer mais lentement. Je devais rester une Changée aussi longtemps que possible.

Tuer les loups. Maintenant.

Je ressaisis complètement la lame dans ma main et hochais de la tête. Il s'éloigna de moi et nous commençâmes notre manœuvre. Je tranchais la gorge du loup le plus proche. Des éclaboussures atteignirent mon visage, je clignais des yeux pour faire s'échapper celles qui me troublaient la vue. Il tomba à terre dans un borborygme intelligible. Le sang giclait en continu de la plaie, déversant une marre écarlate à mes pieds.

L'allié s'occupait de l'autre loup ou plutôt il jouait avec. Il s'amusait à lui disloquer à chaque fois un peu plus la mâchoire dès que l'ennemi s'approchait d'un peu trop près. C'était comme une danse avec un dominant et un moins que rien fou de rage. En plaine frénésie, le loup regarda autour de lui, il avait dû deviner qu'il n'aurait jamais le dessus sur son adversaire. Je me protégeais du loup ensanglanté qui voulut me déchiqueter en deux d'un coup de griffes mais le rasé le ressaisit aussitôt pour lui briser la nuque. Le jeu était finit.

—Tu as des alliés puissants, petite louve. Mais si tu ne sais pas te contenir, leurs efforts ne serviront à rien. L'Alpha Leszeck n'arrivera à rien si tu fais partir en fumée chacun de ses coups.

AsservissementWhere stories live. Discover now