LE PHŒNIX

Chapitre Quarante-Neuf - Mikaël

Iris lâcha la main de Mikaël, et un instant de panique le traversa. Que risquait-il d'arriver ? Est-ce qu'il devrait suivre ces... sorciers, s'il acceptait de se faire transformer ? Aurait-il des pouvoirs magiques ? Devrait-il, comme dans les films, dire au revoir à ses amis au risque de ne plus les retrouver avant un bon moment ? Il sentit ses dents claquer de nervosité. Qu'allait-il devenir s'il ne les suivait pas ? Était-ce même une option, de rester chez lui, bien au chaud ?

— Dépêche-toi de te décider, mortel, fit Aali de façon peu convenante.

— J'en sais rien, répondit le fêtard en grattant sa barbe naissante. Est-ce que je dois abandonner mes amis et ma famille ?

— Honnêtement, dit Léane, nous trois avons dû le faire. On sait pas combien de temps cette quête va durer, et on espère rejoindre nos proches le plus rapidement possible, mais pour l'instant, on ne peut pas. Mais il y a un moyen de veiller sur eux dans l'autre monde, sans pour autant être avec eux.

Elle soupira.

— Je suis désolée si tout ça est brusque, je sais vraiment pas comment m'y prendre. C'est difficile, et je n'ai jamais voulu de cette magie. Comme sur toi, tout m'est tombé dessus en une nuit. Littéralement.

— Est-ce que je peux refuser ? demanda Mikaël.

Le regard de la Chercheuse se fit fuyant.

— Je ne crois pas.

C'était la réponse qu'il redoutait le plus. Mais, s'il ne pouvait pas se défiler, pourquoi lui donnaient-ils le choix, dans ce cas ? Son cœur battit plus vite. Il était parfaitement conscient de ce qui risquait de se passer : Iris avait sous-entendu qu'elle avait été transformée de force, mais Léane ne semblait pas être quelqu'un de violent, ni têtu. Elle avait plutôt l'air réticente à tout ce qui se passait. Peut-être était-ce la raison pour laquelle Iris n'était pas fâchée contre elle ?

— Je... veux bien, dit-il avec une voix qui ne lui ressemblait pas.

— Vraiment ? s'étonna Léane. T'as pas pris le temps de réfléchir !

— Oui, bah d'habitude j'hésite jusqu'à ce que ce soit trop tard. Votre histoire, c'est du délire, mais si je dis non maintenant, je vais regretter plus tard. Et je sais qu'après ça, je risque de regretter d'avoir dit oui, alors fais-le tant que j'ai une once de courage en moi.

— Bon... je suis désolée, vraiment. Je sais que c'est pas fa—

— Dépêche.

Mikaël sourit tristement. La Chercheuse lâcha le bras d'Aali et souffla pour calmer les battements de son cœur. Elle tendit les mains à Mikaël, qui les prit. Juste avant qu'elle n'incante, il lui posa une question :

— Je suis la réincarnation de qui ?

— Vous avez des choses en commun, sourit Léane. Il aime les fêtes.

— Dionysos ?

Léane acquiesça et plongea ses yeux d'or dans ceux du brun.

— Mikaël, descendant de Dionysos, je te transmets tes pouvoirs. Reprends ce qui t'appartient, maître des plaisirs !

Une lumière orangée émana des deux personnes sur le lit et éblouit Iris, Narcée et Aali. Ce dernier voyant une transformation pour la première fois de sa vie ne put pas s'empêcher de garder les yeux ouverts, au risque de se faire mal. Mikaël et Léane luisaient autant que le soleil, mais Mikaël était beaucoup moins incandescent que la Chercheuse : elle flamboyait littéralement, comme si des flammes avaient pris possession de son corps. Le doré de ses yeux était devenu d'un orange éclatant, et les veines de sa peau étaient si luisantes qu'on les voyait sur tout son corps. Ses cheveux blond cendré étaient plus clairs, et les taches de rousseur sur ses joues et sur son nez ressortaient plus que d'habitude. On voyait presque du feu sortir d'elle pour entrer dans le corps du Descendant.

Celui ci se vit plus clairement lorsque la lumière s'atténua. À son tour, sa peau avait effacé tous ses défauts, et son visage était dessiné avec moins de traits carrés. Ses yeux d'un brun bleuté étaient devenus complètement bleus et ressortaient sur sa peau basanée. Ses cheveux noirs étaient un peu plus longs, et une couleur nouvelle s'était ajoutée : une mèche violette foncée les traversaient sur le centre du crâne. Et si sa barbe naissance était toujours présente, elle ne ressortait pas particulièrement de son visage. 

En fait, il ressemblait à un alcoolique. 

Certes, un alcoolique divin, mais tout de même. Pas très séduisant, pensa Iris. Soudain, alors que la transformation venait de se terminer, un bruit à l'extérieur de la maison se fit entendre. Tous se pétrifièrent.

La température changea soudain, baissant considérablement. Tous se mirent à grelotter, en se tenant les bras. Mikaël resserra sa couverture contre lui et claqua des dents. Du givre commença à se former sur la seule fenêtre de la chambre, et se propagea rapidement à l'intérieur de la chambre. Le sol, les murs et le plafonds se couvrirent de givre, se transformant sans attendre en glace sous les yeux écarquillés de tous. Iris et Narcée éternuèrent, et Léane reprit ses esprits à ce moment-là.

— Aali ! Il faut qu'on retourne dans l'autre monde, fissa !

Le fils de Morphée cligna des yeux, et hocha la tête vivement. Il tenta d'atteindre Narcée, le plus proche de lui, mais se résolut à tendre le bras, faute de trébucher à cause du givre et des chaussures. Narcée lui agrippa le bras, et tendit la main à Iris, près du lit, pour la propulser vers l'autre bras d'Aali, qui l'attrapa avant qu'elle ne tombe. Léane et Mikaël sortir du lit, couverture sur les épaules du Descendant, et se tinrent les mains le plus fort possible. La Chercheuse se pencha vers Narcée, qui les fit glisser doucement vers Aali. Léane dit à Mikaël de toucher un des bras du fils de Morphée dès qu'il fut assez proche, et elle fit de même.

Aali bascula en arrière dès que tout le monde l'eut agrippé, et ils disparurent avant de glisser sur la glace.