La première femme

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Thème (approximatif) : Vous êtes employé par une société de haute technologie pour un travail top secret : vous devez veiller sur le tout premier prototype d'androïde


A mon réveil elle me regardait, assise sur une chaise, le dos droit. Je me redressais sur les coudes, m'enfonçant un peu dans le lit de camp rudimentaire. Elle pencha la tête sur le côté pour m'observer, curieuse. Ce simple geste fit glisser de son épaule ses longues mèches blondes et mon regard les suivit. Je me demandai en quoi elles pouvaient être faites, ces magnifiques mèches dorées. Etait-ce du cheveu humain ? De la fibre synthétique ? L'envie de les effleurer s'immisça en moi l'espace d'une seconde avant de disparaître. Je m'assis face à elle et choisis d'entamer la conversation, pensant qu'elle ne le ferait probablement pas.
« Bonjour, je m'appelle Eve. »
Un mince sourire, presque amusé, se dessina sur son visage et elle me répondit avec fluidité :
« Bonjour, moi je suis Lucy. »
Je souris intérieurement, pas très originaux ces ingénieurs, mais pourquoi pas.
« Tu es réveillée depuis longtemps ?
-Non, une minute. Je t'attendais. »

J'hochai la tête et parcourrai la pièce des yeux. Deux lits de camp rudimentaires, et un intérieur classique de salon. Les chercheurs avaient placé par endroits divers objets du quotidien pour créer un environnement au plus proche des conditions d'exercice des futurs homologues de Lucy.

Je devais passer 6 heures avec elle, ensuite j'aurais une pause de quelques heures, le temps pour elle de se recharger et pour moi de livrer les données recueillies sur elle, et je la rejoindrais à nouveau dans cette cellule de tests. Ce manège durera pour une durée encore inconnue. Lucy était un androïde, le premier de sa génération. Un bijou de technologie au service de l'Homme.

Et en l'observant à nouveau je fus prise d'un vertige malgré moi. Tout ce qu'elle dégageait était humain. Rien en elle ne l'était. Elle gardait posés sur moi ses jolis yeux bleus emplis de curiosité. Elle n'était qu'un programme, une coquille vide que des hommes en blouses avaient été chargé de combler avec des lignes de code. Pouvait-elle penser ? Comme moi ? Et en m'observant, comme je le faisais, que voyait-elle ? Reconnaissait-elle en moi une semblable ? Une supérieure ?

Son regard dévia vers un jeu de cartes posé sur l'unique table de la pièce et elle me sourit en le désignant du doigt :

« Tu veux jouer ? »
J'hochais la tête mécaniquement et la rejoignis lorsqu'elle s'assit. Je saisis le jeu entre mes mains et mélangeai les cartes sans la quitter des yeux. Elle restait focalisée sur les cartes, observant mes mains expertes les mélanger à grande vitesse. Me trouvait-elle impressionnante ? Pouvait-elle faire la même chose ? A quelle vitesse allait-elle l'apprendre ? Quoiqu'elle eut pensé à cet instant, je sus que je me souviendrais toujours de son regard lorsqu'elle releva les yeux vers moi : Il était empli d'admiration et une braise rougeoya au creux de mon ventre, y répandant une douce chaleur.

Le temps passa dans notre unique pièce sans que je puisse vraiment le suivre. Toutes les 6 heures une petite lumière rouge s'allumait au plafond et, selon la procédure, nous allions nous allonger sur nos lits respectifs et nous fermions les yeux. Au bout de quelques minutes, une infime décharge électrique m'indiquait que je pouvais me lever et sortir. Je rejoignais alors une assistante de laboratoire. Une femme acariâtre, qui se refusait à toute familiarité avec moi, à toute humanité. Chaque fois c'était la même chose, elle me faisait allonger sur un brancard et me posait un bracelet dont le métal me faisait toujours frissonner malgré l'habitude. Son but, si j'avais bien compris, était de récupérer toutes ce qui avait pu me traverser l'esprit durant mes échanges avec Lucy et toutes mes sensations physiques. Mais ce recueil était épuisant et me laissait dans un état second pour mon temps de repos. J'étais ensuite ramenée à la salle de test où je m'installais sur mon lit, attendant que Lucy se réveille, rechargée.

Participations au concours d'écriture de TiboudouboudouCWhere stories live. Discover now