XI

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On est en fin d'après-midi, l'unité est postée toujours au même endroit, attendant que la nuit tombe. Ils doivent avoir des crampes et des fourmillements à force de rester longtemps dans la même position, sans bouger. Mais ils n'ont pas vraiment d'autre alternative. 

Enfin, deux heures plus tard, la nuit fait son apparition. Je vois leurs muscles se tendre sous leurs uniformes, prêts à l'attaque. Une vague d'adrénaline prend possession de mon corps et me fait lâcher ce mot.

- Maintenant.

D'un même mouvement, comme s'ils ne partageaient qu'un seul cerveau pour six corps musclés et surentraînés, ils se lèvent et descendent la pente discrètement. 

A droite, à gauche, tout droit, encore à gauche, ils dépassent plusieurs tentes, mais aucune pour l'instant n'abrite Marcola. 

Et puis finalement, là voilà. Plus imposante que les autres, plus grande en superficie et en hauteur, d'une couleur de boue qui s'accorde parfaitement avec le sol terreux. Jimin fait signe à Cowell et Smith d'un geste de la main de se poster de l'autre côté de la tente. Soudain, deux gardes -armés bien sûr- surgissent de nul part et marchent d'un pas rythmé. Merde. Il s'avancent, ils sont de plus en plus proche et s'ils font quelques mètres de plus, l'unité sera en plein dans leur champ de vision. Jimin les a vu aussi, mais que faire? Je le vois se coller contre le tenture marron, immédiatement imité par sa petite troupe. 

Les gardes passent sans s'apercevoir de quoique ce soit, mais on sait tous que ce n'est pas passé  loin. Si quelque chose tourne mal, ils sont seuls. Si je regarde les images satellites affichées sur l'écran à la gauche de celui qui montre les différentes caméras de l'unité, les renforts les plus proches sont à trente kilomètres de là. Une trentaine de minutes s'ils roulent vite. 

- On devrait appeler les renforts dès maintenant.

Julian se tourne vers moi avec une telle rapidité que dans son élan, il frappe avec sa veste un employé assit tranquillement à son bureau. Mais il s'en fiche, ne l'intéresse que ce que j'ai dit.

- Pourquoi faire une chose pareille? On ne mobilise pas l'armée comme bon nous semble, Campbell. 

- Ils mettront trente minutes à venir s'il y a un problème. 

- Campbell, écoutez-moi, tout va bien se passer.

- On n'en est pas sûrs! 

Je suis énervée. Frustrée qu'il ne comprenne pas l'urgence que je ressens maintenant. On ne peut rien prévoir et cette confiance en soi va nous mener à notre perte un de ces jours. Et le fait que nous sommes américains ne nous sauvera pas. Ce n'est pas une carte qu'on peut dégainer à toutes les sauces. Ce n'est pas un jeu. 

- Qu'est-ce qu'il se passera si Ji-... s'ils sont pris en otage, hm? Je refuse. Ils sont sous ma responsabilité. Pas la vôtre. C'est moi qui décide, quand ça le-... les concerne. 

Je prie pour qu'il n'ait pas remarqué mes lapsus, mais même s'il s'en est rendu compte, il passe au-dessus. Après quelques minutes de réflexion pendant laquelle l'unité attend mes ordres, Julian examine toutes les possibilités. Puis me concède finalement que je n'ai pas tort. Je sais bien. Si j'ouvre ma bouche, c'est pas poure dire n'importe quoi. Je réfléchis, sans vouloir paraître hautaine et supérieure. 

- Continue ce que tu faisais avant que les gardes n'arrivent. Tu es sur le terrain, je ne peux plus trop décider pour toi, maintenant, je fais à l'intention de Jimin. 

D'un geste de la main, je fais signe à un agent d'appeler les renforts depuis la ligne directe avec le camp le plus proche. 

Le blondinet envoie donc Moore et White à l'arrière de la tente alors que Brown, Smith, Cowell et lui, d'un commun accord, pointent leurs armes devant eux et pénètrent dans la tente sans une once d'hésitation. J'admire leur courage, mais j'ai peur. Peur parce que Jimin est en première ligne et que je suis trop loin pour lui porter secours. S'il se passe quelque chose, je serais impuissante face à sa situation. 

Mais tout va bien se passer, parce que c'est Jimin. Et que Jimin est invincible. Immortel. J'en suis persuadée. 

Lorsqu'ils entrent dans la tente surdimensionnée, les hommes présents en sont les premiers surpris. Ils devraient faire évoluer leurs systèmes de sécurité. Ca me paraît presque trop facile, mais il faut croire que les compétences extraordinaires de Jimin et son unité font cet effet-là. 

Une quinzaine de minutes et de nombreuses luttes plus tard, tout le monde est neutralisé. Et je peux enfin respirer un bon coup. Tout est terminé, l'unité va bien, Jimin va rentrer, il sera à mes côtés demain. 

Une fois dans l'avion qui est censé ramener l'unité aux Etats-Unis, alors que je suis toujours connectée aux militaires, j'entends le blond chuchoter ces mots contre son petit micro, la moitié de sa tête cachée dans son épaule et sa tenue. 

- Je tiens toujours mes promesses.

***

- Comment va ma très chère amie? me demande le blondinet lorsque, à l'aéroport militaire, je lui saute dans les bras. 

Son odeur mélangée aux parfums de la terre et de la transpiration me rassure étrangement. Il est réel. Cet homme que je ne mérite pas est réel. Et il protège la nation des menaces extérieures. Quoi de plus noble? Et dire qu'il a honte de ce qu'il est... 

Ses bras s'enroulent autour de moi, me pressant contre lui, et pose sa petite tête sur mon épaule. 

- Tu m'as un peu manqué, m'avoue t-il et je ne peux regarder son expression, mais je devine qu'il fait son petit sourire en coin. 

- Moi peut-être un peu aussi. 

Je me détache de son corps chaud et réconfortant puis m'empare de son sac à dos qui a l'air de lui peser une tonne sur les épaules.

- Arrête, repose ça. Tu vas te briser le dos. Je reviens de mission, je ne suis pas handicapé.

- Mais tu es fatigué.

Et ça, il ne peut le nier. Les cernes sous ses yeux parlent d'eux-mêmes. Il se contente de lever les yeux au ciel et de me suivre à travers l'aéroport jusqu'à ma voiture noire. Une fois installés, je lui demande son adresse histoire de la rentrer dans le GPS.

- Et si on allait chez toi? lance t-il l'air de rien en regardant la ville à perte de vue par la fenêtre. 

Je souris, contente qu'il l'est proposé. 

- Bien sûr. 

Pinky Promise -J.PKWhere stories live. Discover now