Pinky Promise -J.PK

XIII

Je suis si triste. Je ne veux pas de cet homme. Je veux Jimin. Me fiancer à un parfait inconnu, juste parce qu'il est riche... Il y en a que ça aurait enchanté, mais je n'en fais pas partie. Et mon père le sait très bien. C'est pour ça qu'il le fait. Quelle autre raison il aurait eu? 

Mes sanglots m'étouffent et mes mains me font mal à force de serrer les draps entre mes poings. Mais je ne sais pas quoi faire d'autre. Pleurer est la seule chose qui me persuade que j'ai encore un peu de contrôle sur la situation. Ce qui est totalement faux, au passage. C'est fini. Ma vie en tant que Phoebe Campbell est désormais terminée. Je suis maintenant Phoebe Hall. J'ai beau me dire que c'est peut-être un gentil garçon, rien n'y fait, ça me pétrifie toujours autant. 

Il faudrait peut-être que je me batte pour mes principes ainsi que la suite de ma vie, mais ça serait vain. Mon père n'est pas du genre à changer d'avis. C'est une vraie tête de mule. S'il dit quelque chose, bonne chance à la personne concernée pour esquiver l'ordre. Père ne fait pas dans les compromis. Il décide, tu obéis. Simple et efficace. 

A quoi bon devrais-je continuer à vivre? Je sais déjà comment ma vie va finir. Il n'y aura aucune surprise. Un mariage prestigieux avec ce Joshua, de célèbres invités, puis une villa beaucoup trop grande pour deux dans laquelle il me suppliera d'avoir un, voire plusieurs enfants. Ou alors son père lui aura dit qu'il veut des petits-enfants? Quelque chose me dit que mon père et le sien ne sont pas si différents. Voilà peut-être un point commun, mais ça doit être le seul. 

Sans vraiment me rendre compte de mes gestes, mes draps froissés et humides de mes larmes, j'attrape mon téléphone. Je clique sur le seul numéro que je pourrai appeler à une heure pareille.

Il décroche finalement, d'une voix ensommeillée.

- Phoebe, je pense qu'il faut que j'arrête de te parler quelques temps.

- Non, attends, Jimin... 

- Tu pleures? Phoebe, qu'est-ce qu'il y a?

- Mon père, je- 

- Qu'est-ce qu'il a fait?

Mais je n'arrive pas à continuer. Penser à ce que je vais devoir subir dans les prochains jours est dur, mais essayer de le formuler à voix haute l'est d'autant plus. Je continue de pleurer, incapable de m'arrêter. 

- Hé, je suis là, maintenant. Chut... me chuchote Jimin. Est-ce que tu veux que je vienne?

- Oui, je fais faiblement.

Une fois que j'ai décroché, je me dirige vers ma porte d'entrée et la déverrouille, puis retourne m'allonger sur mon lit. Quelques minutes plus tard, le grisé débarque dans ma chambre, amenant par la même occasion un courant d'air frais mêlé à son odeur d'assouplissant. Son visage porte encore des traces de sommeil et ses cheveux gris sont emmêlés. Il s'allonge près de moi puis passe un bras autour de mon corps pour me rapprocher. Le grisé appuie son front lisse à la peau toute douce contre le mien, me caresse les cheveux et me répète en boucle que tout va bien aller. Mais comment pourrais-je le croire? Il ne connaît même pas la moitié de la situation. 

- Phoebe, me murmure t-il à l'oreille après que je lui ai raconté rapidement la situation. Mes sanglots se font plus fort lorsque je réalise que tout ça est bien vrai. Tu es trop jeune pour être blessée. Tu es trop jeune pour avoir une telle pression sur toi. Tu es trop jeune pour que ton coeur se brise. Tu es trop jeune pour être fatiguée de ta vie. Respire, mon ange. Tout va aller pour le mieux. 

- Je ne veux pas, Jimin. C'est horrible. Je ne le connais même pas... 

- Mais tu vas apprendre à le connaître. C'est peut-être une personne formidable. Ce n'est pas parce que son père est une ordure que lui en est forcément une. La preuve? Regarde-toi. Ton père est horrible, mais toi, tu es magnifique. 

Je relève mes yeux vers lui, touchée de ses mots. Mes larmes s'arrêtent petit à petit, ma respiration se calme, mes poings se dessèrent. 

- S'il te plaît, ne me refais pas le coup de hier, dans la voiture. 

- Phoebe... 

- Non. Tais-toi. Je ne te demande qu'une seule chose, de ne pas me laisser sous prétexte que tu es une mauvaise personne.

Je place mes mains en coupe autour de son visage aux traits enfantins et plante mon regard dans ses yeux bruns. 

- Promets. 

Il me sert un peu plus dans ses bras, me collant à son torse recouvert d'un sweat-shirt noir. 

- Je te promets, Phoebe Campbell, que je resterai à tes côtés tant que je serai vivant. 

Je lui tends mon petit doigt et, tandis qu'il esquisse un sourire sur ses lèvres, entrelace son petit doigt à son tour. 

- Allez, dors maintenant, reprend t-il. 

Il remonte la couverture jusqu'à mon menton et embrasse mon front avec délicatesse. 

***

La première chose que je vois lorsque je me réveille est l'écran de mon téléphone qui s'illumine d'une nouvelle notification. Je tends la main difficilement vers lui, le déverrouille et découvre un message de mon père. Il contient les coordonnées du restaurant, le jour et l'heure. Pas un mot de plus, juste ces quelques informations. Même pas un "bon courage" ou "je suis fière de toi". Même une critique de sa part aurait été mieux que rien. Là, j'ai juste l'impression d'être un simple pion sur son échiquier du pouvoir, et je détestes ça. 

- Rendors-toi, mon ange. Il est que cinq heures du matin. 

Je pousse un soupir lasse et me rallonge. 

Des heures plus tard, le soleil perce les rideaux noirs épais de ma chambre et ses rayons viennent nous réchauffer, jusqu'à nous réveiller. Le bras du petit grisé repose sur mon corps tandis que sa petite bouille est enfouie sous les draps et les oreillers. Il entrouvre les yeux lorsqu'il me sent m'agiter dans le lit.

- Quand est ton rendez-vous? me demande t-il d'une voix rauque.

- ... Aujourd'hui, je dis à contre-coeur. 

Je n'ai pas envie d'y aller.

- Pour ce midi ou ce soir?

- Ce soir. 

- Où ça?

- Minibar, je lève les yeux au ciel. C'est ridiculement cher. 

- T'auras un repas gratuit, c'est cool! 

Il essaie de m'aider à voir le bon côté des choses, mais rien à faire, j'ai envie de pleurer et de crier en même temps. Je ne veux pas y aller. 

- Je t'y conduirai si tu veux. 

- Merci Jimin.