Bonus 4 - Le fantôme du lac (3)

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Cléore 

Le lendemain, nous nous réveillions dès l'aube afin d'aider la dame du lac. Une heure après, nous étions prêts à partir à la recherche de la broche. Quelques mètres à peine après les premiers foulées, elle apparut dans la même tenue de cour avec laquelle elle s'était volatilisée la veille. 

Elle me lança un petit sourire et je devinais qu'elle devait être proche de la trentaine avant sa mort. Elle était vraiment jolie, elle détenait une grâce dans sa démarche que seuls les gens ayant vécu au XVIIIème siècle devait fréquenter. Je tournai la tête vers Raphaël et ce-dernier me lança un regard rassurant et bien sûr comme à chaque fois j'étais émue de constater qu'il me faisait confiance et qu'il était toujours auprès de moi. 

- Ce jeune homme vous aime éperdument, cela va sans dire, murmura la défunte, avec une gentillesse non dissimulée. 

J'acquiesçai en rougissant. 

- Je suis désolée pour... ce qui s'est passée sur le lac, répliquai-je, en prenant la main de mon amoureux.

Elle ralentit son parcours afin de flotter à ma hauteur. 

- Moi aussi. j'ignorai que ma cousine avait manigancé une fin aussi horrible à mon égard, par jalousie. Mais peu importe, c'est du passé et il y a bien longtemps qu'elle est morte aussi et qu'elle a été jugé pour ses méfaits. J'étais présente à ce funeste moment et j'ai vu de la peur dans ses yeux quand elle m'a reconnue. Je lui ai pardonné avec le temps mais la broche, elle, doit revenir à quelqu'un de ma famille à cette époque-ci. C'est une broche qui se passe de génération en génération. J'avais une soeur qui a eu des enfants et ces-derniers, ont une descendance qui a perduré. Je me dois de la transmettre à cette jeune fille. Elle s'appelle Hélène et a 23 ans. Elle connait mon histoire, on la lui a raconté. Elle sait aussi la possible existence de cette broche qui m'a appartenue, elle saura que cela vient de moi et elle pourra comprendre d'autres choses encore, nécessaire à son épanouissement dans sa vie. 

J'expirai longuement suite à ces révélations. Elle avait attendu tellement de temps en ce monde pour trouver un médium afin de pouvoir aller en paix ensuite... toute sa famille était déjà passée de l'autre côté mais elle non, à cause d'un objet précieux auquel elle était toujours attachée. C'était trop triste. J'avais raison de l'aider.

- C'est ici. 

Elle pointa son doigt transparent sur un immense arbre devant nous. Je fis signe du regard à Rapha que nous étions arrivés. Il s'arrêta et attendit.

Tant qu'à moi, j'avançais lentement vers l'écorce suivie de près par l'esprit. Puis, je commençais à fouiller, à pousser des petits branchages, des feuilles, avec des gestes rapides. Soudain, je me figeai : là, un peu ensevelie sous la terre se trouvait une magnifique petite broche sertie de pierres précieuses. Je lançai un regard de triomphe à la défunte et elle fut heureuse, ensuite à Raphaël qui me sourit chaleureusement.

- Enfin... murmura-t-elle, en joignant les mains vers moi, en signe de reconnaissance. Merci vraiment Mademoiselle pour ce que vous avez fait pour moi. Je vous ai écrit l'adresse sur un bloc-note que j'avais aperçu dans votre demeure : il vous suffira juste de l'envoyer, accompagnée d'une lettre que j'ai glissée aussi à cet endroit.

- Vous pouvez écrire ? demandai-je, étonnée, pensant que c'était moi qui allais le faire.

- Bien sûr, répondit-elle en souriant. J'ai l'énergie pour cela, même si au départ on ne sait l'utiliser; mais ces années à errer m'ont permis de m'adapter et de découvrir mon moi spirituel et l'énergie de mon âme. C'est cela qui m'a aidée à tenir un stylo et à écrire "normalement", si je puis dire ainsi...

Je revins vers Raphaël et lui tendis la broche en lui expliquant tout ce qu'elle m'avait raconté. 

- Nous devons le faire au plus vite afin qu'elle puisse aller paisiblement, déclara-t-il, en regardant autour de lui.

Certes, il ne pouvait la voir mais elle si. Elle alla vers lui et baissa la tête en guise de gratitude.

- Elle te remercie pour ta prévenance. 

Il fut un peu gêné car il avait réalisé davantage sa "réalité" je pense.

Nous rentrâmes au bungalow et tout fut comme elle avait décrit : la lettre et l'adresse. Nous préparâmes un colis  pour cette fameuse Hélène : on enveloppa la broche dans du papier bulle (après l'avoir nettoyé bien sûr) et mis la lettre à côté. Puis, on se rendit dans un centre postale le plus proche et le colis fut prêt à être expédié par la suite. 

- Quelle aventure ! s'exclama Raphaël, de retour, à la fin de notre mission. 

- Oui mais je suis heureuse d'avoir pu aider cette dame du lac : maintenant elle pourra partir en paix et quitter ce lieu où elle a perdu la vie. 

- Je t'aime tellement, dit-il en me prenant dans ses bras. Tu es vraiment courageuse et généreuse. Merci de partager tout ça avec moi. 

Je le serrai davantage contre moi et, tout à coup elle réapparut, vêtue d'une robe à couper le souffle. Elle était lumineuse et radieuse, comme une princesse de conte de fée. 

Elle était éclatante et sereine et nous observâmes avec une certaine douceur.

- Vous êtes faits l'un pour l'autre, asséna-t-elle, en nous regardant tour à tour. Mais, Cléore, fais attention : un amour aussi pur éveille un coeur noir de jalousie à proximité. Prends garde à toi, à vous deux... Et encore merci pour tout. 

Sur ces paroles à la fois énigmatiques et bienveillantes, elle disparut pour de bon.

- Elle est partie ? me demanda-t-il, après avoir remarqué ma réaction alerte.

- Oui. Mais...

- Quoi ?

- Je sais pas... Elle m'a dit qu'on devait faire attention après avoir déclaré qu'on était faits l'un pour l'autre...

Il caressa mes cheveux.

- Elle voulait sans doute dire de prendre soin de nous, tu ne crois pas ?

- Je ne sais pas, hésitai-je, en me blottissant contre lui. Elle a dit : "un amour aussi pur éveille un coeur noir de jalousie à proximité".

Nous nous tûmes, en réfléchissant à ces mots.

- Peu importe les gens, la jalousie, ou tout ce qui peut arriver à l'avenir, tant que tu es là, près de moi, je pourrais y faire face, dit-il le regard flamboyant. 

- C'est ce que je pense et ce que je ressens aussi. 

On continua à se câliner et malgré cette paix familière qui me traversait lorsque j'étais proche de lui, je sentais aussi dans mon coeur un danger proche, un pressentiment qui s'était éveillé face à la mise en garde du fantôme du lac. 

***

Hey, qui a la référence ? Merci d'avoir lu les trois parties de ce bonus. Je vous souhaite de bonnes fêtes de fin d'année en compagnie de vos proches. L.

Murmures (E-BOOK dispo)Where stories live. Discover now