Murmures (E-BOOK dispo)

~*13*~

PDV Cléore

Les jours avaient passé depuis la fête. Je repensais souvent ma petite "discussion-dispute" avec Raphaël et j'avais un peu honte parfois de lui avoir crier ce que je pensais  de lui et de son point de vue sur moi mais je n'arrivais pas à le regretter. 

On se voyait au lycée avec la bande mais on limitait nos échanges le plus possible. Jason faisait comme rien ne s'était passé depuis la soirée et je tentais d'effacer cette trace de brutalité que j'avais ressenti chez lui. 

Lily et moi devenions très amies et nous sortions souvent ensemble en dehors du lycée. Je me sentais mieux qu'avant mon arrivée ici, le pentacle était toujours autour de mon cou. 

Je tenais à distance les murmures mais je sentais la présence de mon grand-père près de moi. Parfois j'avais envie de lui demander ce qu'il s'était passé avec Papa mais je me ravisai. Je devrais peut-être lui demander directement à mon père...

Même si je mettais une barrière avec les esprits, je savais que ce n'était pas le meilleur moyen de vivre mieux. J'avais ce don, c'était pour les aider mais... j'ignorais comment faire, j'avais peur de me confronter à eux. 

Surtout à une fille en particulier.

Lorsque j'allais dans les toilettes du lycée, elle me fixait toujours dans le miroir. Toujours avec cet air triste mais ses prunelles grises étaient lourdes de gravité. Comme si elle me reprochait mon indifférence. 

Mais aujourd'hui j'allais l'aider.

Je profitais d'une heure de libre dans la journée afin de pouvoir lui parler. Elle me faisait de la peine, elle me touchait davantage que les autres...

En rentrant dans les toilettes, je sentis l'air se rafraîchir brusquement comme à l'habitude.

Je me postai dans le miroir, inspirai bruyamment puis proclamai :

- Salut, je suis Cléore et j'aimerais te voir pour te parler.

J'attendis qu'elle surgisse. J'eus une pensée comme dans les films où les portes claquent, les lumières s'éteignent mais il n'en était rien de tout ça... Elle apparut, sans éclat et sans bruit.

Je sursautai en la voyant.

Elle mit son index sur sa bouche pour m'intimer le silence puis chuchota :

- T'en as mis du temps... J'aimerais te faire payer pour l'attente mais j'ai besoin de ton aide...

- Pourquoi ?

- Tu ne sais pas ce qui s'est passé, ici, dans ses toilettes...

- Dis le moi, si tu es toujours coincée ici c'est que tu n'es pas en paix.

Elle eut un petit rictus.

- Cléore... je suis morte ici.

Je pâlis d'effroi.

- Il y a plus d'un an maintenant, reprit-elle en murmurant. J'étais comme toi avant tu sais ? Et voilà comment ça s'est terminé pour moi... Tu comprends ?

Mon cerveau bouillonnait. Que voulait-elle insinuer ? 

- J'en ai trop dit pour aujourd'hui... Tout le monde porte un masque... Parfois pour cacher le bon... ou le mauvais !

Elle disparut soudainement. Sidérée, je mémorisai ses paroles. Elle était lycéenne mais quelque chose de grave lui était arrivé et je devais savoir ce que c'était. 

* * * 

PDV Raphaël

J'en avais marre de tout. Cette colère en moi était devenue constante depuis cette soirée merdique ! 

On s'évitait. Ses yeux me fuyaient. Ses paroles détenaient trop de légèreté lorsque l'on se parlait avec la bande. Je lui étais si indifférent que ça me mettait dans un état pas possible.

Alors que je devrais m'en ficher... 

Bien évidemment, le seul cours où on était ensemble tout le monde était le cours de Théâtre. J'aimais bien sauf les exercices tactiles. Surtout quand il fallait se faire des câlins ou masser l'autre. Oui, assez dément cette matière. Puis, maintenant que Cléore avait rappliquer j'aimais encore moins ces exercices.

Quand elle était dans les bras d'un mec. Ou qu'on puisse la toucher, l'effleurer.

Je devenais dingue. Ces réactions m'étaient étrangères...

J'avais peur de me confronter à la vérité. De me retrouver face à moi-même, sans pouvoir me cacher.

J'avais l'impression de l'être quand elle était en face de moi. Comme si elle voyait à travers moi. Et moi à travers elle. J'aimerais tellement...

La voir.

Lui parler.

La... toucher.

J'aimerais... lui parler normalement. Mieux la faire sourire.

J'aimerais... compter pour elle...

Voilà...

Voilà ce que je ne devais pas penser...

Au contraire, devant elle, je jouais également l'indifférent.

Cela voudrait dire... et si elle jouait elle aussi ? Si... elle s'était mise en colère contre moi c'était parce que ça l'avait blessée. Que je ne lui parle pas, que je l'évite... Sinon, elle aurait réagi calmement.

Il fallait que je vérifie cette théorie.

Je ne voulais plus la fuir. Vraiment. Il fallait que j'aille de l'avant, que j'affronte la douleur, la souffrance...

Elle ne reviendrait plus. Je ne pouvais plus me cacher désormais... 

Je pouvais utiliser mon portable pour me rapprocher délicatement de Cléore...

Je réactivais mon facebook et lui demandai en ami. Bon, un peu lâche comme première action, mais je comptais sur les mots écrits afin qu'on s'apprivoise elle et moi.

Qu'elle me fasse confiance. Pour que je lui fasse confiance.

Et pour que je sache ce qui s'était vraiment passé à la soirée...