28 | Corpus

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RAVEN

À ton tour, m'incite-t-il.

Je lutte contre l'envie de dormir tandis que je suis allongé les poings fermés dans le lit de Cassian.

J'adore sa chambre. J'y passerai plus de temps à l'avenir. Contrairement à celle d'Ivan, elle est plus petite certes mais plus personnelle aussi. Les murs sont décorés de posters du côté de Cassian et remplis de photos du côté de Cade.

Ce qui m'a pas mal surprise. Je pensais le contraire.

Je regarde le plafond et réfléchis à quelque chose que je pourrais raconter. Depuis plusieurs heures on tue le temps en se racontant des petites histoires de nos années d'adolescence.

- Ivan et moi on a toujours été dans la même classe. C'était le garçon que tout le monde aimait. Il était drôle, gentil et cherchait à voir le bon chez tous. Chez moi aussi... Un jour il a plu très fort... Et j'étais en train de geler.

Comme si je revivais la scène, un frisson me traverse le long du dos. Je suis vraiment fatigué...

- Après quelques minutes, une silhouette est apparue à côté de moi et sans que je ne lui demande, Ivan a posé son manteau sur mes épaules. On avait seulement dix ans. Je l'ai envoyé balader un nombre incalculable de fois mais il ne m'a jamais lâché. J'ai fini par l'accepter. Et on est devenu inséparable.

Je rigole en racontant tout ça mais au fond, je sais que c'était le seul qui m'a vraiment comprise. Le seul à ne jamais m'avoir jugé ou avoir eu peur de moi sous prétexte que je devais aller voir un psychiatre pour me soigner.

Cassian pouffe à côté de moi mais je ne prends pas la peine d'ouvrir les yeux malgré mes sourcils froncés.

- Tu me parles de lui comme un chevalier blanc avec son épée d'argent. J'ai du mal à l'imaginer comme ça mais j'ai trop peur de toi pour remettre en question tes paroles.

Je pouffe à mon tour en me tournant vers lui.

- C'est à toi, murmurré-je en me forçant à rester éveillé.

Quand je n'entends rien pendant un long moment, j'ouvre un œil pour le voir en train de fixer le plafond, une larme coulant sur le côté de son visage.

Je referme les yeux comme si de rien n'était attendant patiemment qu'il prenne la parole. Le bruit de sa lourde respiration me montre qu'il se calme pour ne pas craquer. Et j'en conclut donc que l'anecdote se portera sur Cade.

- Dans notre ville, il y avait une salle de sport abandonnée... Cade y passait le plus clair de son temps. Il séchait et s'entraînait pour pouvoir passer chez les pro...

Je le sens bouger et lui aussi se tourner face à moi. Son souffle chatouille mon front.

- Tu ne t'ai jamais demandé à quoi étaient dues toutes ses cicatrices ? Ou pourquoi il ne me ressemblait pas ?

Sa voix était suppliante... Comme s'il m'implorait d'avoir remarqué ces différences.

Et c'était le cas. Bien sûr que j'ai remarqué. Mais je choisis de ne pas le lui dire. Je voulais qu'il me l'explique de lui-même.

- Tout le monde a des cicatrices... Et je ne me suis jamais posé la question tout simplement parce que tous les jumeaux ne se ressemblent pas forcément.

Il semble hocher de la tête l'air de comprendre. Une forte inspiration prend possession de lui alors qu'il annonce enfin :

- Il a été brûlé au premier degré....

Je ne suis pas vraiment surprise quand il me dit ça. Pourtant mon coeur se serre... Cade tient toujours ce rôle d'homme froid et détaché alors qu'il a sacrifié son corps pour son frère.

IGOR Donde viven las historias. Descúbrelo ahora