Le Don d'Ana - Tome I - L'Apprentie Élue (En cours de rédaction)

Chapitre 50 - folie

Le temps s'est écoulé si vite... Voilà des lunes que je milite auprès de Père pour abolir le rite de la Capture. En vain. Il a été d'autant plus difficile de lui faire entendre mes arguments qu'Arnault lui a assuré que tout se passerait pour le mieux.

- Pour ma part, je n'en suis pas si sûr ! -

Toujours est-il que le jour du départ est maintenant là et je ne peux plus reculer.

Je suis tellement furieux ! Comment peut-il me forcer à reproduire cette aberration ! Cette coutume archaïque qui nous a volé deux êtres chers ! Si je dois me résoudre à me préparer pour ce voyage délirant contre mon gré, soit ! Mais ma décision est prise. Et croyez-moi, elle va amèrement lui faire regretter son choix.

Je sais que c'est une folie. Mais nous verrons bien. Si mon projet aboutit, je sais que je ferai certainement du mal autour de moi mais que peut-il nous arriver de pire ? Et peut-être cela changera-t-il un tant soit peu les choses pour les générations à venir. Le risque est immense mais à mes yeux, ma vie n'a guère d'importance. Et de toute façon, notre famille n'est plus que l'ombre d'elle-même depuis la mort de Rodric et d'Eliana...

Je laisse mes funestes pensées dérouler leur cours pendant que je rassemble l'équipement et les vivres dont nous allons avoir besoin pour ce périple. Arkos trépigne d'impatience. Il doit certainement ressentir que le départ est imminent alors je tente de réfréner ses ardeurs tandis qu'il jappe en remuant ses cent trente livres de muscles comme s'il n'était encore qu'un chiot espiègle.

— Calme toi Arkos. J'ai bientôt terminé.

Hier encore, devant le minois anéanti d'Ella, j'hésitais à emmener Arkos avec moi. Et si je ne revenais pas vivant de cette entreprise ? Et si je mettais aussi sa vie à lui en danger ?

-Non -

Pour Ella, nous devons rentrer sains et saufs. Elle a besoin d'Arkos pour la protéger tout comme j'ai besoin de lui pour mener à bien cette mission et pouvoir confronter Père à sa déraison. Ce qu'il adviendra de moi après mon retour, c'est une autre histoire...

Mon bagage est léger. Je n'emporte que le stricte nécessaire. Une carte élémentaire mais nécessaire pour rejoindre la Vallée des Rois ; mes armes de prédilection ; ma fronde et mon arc ; une gourde que je pourrais remplir dans les cours d'eau qui longeront mon parcours ; quelques rations de viande séchées pour Arkos et moi si je ne trouve pas de gibier. Mais surtout, le matériel nécessaire pour ramener ma prise.

Le trajet jusqu'à la Vallée devrait durer quatre ou cinq jours si nous avançons d'un bon rythme. Bien évidemment, il doit se faire à pied. 

- Encore une coutume ridicule ! -

Nous aurions gagné du temps si j'avais pu faire le trajet à cheval. Heureusement, en ce début de printemps, cela ne devrait pas être trop désagréable.

Bien sûr, je suis censé revenir avec une monture mais les Garanas sont des chevaux extrêmement sauvages. Rares sont mes prédécesseurs qui ont pu s'enorgueillir de rentrer au château à dos de l'animal fraîchement capturé. Leur dressage demande de la patience et beaucoup de travail. D'autant plus que si mon plan se déroule comme prévu, les chances que je fasse partie de cette chanceuse minorité sont quasi inexistantes. Je m'en tiendrai donc aux consignes et respecterai cette tradition. Nous irons à pied.

Une fois sur place, si je mets à profit l'aide d'Arkos et la technique de Rodric pour capturer ma proie, une ou deux journées devraient suffire. Nous serons alors rentrés comme prévu dans une quinzaine au plus tard.

Et nous verrons bien si Père adhère toujours au maintien de ce rite funeste...