Chapitre 5.2

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Un léger cognement contre le bois de la porte. J'ouvris les yeux. C'était le moment. Je me levais, lissais ma robe d'une main fébrile et allais ouvrir. Je ne m'attendais pas à ce que ce soit lui qui vienne me chercher, quoique rien de plus logique eu égard à la tradition. Nerveuse, je cherchais mes mots. Devant moi, mon père ne semblait pas plus à l'aise dans son costume d'un bleu nuit. Dans son regard je vis qu'il était bouleversé.

— Tu lui ressembles tellement, aussi belle, dit-il d'une voix enrouée par l'émotion.

Je clignais rapidement des yeux pour retenir les larmes prêtes à s'échapper. Je ne voulais pas ruiner le travail de Tahlia.

— Je suis contente que tu sois là, réussis-je à dire.

Je songeais qu'il devait avoir vécu ce moment avec ma mère. Dans un monde idéal elle aurait été à mes côtés, m'aidant à me préparer, me donnant des conseils, me rassurant. La gorge serrée je m'efforçais de ne pas y songer, pas maintenant. Mon père me tendait le bras, prêt à m'escorter selon l'usage jusqu'à la salle où se déroulerait la Cérémonie d'Union. Je posais ma main sur celui-ci et le laissais me guider, prenant soin de ne pas m'étaler avec les talons hauts dont m'avait affublé la jeune femme. Si j'avais eu le choix, c'est avec des ballerines aux pieds que je serais arrivée, au moins les risques auraient été moindre de me ridiculiser.

Pour l'occasion un immense tapis d'un rouge sombre s'étalait du couloir devant la pièce où je m'étais apprêtée jusqu'à la salle où nous nous rendions. Arrivés devant le monumental escalier, j'allais amorcer ma descente. Ne surtout pas tomber, me serinais-je dès la première marche, tout en affirmant ma prise sur le bras de mon escorte. Satané escalier ! pestais-je en moi-même, combien y avait-il encore de marches à descendre ? J'avais l'impression de ne pas en voir la fin. Je remerciais la coutume consistant à se faire accompagner jusqu'à la salle de Cérémonie. Seule, je n'aurais pas manqué de faire une chute remarquable.

Pour endiguer mon anxiété, je focalisais mon attention sur le chemin emprunté, et donc sur le tapis vermeil. Rouge. Ne pas penser à la comparaison habituelle. Trop tard. Une fraction de seconde j'eus la vision de mes pieds foulant un flot de sang. J'avalais péniblement ma salive et pensais rapidement à mon homme. Il m'attendait. Il me voulait à ses côtés. Ce n'était vraiment pas le moment de sombrer dans mes cauchemars et laisser la Bête surgir.

Ma louve vint à mon secours. Fusionnant un instant avec mon esprit, elle me communiqua sa force et son impatience d'être unie à Arenht. Relevant le menton, je regardais droit devant. Enfin nous fûmes devant la porte derrière laquelle tous se trouvait.

— Prête ? demanda mon père avant de pousser le battant.

J'acquiesçais vivement. J'étais impatiente de voir mon fiancé. Il se pencha pour m'embrasser sur la joue, me laissant toute émue. Je n'allais pas pleurer maintenant quand même. Si je gâchais le maquillage élaboré soulignant mes yeux, j'en connaissais une qui me le ferait payer !

La salle se dévoila lentement à moi. Au fur et à mesure que la porte se déplaçait, les visages apparaissaient, tous tournés vers moi. Mais je ne les voyais pas vraiment, juste un arrière-plan flou. Mon regard le cherchait, remontant l'allée illuminée de chandeliers avant d'enfin l'apercevoir.

Protège-moi - T.3: Les liens du sang [ Terminé ]Where stories live. Discover now