Overwhelmed.

14. Suspicion

J'entendis quelqu'un se précipiter dans la maison. Je gardai le regard fixé devant moi. Je ne parvenais pas à faire quelque mouvement que ce soit. Laura entra soudain dans mon champ de vision. Elle s'abaissa à ma hauteur et mis une main sur ma joue.

"Chéri, qu'est-ce que tu as ? C'était quoi ce bruit ?"

Je finis par poser lentement mes yeux sur elle. Je n'arrivais pas à penser. Aucune réponse, aucune phrase ne se construisait dans ma tête. Laura plaça son visage bien en face du mien et insista :

"Erwan, dis-moi ce qu'il se passe."

J'aurais voulu crier, j'aurais voulu pleurer et évacuer tout ce qui se bousculait dans mon esprit. Mais rien ne vint. Laura soupira, s'assit à côté de moi et prit ma main. Elle remarqua alors les restes du bol de Lyna et ouvrit de grands yeux. Elle reporta son attention sur moi et fronça les sourcils.

"Erwan, maintenant, dis-moi ce qu'il t'arrive. Pourquoi tu t'es levé ? Ta voiture n'est pas ici, tu ne peux pas emmener les enfants alors pourquoi es-tu debout ? Et pourquoi le bol de Lyna est-il en morceaux ?"

Je me concentrai et tentai de rassembler le peu d'idées claires qu'il me restait.

"C'est Cassandre..." Parvins-je à articuler.

Cassandre. Son nom résonnait dans mon crâne. Son nom et toutes ces images sanglantes ne me quittaient pas. Laura se renfrogna.

"Comment ça Cassandre ? Que s'est-il passé avec elle ? Il y encore une histoire avec cette fille ?"

Elle ne comprenait pas. Cela m'agaça au plus au point. Je ne savais pas pourquoi, mais je me sentais hors de moi. Laura ne comprenait rien à rien. Je réussis enfin à me mouvoir. Je fis quelques pas et me retournai vers elle.

"Pourquoi te méfies-tu toujours de moi ? Tu ne penses donc qu'à cette histoire de trahison ? Tu ne doutes de rien ? Tu n'avais rien compris à ce qui se passait en réalité ? Et bien tu es idiote, et moi aussi je le suis." M'emportai-je.

Laura resta assise sur le sol, interdite. La journaliste à la radio continuait à débiter son flot d'informations, comme si ce qu'elle avait révélé était absolument banal. Je tirai d'un coup sec sur le fil et la voix de la journaliste s'éteignit immédiatement.
Je fis dos à Laura et m'appuyai sur le plan de travail. Je baissai la tête. Je n'arrivais pas à envisager qu'il s'agisse de Cassandre. Elle n'était pas comme cela. C'était tout simplement insensé. Insensé, mais pourtant réel. Je sentis un corps contre le mien. Je me crispai, je voulais que Laura me laisse seul. J'étais trop en colère. Contre Cassandre mais aussi contre moi. J'aurais dû voir qu'elle avait un problème, un trouble, je ne savais pas ce que c'était. J'aurais dû l'aider, l'accompagner. Nous aurions affronté cette chose ensemble et enfin elle l'aurait surpassée. Mais j'avais été aveugle. Il était trop tard aujourd'hui. Laura entoura ma taille de ses bras et cala son menton dans le creux de mon épaule. Elle ne dit rien un bref instant puis demanda :

"Erwan, je te fais confiance, je te le promets. Mais dis-moi ce que tu as, s'il te plaît. Que se passe t'il avec Cassandre ?"

Je soupirai. Après tout, Laura n'y était pour rien. Je ne pouvais m'en prendre qu'à moi. Je soufflai et lui répondis :

"C'était Cassandre, c'était Cassandre depuis le début. C'est Cassandre qui a défiguré Victoire, c'est Cassandre qui a égorgé Julie et qui lui a dissout les yeux. C'est aussi Cassandre qui a voulu tuer Maxence."

J'avais un mal fou à prononcer ces mots. Ils me faisaient réaliser l'horreur de la situation. Laura était bouche bée. Elle ne savait sûrement pas quoi me répondre. Mais que peut-on ajouter à cette révélation ? Rien. Rien ne pouvait me faire relativiser. Laura me fit me retourner, elle resta silencieuse puis me dit en plongeant son regard dans le mien :