Signera, signera pas ... ?

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(ALEX)

Voilà, on y était.

Elle avait une sale tête. Des cernes que son maquillage n'arrivait pas à masquer, les traits tirés, le teint pâle et un air triste qui me retournait le bide. J'étais sur qu'elle avait perdu du poids, à mon grand dam, et elle paraissait lessivée, littéralement au bout de sa vie. J'aurais pu lui épargner ces 15 derniers jours mais j'avais besoin de savoir ce qu'elle avait dans les tripes, au pied du mur et désespérée, pour sauver sa boite. Alors j'avais demandé à Julian de ne la prévenir de mon offre que deux semaines après notre rendez-vous au Bristol, ce qui lui laissait le temps de plancher. Et en avançant le délai accordé d'une semaine, je lui mettais un dernier coup de pression pour être sur qu'elle tiendrait le coup une fois dans la cour des grands, qu'elle saurait gérer les chauds et froids quotidiens dans le nouveau monde qu'elle venait d'intégrer. Je savais parfaitement ce qu'elle valait en tant qu'assistante et bras droit mais j'avais besoin de tester sa résistance au stress et ses capacités à prendre des décisions au pied levé une fois en première ligne.

Tout avait été pensé avec Julian pour la déstabiliser au maximum et qu'elle signe ce foutu papier. De son attente interminable aux côtés de cette peste de Grêta, la nana la plus agaçante et horripilante qu'il m'ait été donné de rencontrer professionnellement (mais très open sur les extras aux dires de Julian) jusqu'à sa présence dans cette pièce qui avait vu plus d'une affaire se régler de manière peu conventionnelle, des protagonistes généralement multiples, nus, et en sueur, sur des sujets souvent douteux et à la limite de la légalité.
Mais le résultat attendu était là. 

Je l'observai à son insu depuis près de 20 minutes derrière la glace sans tain qui faisait face au canapé et j'avais vu toute une palette d'émotions et de réactions passer sur son visage au fur et à mesure de l'entretien : la gêne quand elle avait mis un pied dans le salon, la suspicion et la réserve quand Julian lui avait exposé l'offre, le soulagement quand il l'avait laissé seule ensuite puis la panique quand elle avait commencé à réfléchir à tout ca, et enfin la détermination mêlée au fatalisme au moment de signer.

Quand elle reposa son stylo et releva la tête, j'avais quitté ma cachette et l'attendais contre la porte, avec un air et une posture que j'espérais détachés, même si mon cœur battait à mille à l'heure, redoutant notre premier échange. Elle se figea en me voyant, à la fois hébétée et résignée, et ferma les yeux un long moment. Moi je restai à attendre comme un con, suspendu à ses lèvres closes, qu'elle réagisse d'une manière ou d'une autre. Mais ne voyant rien arriver, je me décidai à lancer les hostilités. En matière de combat, le premier à dégainer décidait de l'orientation que prendrait le duel, et il fallait que je pose les bases de mon assaut.

Alors quand elle rouvrit enfin les yeux et les posa à nouveau sur moi, je me lançai, gonflant un peu le torse pour me donner plus d'assurance que je n'en avais.

- Je t'avais dit qu'on jouerait maintenant selon mes règles Lise ...

Elle tressauta au son de ma voix, mais ne répondit rien. Lentement, elle rassembla ses affaires, et s'avança vers la porte, ma proposition coincée sous un bras. Arrivée à mon niveau, elle s'arrêta et posa une main sur mon torse pour me faire reculer. Quand elle leva les yeux vers moi, ma gorge se serra. Elle était au bord des larmes et c'était à cause de moi. Contrairement à d'habitude, je ne maîtrisais pas grand chose et ça me mettait franchement mal à l'aise.

Sa réponse ne se fit pas attendre bien longtemps

- Pourquoi Alex ? Pourquoi tiens-tu tant à jouer avec moi ? Tu peux avoir n'importe quelle femme, comme n'importe quelle entreprise. Alors pourquoi nous ? Tu ne t'es jamais intéressé à moi ou au label familial alors que tu me côtoyais plus de 15 heures par jour et maintenant tu veux briser mon mariage et me prendre tout ce qui me reste de mon père. Tu me hais donc à ce point pour cette ridicule blague pendant le gala de charité ?

Puissance 1 000 (Terminée)Where stories live. Discover now