La fenêtre d'en face

Chapitre 26 - Manipulé

- 3...2...1... Bonne année!

Les couples se sautaient dessus pour s'embrasser avec fougues, des amis se prenaient dans les bras, d'autres encore se servaient leur premier verre de l'année.

Quelle connerie. Cette année-ci ne sera en rien meilleure que la précédente. Peut-être qu'elle sera limite pire.

Non, c'était même certain. Elle sera pire.

Je regardais le fond de mon verre de vodka avant de le vider d'une traite. J'avais trop bu, évidemment, et personne ne voulait passer sa soirée avec moi, j'étais trop déprimant.
Ça tombait bien, parce que je n'avais envie de voir personne.

Sauf elle. Elle qui ne me parle plus, elle qui ne veut plus de moi, elle qui a un putain de cul auquel je ne toucherais plus jamais. Voisine...

Notre dernière conversation datait de Noël, aucun de nous n'avait fait un pas vers l'autre. C'était même à elle de me lancer un défi, mais elle ne le ferait pas. Plus de jeu.

Pourquoi avais-je eu la stupide idée de commencer..? Au final, nous étions perdant tous les deux. Elle avait raison, nous n'étions certainement pas fait pour être ensemble... Mais putain elle me manque!

***

Un dernier verre... J'essayais de trouver une distraction pour arrêter de me prendre la tête, quand une jolie brune s'assit près de moi -se colla à moi pour être plus précis- et me regarda avec un regard censé être envoûteur.
- T'es tout seul chéri..?
Elle battait plusieurs fois des cils et posa sa main sur ma cuisse.

J'étais d'abord dégoûté. J'avais toujours Aline dans la tête et je n'avais nullement envie de coucher avec cette fille beaucoup trop maquillée à mon goût. Elle paraissait superficielle et trop sûre d'elle. Pas vraiment mon style...
Puis, je me dis que ce n'était peut-être pas plus mal. J'allais pouvoir penser à autre chose, me concentrer uniquement sur ça... Puis ça faisait presque 6 mois que je n'avais rien fait, pour Elle.

Elle, encore Elle...

- C'est bon, on monte, on va pas s'emmerder à parler pour ne rien dire.
Je me levais un peu trop brusquement et la pièce tanguait autour de moi. Étais-je vraiment en état de faire quoi que ce soit? Plus je titubais vers l'escalier, puis je revoyais nettement tous les bons souvenirs de ces derniers mois. Je me remémorais nos câlin, nos bisous partout, nos blagues nulles, la fois où j'avais essayé de lui faire à manger... Tous ces souvenirs se bousculaient dans ma tête au fur et à mesure que je m'approchais des chambres, à la recherche d'une qui était vide. Ma partenaire, elle, avait l'air de bien tenir sur ses pieds.

- Ici!
Elle prit ma main et m'emmena dans la chambre qu'elle avait trouvée, puis ferma à clé. Elle me déshabilla sans perdre de temps, j'en fus même étonné.
- J'vais être nul, je sais pas comment je tiens encore debout...
- On s'en fout.

Elle m'allongea doucement sur le dos et s'assit autour de moi.
- Laisse-moi faire Gabriel...

***

J'avais mal au crâne, c'était insoutenable. Pourtant, je n'arrêtais pas de réfléchir. Avions-nous vraiment fait quelque chose? Je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens de plus rien depuis le moment où elle a prononcé mon nom. Comment le savait-elle? Je ne l'avais jamais vue au lycée. Ou alors si?
Mais pourquoi avoir insisté pour coucher avec moi alors que j'étais complètement bourré, et elle pas? Elle se doutait qu'elle ne passerait pas un bon moment. J'avais un mauvais pressentiment. Très mauvais même.

Je me redressais légèrement pour attraper mon jeans, et prendre le téléphone dans la poche arrière.

Un message de Voisine.

Mon rythme cardiaque s'accélèra, je m'attendais vraiment au pire, à une engueulade, une remarque blessante, un "tout est définitivement fini, ne me parle plus." Je m'empressais d'aller voir ce message que je dus relire trois fois avant de comprendre.

" Je pensais que tu vivais mal notre rupture et que tu ne voulais pas me quitter..."

Ok, elle était au courant, cette fille était louche, je le savais. Mais pourquoi ce message..?

" C'est le cas. "

Comme elle ne me répondait pas, je me rhabillais pour rentrer chez moi.
Je pris une longue douche puis revint à ma fenêtre. Elle était là, assise sur son lit en train de lire un livre. La voir comme ça me réchauffait le coeur un instant, jusqu'à ce que je capte que nous avions rompu, je n'avais donc plus le droit de ressentir cela.

Elle leva la tête vers moi, se sentant observée sans doute, puis attrapa son téléphone à côté d'elle.

Je pris le mien dans la poche arrière de mon pantalon, déçu que l'on n'utilise plus notre moyen de communication d'origine.

"Psychopathe. "

Je souris, amusé, malgré moi. Je devais effectivement être un peu taré. Un autre message arriva dans la foulée.

" Si tu regrettais, tu n'irais pas te taper une meuf que je déteste. "

" Elle m'a manipulé. Je ne suis même pas sûr que nous avions fait quelque chose, j'étais beaucoup trop bourré. "

" Je dois te croire? "

" Oui. "

Elle me fixait. Elle s'était rapprochée de la fenêtre et elle cherchait sans doute sa réponse dans mes yeux. Je soutenais son regard, confiant. Je ne mentais pas. Elle baissa la tête pour m'envoyer un autre message.

" Je suis épuisée de tout ça Gabriel. Après tout, nous avons tous les deux le droit de faire ce que nous voulons. "

Alors, je l'imaginais dans les bras d'un autre. Non. Cette vision était insupportable. Inimaginable. Ça me détruirait tellement...

" Non... Je ne veux pas te voir avec quelqu'un d'autre..."

" Je fais ce que je veux. "

" Aline, s'il te plait..."

Je relevais la tête vers elle, j'avais les larmes aux yeux, mais elle ne devait pas s'en apercevoir avec la distance. Déterminée à me tenir tête, elle me soutenait qu'elle pourrait très bien se mettre avec un mec si elle en rencontrait un.

Je m'écroulais dans mon lit. Pourquoi étais-ce toujours si compliqué?

J'avais encore plus mal à la tête, c'était horrible. Avait-elle vraiment déjà surmonté le cap de notre rupture pour pouvoir dire une chose pareille..?

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