Chapitre 26

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PDV Elena

Le midi, je suis allée dans un petit restau chinois qui est en plein centre-ville. J'avais passé ma matinée à ne rien faire. Vraiment rien. Et puis, après avoir mangé vite fait, je suis allée sur la tombe de ma mère. J'ai du prendre la voiture environ 20minutes pour y aller. Sa tombe était blanche, avec une croix et son nom inscrit dessus. « Stephanie Morra Fradineau 1970 – 2014 » Je regardais fixement son nom gravé sur la pierre. A chaque fois que je venais, je ne disais rien, je me contentais d'être là et de réfléchir à tout ça.

J'étais assise depuis au moins 20 minutes quand mon téléphone a sonné. C'était Mélanie qui appelait. Je n'ai pas décroché, j'ai juste écouté le message qu'elle a laissé.

« El ? Qu'est-ce que tu fous ? Rachel m'a dit qu'elle t'avait vu au bahut ce matin et là, personne. Sérieux, donne des nouvelles s'il te plaît. Je commence à m'inquiéter ! En plus, j'ai du me taper philo en solo... Dis-moi où tu es je débarque direct »

Elle avait vraiment l'air paniqué du coup je lui ai répondu : « Tqt, ça va. Je prends l'air c'est tout. Merci d'avoir pris des nouvelles, c'est sympa <3 »

J'ai senti mon téléphone vibrer quelques minutes plus tard mais je n'ai pas regardé. Je suis restée là des heures, sans rien faire. J'observais, je pensais et je pleurais.

PDV Ethan

L'après-midi est passée très lentement. Je faisais cours « mécaniquement ». J'expliquais un truc et je leur donnais plein d'exercices. Je les regardais galérer sur les bouquins mais mes pensées étaient ailleurs. Depuis ce midi, je n'arrivais pas à sortir mon père de mon esprit. Je me souvenais des moments passés avec lui à la salle. Quand je voulais faire tout comme lui, que je courais après lui en sortant pour qu'il me prenne dans ses bras, sa voix, son rire ... Depuis son départ, depuis mes 8 ans, je m'efforce de le haïr, mais aujourd'hui, je ne sais plus. Au lycée, j'avais un ami qui pardonnait tout à tout le monde. Mais vraiment tout. Genre une fois, il s'est fait tabasser et il a trouvé des excuses au gars ! Je ne sais pas comment il faisait ... mais passer du temps avec lui m'a fait comprendre plein de choses, m'a fait réaliser les choses importantes de la vie. Et je crois qu'intérieurement, j'avais déjà pardonné à mon père son départ, et toutes les choses qu'il a pu me dire. Mais comment lui pardonner le fait qu'il ait abandonné ma petite sœur ? Peut-être qu'après tout, c'est de lui dont elle avait besoin pour aller mieux ?

Je regardais les terminales qui essayaient de comprendre au moins un mot du cours sur les nombres réels. Je me demandais pourquoi tout le monde déteste les maths. Moi, je trouve ça passionnant. Je veux dire, c'est tellement prévisible. C'est une science exact, les calculs sont toujours les mêmes, on peut tout prévoir, tout calculer. Il n'y a jamais d'imprévu, tout est tracé. C'est pas comme le monde dans lequel on vit où tout change du jour au lendemain. Dans les maths, on obtient toujours quelque chose, on est sûr de soi. Alors que dans la vie, rien n'est éternel, immuable.

Oulàà, je pars trop loin, il est temps de passer à la correction.

J'ai terminé l'heure en essayant de leur faire comprendre l'exercice. Et c'est plus facile à dire qu'à faire...

A 18h, alors que les élèves sortaient de la salle en parlant, j'ai pris mon téléphone et j'ai tapé le nom de mon père dans Google. J'ai découvert qu'il y avait plein d'Eric Parker. Un au Connecticut, un illustrateur né dans les années 1800, un photographe, un magicien et j'en passe. Mais aucune trace de mon père. De toutes façons, il avait probablement changé d'identité. Quand il est parti, ma mère a essayé de le retrouver, pour avoir des explications et, au moins, une pension ou je ne sais quoi. Elle s'est quand même retrouvée avec un môme de 8 ans et un bébé de quelques mois... Mais ça n'avait rien donné.

Bleeding out (Relation prof/élève)Where stories live. Discover now