Chapitre 8 - Amie / Ennemie

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Je n'ai jamais été aussi excité de ma vie. Je veux dire que ce soit pour un anniversaire ou bien même pour Noël, je n'avais encore jamais ressenti un tel degré d'excitation. J'avais l'impression d'être un gamin. Un gamin faisant les cent pas dans son salon, attendant que la porte d'entrée s'ouvre.

« - Cela fait bien longtemps que je ne t'avais pas vu dans un tel état mon chéri. Est-ce que tout va bien ?

- Oui, oui. »

Oui, tout va bien. Tout va forcément bien. Tout va bien parce que je vais partir en vacances avec Lili. Juste nous deux. Rien que nous deux et j'en suis follement heureux. C'est assez étrange comme sensation parce que d'habitude, je ne ressens pas ça. C'est sûrement parce qu'auparavant, je n'ai jamais eu à remettre mes vacances en question.

Mais là oui. Cette année j'avais peur de me retrouver tout seul.

« - C'est moi ! »

La porte s'est à peine entre-ouverte que je me précipitai déjà devant cette dernière, voyant la touffe rouquine juste sous mon nez.

Lili était là. Sac sur le dos, elle était venue.

« - Tiens Lili ! Quel plaisir de te voir ! Heureusement que tu es là, tu pourras m'expliquer pourquoi Tristan est dans un tel état ?

- Ah ?

- Maman ! Viens, on monte. »

Je la vois me sourire tandis que je saisis la main de Lili pour l'entraîner avec moi.

« - Tu sais, avec ton comportement plus qu'étrange depuis ce matin, je vais vraiment finir par croire qu'il se passe quelque chose. Qu'est-ce qui t'arrive à la fin ?

- Rien, je suis simplement content.

- A d'autre Tristan, je te connais mieux que tu ne te connais toi-même. »

Ce n'est pas faux.

« - Pourquoi tant d'empressement ?

- Honnêtement, j'avais peur...

- Peur ? Tristan, tu n'as JAMAIS peur.

- En fait, ce n'est pas vraiment de la « peur » mais je pensais que tu irais en vacances avec Oliver... »

J'ai honte. J'ai honte et je baisse la tête par réflexe, car je me rends bien compte de la stupidité de mes propos et même de mon comportement. On dirait un gamin jaloux.

Mais je l'étais. Au fond. J'étais jaloux.

Alors, Lili me dévisage de ses grands yeux et finit par éclater de rire.

« - Ahahahaha ! Ca alors...Si un jour on m'avait dit que...Ahahahaha !

- Quoi ? Pourquoi tu rigoles ?

- Rien, c'est juste ta réaction que je trouve mignonne. Franchement, celle-là, je ne l'ai pas vu venir. Tu sais Tristan, entre Oliver et moi...

- Non, non, je ne veux pas que tu me parles d'Oliver...

- Écoute-moi... »

Elle saisit mes mains et m'oblige à m'asseoir sur le lit, à côté d'elle. Je n'aime pas quand elle fait ça, car elle va employer toute la douceur et la gentillesse qu'elle a pour m'amadouer. Comme quand on explique quelque chose à un enfant. Je n'aime pas me sentir à la hauteur d'un enfant. Je me sens ridicule. Idiot.

« - Écoute...Même si par le plus grand des hasards il devait se passer quelque chose entre Oliver et moi, tu es et tu resteras à tout jamais un être ayant une place toute spéciale dans mon cœur d'accord ? Je suis bien consciente que je passe énormément de temps avec Oliver depuis un moment et je compte bien rattraper notre temps durant ces vacances. Oliver n'aura qu'à faire autre chose. Sans moi.

- Tu es sûre que ça te convient ? Je veux dire, de ne pas être avec lui.

- C'est avec toi que je veux être Tristan. Pas Oliver. Toi. »

L'image de cette petite fille rouquine ayant perdu sa chaussure s'efface alors progressivement de ma mémoire, comme si je voyais là une version évoluée de Lili. Plus mature. Plus sûre d'elle. D'où sortait-elle cette confiance ?

« - Bon maintenant qu'on a mis les choses aux claires...On se fait une soirée FIFA ? »

Parce que oui, Lili joue à la PlayStation et elle est largement plus douée que moi. Non pas que je la laisse gagner par galanterie ou autre, pas du tout, je suis bien trop mauvais perdant pour ça, mais elle est juste plus douée que moi.

Notamment à FIFA. Je n'aime déjà pas le foot en général alors en jeux vidéo. Le seul jeu où l'on arrive souvent à égalité c'est Tekken. Mais là, Lili, pour gagner, elle appuie sur tous les boutons comme une folle furieuse tandis que je m'acharne à tenter des combinaisons...Je devrais adopter sa méthode par moment. C'est tellement plus simple.

« - Je vais t'écraser ! »

Certainement.

Même si je ne suis pas certain qu'elle ait bien compris les règles du football. Elle se contente généralement de tacler tous mes joueurs jusqu'à ce que les siens aient trop de cartons rouges. Oui, Lili est de ce genre-là. Le genre à confondre Football avec Rugby. Dès qu'elle voit le ballon, elle fonce et défonce.

C'est Lili.

C'est ma meilleure amie.

Au final, France-Brésil...7-1. Je ne vous dis pas qui a « 7 » et qui a « 1 », il est évident de le comprendre.

« - Au fait, tu ne m'as pas raconté comment c'était l'autre soir...Je suis désolée, je n'ai pas pu me libérer. »

Ah. Nous y voilà. Cette soirée-là.

« - Comme d'habitude. Contrairement à nos parties de FIFA, là, ça s'est joué à pas grand-chose.

- Leila a encore tout gâché ?

- Encore, oui. Je ne sais plus quoi lui dire pour qu'elle arrête de faire ça. Elle gêne plus qu'autre chose.

- Pourquoi n'essayes-tu pas de l'aider ? »

Je pose la manette en la dévisageant, choqué par sa suggestion. Était-elle sérieuse ? Elle qui connaissait justement tous mes déboires à cause de Leila ?

« - Ne me regarde pas comme ça...Je dis juste que vous êtes deux contre un quand même. De plus, tu es un petit génie non ? Tu pourrais partager tes idées avec elle et vous pourriez élaborer un plan. Ça serait plus simple.

- Elle ne m'écoutera jamais. Elle ne m'a jamais écouté, ce n'est pas maintenant que ça va commencer.

- Sait-on jamais...Tu sais, je suis certaine, vue comment elle te tourne autour, qu'elle cherche, en quelque sorte, ta reconnaissance. Je suis certaine qu'elle veut que tu la voies comme ton égal.

- Jamais de la vie.

- Tristan...Ne sois pas comme ça. Ne sois pas méchant et borné. Aide-la et elle t'aidera. Fais un geste.

- On dirait que tu me prêches la bonne parole.

- Non, je te suggère d'élargir tes horizons. Et tu sais que j'ai raison. »

Oui je le sais, mais je ne le ferais pas pour autant. Je veux dire, il faudrait déjà que je m'excuse pour ce que je lui avais dit et ça n'était pas prêt d'arriver. Elle était en torts. Elle a toujours été en torts et à part me provoquer, Leila ne sait pas faire grand-chose d'autre. C'est bien ce qui m'énerve chez elle.

Elle ne réfléchit pas. Elle ne prend pas le temps. Elle ne fait rien à part foncer tête baissée.

« - Tu sais quoi Lili ? On verra ça après les vacances. »

Des vacances loin du monde. Loin de Leila. Loin d'Oliver. Loin de tout.

Loin de 3173.

3173  : Attrape-moi si tu peuxWhere stories live. Discover now