Une quête ardue

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Je me souviens...

Longtemps j'ai cherché, surfant sur le net, parcourant les sites et blogs, passant de tchats en forums. Ces navigations me permirent de découvrir différentes pratiques sexuelles dont certaines me laissèrent trempée devant mon ordinateur. Surtout celles concernant le monde sombre de la domination.

J'enviais ces femmes qui éprouvaient une immense liberté en se soumettant aux envies et caprices d'un homme. Bien qu'enchaînées, elles étaient fortes, assurées, elles assumaient pleinement leur sexualité, leurs besoins.

Moi aussi, je voulais connaître cette félicité d'appartenir à un Maître qui saurait me faire dépasser mes limites, qui me pousserait dans mes retranchements. Je voulais des orgasmes qui transportent votre esprit loin, très loin, dans un autre monde, ne laissant que mon corps alangui mais comblé.

C'est sur un forum spécialisé que je Le rencontrai. Au moment de l'inscription, j'avais pris le temps de choisir mon pseudo, hésitant sur le message qu'il devait transmettre aux autres. Le choix ne serait pas anodin, et je me décidais donc pour « Shibari girl ».

De mes recherches sur la soumission, le bondage était la pratique qui m'attirait le plus, et je voulais que mon surnom et mon avatar reflètent mon désir, mon inclination, sans pour autant trop en révéler non plus. Et mes choix attisèrent Sa curiosité.

Il m'interrogea à ce sujet en message privé. Son ton était courtois, aimable, contrairement à certains personnages, plus grossiers, plus agressifs, plus lourds dans leur propos. J'engageai donc bien volontiers une correspondance cordiale avec Lui.

Il me posa plein de questions sur ma vie, mes envies, mes fantasmes. Et je Lui répondais honnêtement, me dévoilant toujours un peu plus. Ses écrits avaient un je ne sais quoi d'attirant, de séduisant. Il avait les réponses à mes interrogations.

Naturellement, nos échanges évoluèrent. Nous passâmes de la messagerie du forum à un dialogue plus instantané, puis aux appels vocaux, via Skype. À sa demande, j'allumai la caméra de l'application. Je fus d'abord hésitante, car, de son côté, Il n'activerait pas la sienne.

Cela m'inquiéta un peu. Il me verrait, et je ne savais pas ce qu'Il pourrait faire de la vidéo qu'Il recevrait. L'enregistrerait-il pour la diffuser ? La partagerait-il avec d'autres ? De nouveau, avec des mots apaisants, rassurants, Il sut me persuader de lui faire confiance.

Puis, Il chercha à tester ma soumission, en me donnant quelques ordres simples : être déshabillée quand je discutais avec Lui, me caresser devant l'objectif, prendre différentes positions dont certaines très indécentes selon moi.

Cela me paraissait facile, et je m'exécutais avec plaisir, sans rechigner. Même si je ne pouvais pas juger de Sa réaction, j'espérais Le contenter. Tout cela m'excitait grandement. Et mon sexe se trempait rien que d'entendre Sa voix grave me donner Ses directives.

Sans m'en rendre compte, j'étais devenue peu à peu dépendante de Lui, de Ses mots, de l'attention qu'Il voulait bien me porter. Je passais mes journées à attendre le soir avec impatience, à attendre de pouvoir me connecter pour l'entendre.

Et quand enfin j'allumais mon unité centrale à l'heure convenue, une petite boule se formait au creux de mon ventre, mon cœur battait plus vite, et mon intimité s'humidifiait. Fébrile, j'attendais, me désespérant de toutes les secondes qui passaient avant Son arrivée.

Comme à Son désir, j'étais désormais nue devant mon écran, les cheveux retenus en une queue de cheval haute pour dégager mon cou. Je me tenais bien droite, les épaules rejetées en arrière pour faire ressortir ma poitrine qu'Il affectionnait particulièrement.

Et enfin arriva le grand soir. Le moment que j'avais attendu avec le plus d'impatience. Le moment où Il m'invita à me rendre chez Lui. Il s'était lassé de me voir à travers un écran qu'Il trouvait froid, impersonnel, et désirait me découvrir en vrai.

Il voulait me voir plier à Ses mots, m'offrir à Lui sans retenue. Il voulait pouvoir m'éduquer à sa guise, me dresser comme Il le désirait. Pour lui, j'étais un diamant brut qu'Il voulait façonner selon Ses envies pour faire de moi la plus parfaite des soumises.

Il me suggéra donc de venir un vendredi soir. Si j'étais d'accord avec ce qu'Il me proposerait, alors, je resterais avec Lui tout le week-end pour commencer mon apprentissage. Sinon, Il ne me retiendrait pas, et ne m'importunerait plus.

En sursaut, j'ouvre les yeux. Me suis-je endormie ? Mes yeux filent sur l'horloge. Non, seules cinq minutes se sont écoulées. Cinq petites minutes qui pourtant me paraissent avoir durée des heures.

Sur mon portable, aucun appel, ni message. Une furieuse envie de jeter loin de moi cet appareil désespérément muet me prend. Mais je me ressaisis très vite, presse contre moi ce fragile lien avec Lui, gardant encore un espoir.

Un espoir qu'Il avait fait naître en moi dès notre première rencontre. Un espoir d'être comprise et acceptée sans jugement dans cette sexualité différente. Je m'en souviens encore, comme si c'était hier.

Pourquoi il n'appelle pas ?

Insolente...Where stories live. Discover now