Chapitre 7

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Ce sont les cris de vikings, les plaintes des blessés et les pleurs de ceux qui ont perdu un être proche qui me ramènent à la vie. Quand j'ouvre enfin les yeux, la nuit est encore noire et sans étoile. Le vent déchaîné souffle en plus d'une pluie glaciale qui s'abat sur mon corps gelé par le temps qu'il a passé dans l'eau.

Je me redresse au prix de douloureux efforts à cause de l'engourdissement de mes membres par le froid. Mais une fois debout, le spectacle qui s'offre à moi est au-delà des mots. Le bateau n'est plus qu'un amas de bois et de planches flottant et dérivant au milieu d'une mer déchaînée par la tempête. Des hommes, des femmes, des enfants hurlent qu'on leur vienne en aide alors . . . que pour d'autres, . . . il est déjà trop tard.

Mes yeux ne peuvent quitter ce terrifiant et macabre spectacle, jusqu'à ce que mon regard soit attiré dans les rochers à quelques mètres de moi. J'avance vers cette forme, . . . qui plus je m'approche, . . . plus elle ressemble à une jeune fille. Cette dernière semble d'ailleurs épuisée à force de lutter contre le ressac de cette mer agitée contre les rochers.

_ Par tous les dieux, . . . Dagny, . . . Dagny . . . hurlais-je pour que ma voix lui parvienne au-dessus des hurlements du vent.

Dagny me cherche du regard, . . . ou plutôt, elle cherche d'où provient la voix qu'elle entend.

_ J'arrive Dagny, tiens bon, je suis là, dis-je en m'écorchant les pieds et les jambes sur les rochers.

Je fais fi des coupures et des douleurs que je ressens pour avancer le plus vite possible car je la vois fatiguer. J'ai beau tendre le bras, je n'arrive pas à l'atteindre.

_ Eivor, aides-moi, m'implore Dagny à bout de force.

Je n'ai pas d'autre choix pour l'atteindre que de pénétrer à nouveau dans ces eaux tumultueuses et glaciales. J'avance péniblement vers elle en m'accrochant aux rochers.

_ Je suis là, dis-je en l'aidant à maintenir sa tête hors de l'eau.

_ Accroches-toi moi je vais te ramener sur la terre ferme, lui dis-je avec conviction.

_ Eivor, . . . je suis coincée, me répond-t-elle alors que se dents s'entrechoquent à cause du froid.

_ Comment ? Demandais-je

_ Mon pied, . . . j'ai coincé mon pied sous un rocher.

J'essaie de trouver une solution mais il n'y en a qu'une seule. Il faut que je plonge pour l'atteindre et dégager le pied de Dagny.

_ Ne bouges pas, je vais m'accrocher à toi et essayer de faire rouler la pierre pour que tu puisses bouger, hurlais-je pour qu'elle m'entende. Dès que tu sens libre monte et regagne la terre, terminais-je en prenant une grande inspiration avant de m'engouffrer une nouvelle fois dans ces eaux glaciales et déchaînées.

Je trouve rapidement le rocher qui bloque Dagny et à ma plus grande surprise, je le déplace facilement sur le côté, libérant ainsi mon amie.

Mais au moment de remonter, une puissante lame de fond m'empêche de reprendre ma respiration à la surface. Je suis aspirée au fond dans des rouleaux. Tant bien que mal, de temps à autre ma tête sort de l'eau ce qui me permet de rester en vie mais cela vient de plus en plus difficile.

J'arrive à entendre les appels de détresse de Dagny, mais j'ai perdu tout repère, . . . je suis perdue, je ne sais plus dans quelle direction nager pour rejoindre la terre. Il me semble alors que mon heure soit arrivée . . .


Alors que je remonte sur les terres des tonneaux de vivres avec mes hommes d'équipage, je constate qu'Eivor n'est plus là où je l'avais déposée sur le sol. Sans pouvoir m'en empêcher, je balaie d'un regard inquiet les environs escarpés et rocheux que je ne reconnais pas à sa recherche. Mes yeux se posent alors sur Dagny et je constate tout de suite que quelque chose ne va pas. Elle scrute les vagues déchaînées en hurlant un prénom que je distingue mal. Je m'approche d'elle en courant . . . et plus je suis prêt mieux je comprends le prénom qu'elle hurle face à l'océan impétueux.

Quand mon cerveau intègre qu'elle appelle Eivor, mon sang se fige dans mes veines. Ce n'est pas possible, elle est la première personne que j'ai sortie des eaux. Elle devrait se reposer avec les autres. Mais non, elle a sûrement du en faire encore à sa tête. J'aurais du la ligoter, me dis-je à moi-même énervé.

_ Dagny, où est-elle ? Demandais-je autant inquiet qu'agacé.

Mais Dagny n'a pas le temps de me répondre que je me jette à nouveau dans ces eaux polaires car un corps flotte à la surface, ballotté par les vagues.

J'arrive rapidement près de ce corps inerte que je ramène vers le rivage luttant férocement contre le courant et priant les dieux pour qu'elle respire encore. Arrivant près des rochers, Gunnar m'aide ainsi que Dagny à la sortir de ces eaux tumultueuses. Dagny me regarde alors terrorisée.

_ Elle . . . elle ne respire plus, m'informe-t-elle entre deux sanglots.

Une peur irrationnelle m'envahit et serre mon cœur sans véritable raison apparente. Elle n'est qu'une captive . . . certes très belle mais une captive. Puis une colère tout aussi irrationnelle que la peur la remplace. Cette colère puissante et destructrice me ravage, sans être complètement maître de moi, je me retourne vers elle et la saisit violemment par les épaules.

_ Dagny cesse de pleurer et sauve là . . . Sinon tu la rejoindra dans la mort, articulais-je d'une voix forte et autoritaire en détachant bien chaque syllabe.

Mes paroles ont le même effet qu'un coup de foudre sur elle. Dagny cesse de pleurer immédiatement et appelle une femme pour venir l'aider à administrer les soins nécessaires.

Je ne peux pas rester ici, la voir ainsi me rend . . . faible. Je retourne donc auprès de mes hommes pour voir quelle est notre situation. De toute façon, je ne peux pas rester à ses côtés, c'est trop . . . trop douloureux. Je dois m'occuper l'esprit.

Alors que je regarde le reste de mon navire charrié par les flots. Gunnar mon fidèle ami vient me rapporter les informations récupérées auprès de quelques éclaireurs partis explorer les environs.

_ Comment vas-tu mon ami ? Me demande ce dernier.

_ Combien d'hommes avons-nous perdu ? le questionnais-je.

_ Vingt-trois personnes, plus les quinze esclaves . . . je pense que les autres navires sont passés. Ils enverrons un bateau nous chercher, me répond-t-il calmement.

_ Je l'espère, repris-je le regard perdu sur l'océan, je l'espère. Y a-t-il un endroit où nous abriter car entre la pluie et le froid, si la mer ne nous a pas emporté, se sera la fièvre, terminais-je anxieux, en ayant une pensée pour elle encore une fois.

_ Les hommes ont trouvé quelques maisons abandonnées à vingt minutes de marche. Cela nous permettrait de nous mettre à l'abri, termine mon ami.

_ Bien, que tout ceux qui peuvent porter quelque chose, le prenne et suive les éclaireurs, dis-je fermement.

_ Et pour les blessés, il y en a quelques uns, m'interroge-t-il.

_ Il nous faudra les transporter, dis-je calmement en orientant mon regard dans la direction où elle se trouve.

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