Chapitre 36

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Pour mon plus grand malheur, le chemin du retour ne me semble durer que quelques instants tant je suis perdu entre mes sentiments pour Eivor et mon devoir envers mon clan et ma famille.

Arrivée au château, l'ambiance est des plus sombre. La nouvelle sur la fin proche de mon père se lit sur tous les visages que je croise. Ils ont tous des regards tristes et leurs traits sont fermés. Prendre la succession d'un tel homme ne sera pas chose aisée. C'est un guerrier fort et valeureux, un homme sage et bon, respecté de tous.

À ce simple constat, je me rends compte que je ne suis pas prêt à lui dire au revoir . . . pas plus qu'à prendre sa suite. Et je sais très bien que certains ne me faciliteront pas la tâche, me dis-je en pensant tout de suite à Audar. Ce dernier a toujours voulu ma place qui pour lui, lui revenait de droit puisque Magnar n'avait pas d'enfant naturel. Mais mon père en avait décidé autrement, après tout il avait quitté son clan pour fonder le sien. Et il avait alors changer les règles quand il m'avait pris sous son aile, faisant de moi son héritier.

À peine ai-je posé pied à terre que ma mère vient à ma rencontre. Toujours aussi digne et froide d'apparence mais chaleureuse quand elle me prend dans ses bras. La connaissant, d'un seul regard, je sais, je sens qu'elle est inquiète car une étincelle s'est éteinte dans ses yeux. Même si pour les autres rien, absolument rien n'y paraît. Car c'est elle qui gère le camp depuis que mon père est rentré affaibli de sa dernière campagne et elle n'a rien laissé transparaître de ses émotions comme toujours.

Une blessure sans gravité apparente s'était envenimée et la maladie, elle s'était installée. Eimund, le père de Dagny et médecin de notre clan, n'a pu que le soulager mais pas le guérir de son mal. Et ces derniers temps, son état s'était dégradé, plus vite que nous le pensions.

Même si rien n'est de ma faute. Je ne peux m'empêcher de penser que je suis en parti responsable de son déclin. Si j'avais retrouvé sa fille naturelle, cela lui aurait peut être donné envie de se battre un peu plus . . . mais il semble si lasse. Ma mère me sort de mon questionnement intérieur.

_ Laisse tes affaires dans la cour . . . et va le voir, . . . je ne sais pas combien de temps . . . il va pouvoir encore tenir. Ses phases de conscience sont de plus en plus espacées, m'annonce-t-elle en me tirant derrière elle sans un regard.

Nous progressons relativement rapidement jusqu'aux appartements de mes parents. Mais avant de franchir la porte, elle se retourne et me faisant face. À cet instant, elle n'est plus la femme forte, la fière femme d'un Viking, chef de clan. Elle est juste une femme amoureuse d'un homme qui est sur le point de la quitter à tout jamais. Ses yeux se voilent de larmes quand elle reprend.

_ Il a beaucoup diminué ses derniers jours. Selon Eimund, l'infection est dans son sang et ce n'est plus qu'une question d'heures, de jours tout au plus . . ., termine-t-elle dans un sanglot étouffé.

Puis comme à chaque fois qu'une émotion trop intense l'envahit, la submerge, elle ferme les yeux quelques instants, expire doucement. Et quand elle ouvre de nouveau les yeux, elle redevient la femme froide que tout le monde croit connaître. Elle secoue légèrement la tête, sourit faiblement, puis prend mes mains dans les siennes avant de poursuivre.

_ Mais tu prendras la suite de ton père, commence-t-elle. Ton mariage avec Sigfrid va sceller l'union de nos deux clans. Ces clans qui deviendront encore plus vastes et plus puissants. Je ne pouvais rêver mieux pour toi, mon fils. De plus, tu seras bientôt père à ton tour. Certes c'est un peu tôt mais c'est une bonne chose au final pour la stabilité des clans. La naissance d'un fils serait une bénédiction des dieux.

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