41.1. Pause

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Après cette journée catastrophique, je ne suis pas sorti de l'appartement pendant plus de soixante-douze heures.

J'ai passé la première journée à dormir sans interruption. Margaux m'a passé un de ses somnifères quand l'insomnie la frappe aussi de plein fouet et j'ai dormi comme une putain de bûche. La seconde, ç'a aussi été une journée d'hibernation nécessaire. La troisième, j'ai laissé Lauren m'envoyer les nouvelles demandes de dossier par e-mail pour compenser mon absence de plus en plus fréquente au cabinet. J'ai travaillé sans relâche dans la chambre, commandant de la nourriture sur Uber Eats pour nous tous. Personne n'a le courage de se lever pour cuisiner ni même pour manger.

Margaux, Zoé et moi avons tous un moral de merde.

L'une passe son temps à travailler en silence sur son ordinateur et à écrire des articles à la vitesse de l'éclair avec les informations qu'elle a réussi à rassembler sur les différentes actualités du moment. L'autre s'enferme dans la chambre d'amis avec des livres et parfois l'un des chats. Et il y a moi au milieu qui est au fond du trou aussi.

J'ai appelé mon locataire pour lui dire que je vendais mon appartement. Je ne veux plus jamais y retourner et ça m'est égal s'il se débarrasse de tout ce qu'il contient.
Mais je veux quand même récupérer mon sweat préféré.

Le comble, c'est que Margaux ne me colle que pendant la nuit. Son corps cherche instinctivement le mien lorsque nous allons nous coucher, mais c'est tout. Elle est un peu distante, mais encore un peu tactile, mais je crois aussi qu'aucun de nous deux ne veut adresser nos problèmes pour l'instant. On a besoin d'une petite pause.

Ce matin, je me réveille sur le bruit de la porte de la salle de bains de la chambre qui est brusquement claquée.

Couché sur le ventre, je me redresse sur mes bras en entendant la chasse d'eau être tirée après trois longues minutes. Dans la pénombre, je vois Margaux ressortir avec un vêtement qu'elle jette dans son bac de linge salle.

— Ça va ? demandé-je d'une voix encore rauque de sommeil.

Elle m'observe en silence avant de rougir.

— Oui.

Je fronce les sourcils, intrigué, mais je n'en rajoute pas et me recouche. Elle s'approche de mon côté du lit et s'accroupit devant la table de chevet en grimaçant. Et en tirant une boîte d'aspirines du dernier tiroir, elle soupire :

— J'ai mes règles. J'ai très mal au ventre.

— Oh.

Je ne pensais pas qu'elle pouvait encore avoir ses règles. Les femmes stériles ne les ont pas, non ? Je ne suis pas un sans-cœur pour lui poser la question de toute manière.

Elle prend deux et se redresse en se tenant le bas-ventre. Pendant qu'elle quitte la chambre pour prendre ses comprimés avec de l'eau, laissant filtrer un peu de la lumière du salon dans la pièce, je me roule sur le dos en me frottant le visage et me délie les muscles des épaules et des bras en m'étirant. Margaux revient au bout d'un moment et referme la porte sur nous. Nous sommes seuls dans la petite pénombre du matin.

Elle grimpe sur le lit, se glisse sous les draps, mais reste à une distance respectable de moi.

Mais puisque je n'ai rien d'un homme respectable, je glisse mon bras entre le matelas et son corps et la tire contre moi.

Elle gémit en collant son visage à mon épaule et je la serre dans mes bras de toutes mes forces. Je déteste l'avoir aussi proche, mais aussi loin en même temps.

Sue Me - T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant