Acte IV, 2e Épître - Une visiteuse inattendue

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Douze jours s'étaient écoulés depuis la disparition de Kim. Ben avait retourné ciel et terre pour la retrouver. Il avait écumé tous les lieux où elle aurait pu être retenue, que ce soit le quartier général des Moissonneurs, son bureau à Seward Park, ou tout autre antenne de l'organisation se situant dans la ville de New² York, mais il s'était à chaque fois heurté à une impasse. En désespoir de cause, il s'était tourné vers Charles Dewitts, qu'il espérait voir réitérer son tour de force. Si son réseau avait pu retrouver la trace de la jeune femme une première fois, il n'y avait aucune raison qu'il n'y parvienne pas de nouveau. En attendant, l'aveugle lui avait demandé de faire profil bas, afin de ne pas attirer l'attention des autorités divines.

Maners s'en était donc retourné à ses activités habituelles, mais l'absence de la jeune femme lui pesait. Il peinait à rester concentré sur son travail, tout en sachant qu'elle était retenue prisonnière quelque part, attendant sûrement qu'il vienne à son secours. Il ne pouvait pas changer de pièce sans vérifier qu'il avait son portable sur lui, et il le consultait pratiquement toutes les cinq minutes, juste pour s'assurer qu'il n'avait pas reçu de messages de Charles.

L'attente le tuait littéralement, et sans doute fumerait-il cigarette sur cigarette s'il était encore fumeur. Mais il avait arrêté plusieurs années auparavant, juste après s'être mis en couple avec Mary-Ann, autant pour lui faire plaisir que pour ne plus avoir à entendre ses plaidoyers sur les méfaits du tabac. S'il pouvait être têtu, son épouse n'avait rien à lui envier sur le sujet, et sur tout ce qui avait trait à la santé, elle était intraitable. Il était en train de repenser à leur dernière discussion sur le sujet quand quelqu'un sonna à la porte. Abandonnant ses dossiers ouverts sur le bureau, Ben bondit de sa chaise et dévala les escaliers. Il aperçut une silhouette fine derrière le léger rideau occultant la vitre de l'entrée, indéniablement celle d'une femme.

Est-ce que ça pouvait être Kim ? Elle aurait échappé à ses ravisseurs et rejoint le domicile de Maners par ses propres moyens ? Ou bien l'avaient-ils relâchée une fois obtenu ce qu'ils voulaient ? Mais pourquoi sonner alors, au lieu de simplement entrer en passant à travers le mur ? Pour ne pas le surprendre ? Il avait des doutes, mais il cherchait à tout prix à se raccrocher à cette lueur d'espoir. Il ouvrit brusquement la porte, retenant son souffle, et se retrouva nez à nez avec un petit bout de femme d'environ un mètre soixante, dont les yeux verts, mis en valeur par ses longs cheveux noirs ondulés, rutilaient au milieu de son visage au teint pâle. La jeune femme, qui devait avoir une vingtaine d'année, sembla intimidée en se retrouvant face à Ben, dissimulant difficilement derrière sa robe bleue émeraude un léger dandinement.

« - Lynn ? s'étonna Maners, reconnaissant sa visiteuse.

- Bon... Bonjour, Benjamin, balbutia-t-elle, esquissant timidement un sourire. Désolée de passer ainsi, à l'improviste... »

« Benjamin »... Il n'y avait bien qu'elle, pour l'appeler ainsi. Ce n'était pas faute de lui répéter à chaque fois que Ben suffisait, mais invariablement, la jeune épouse de son frère en revenait au nom complet. Il ignorait si ça venait de son éducation, ou bien si elle était trop réservée pour s'autoriser à être familière avec lui, mais leur relation avait toujours été un peu distante. A sa décharge, Maners n'avait jamais particulièrement cherché non plus à briser la glace, et ça n'aurait pas été pour Mary-Ann, il ne lui aurait sans doute jamais rendu visite au cours des 3 années de sa vie de couple avec Chris.

Elle était d'une santé fragile, et son cadet rebutait à la laisser seule trop longtemps. Et son côté surprotecteur avait empiré depuis leur mariage l'année précédente ! Ainsi, quand il devait partir en mission pour une longue période, il lui demandait toujours comme un service de la visiter, de temps à autre. Son épouse s'était à chaque fois pliée au rituel avec plaisir, trouvant sans doute dans la jeune femme la petite sœur qu'elle n'avait jamais eu. Et après tout, qui aurait pu la blâmer ? Car si on occultait sa timidité à la limite du maladif, Lynn était adorable, avec son visage affable aux traits délicats, sa silhouette fine et sa chevelure soyeuse.

DIES IRAE - Cycle I : L'AngicideWhere stories live. Discover now